Les retraités béninois dont les pensions sont domiciliées au Centre des chèques postaux de Ganhi, à Cotonou, vivent un calvaire inqualifiable depuis peu. Le dernier survenu en fin de mois de mars a failli tourner au vinaigre si les responsables des lieux n’avaient pas tôt fait d’écourter les traditionnels dysfonctionnements qui y ont cours.
Nombreux dans les 4 files formées devant les guichets, des vieillards croupissent de chaleur et de fatigue. Ils sont surtout anxieux à l'idée de retourner bredouille le soir à la maison. Les minutes s'égrènent. La situation demeure telle. Ça gronde de plus en plus. " Ce qui se passe dans cette maison est inacceptable, mais aujourd'hui, on verra qui est qui " lance, tout furieux, un retraité, qui, malgré ses 75 ans tient encore sur ses jambes. Mais d'autres sont par contre à terre, les regards perdus, tantôt accroupis, tantôt tenus par l'épaule. Sous le poids de l'âge, couchées de tout leur long à même le sol, certaines femmes ne veulent pas cependant céder au désespoir. Elles se disent déterminées à aller jusqu'au bout de leur peine, cette fois-ci.
Il s'en va être 12 h30. Sonne alors l'heure de la fermeture des bureaux pour le compte de la matinée. Mais rien n'y fit. "Personne ne bouge" menace un retraité à l'endroit du personnel du centre. Toute la foule lui emboîte le pas en scandant des slogans hostiles aux responsables. D'autres retraités, entre-temps, partis prendre de l'air dehors regagnent le hall et gonflent le nombre. Une horde de policiers alertés par les responsables du centre, débarquent dans le hall pour empêcher d'éventuelles dérives.
Pas de courant, pas de sous
Le retour du courant de la Sbee se fait toujours attendre. Ce qui ravive la colère des retraités. " Sans le courant, l'on ne saurait traiter aucune pension dans les ordinaires " explique un agent technique. Les retraités présents en sont bien conscients mais n'attendent pas se faire renvoyer à un autre jour. Les cheveux grisonnants, visiblement déprimés par les vicissitudes de la retraite, portant de vieux habits délavés et de vieilles chaussures usées, Baba Aliou a un ventre si plat qu'on dirait qu'il n'a rien mangé depuis le matin. Mais, il a encore la force de bouder. " Si Yayi Boni pouvait venir ici, il m'entendra", rouspète-t-il.
Assise sur un vieux divan du hall, chevelure blanche comme la neige, Georgette Kocou dégaine : " Ce qui se passe ici est une honte et une injure aux personnes âgées ". Son visage est plein de sueur en cette torride mi-matinée. Expression d'un épuisement après moult aller et retour, de son domicile du quartier Cocodji, à l'autre bout de Cotonou, jusqu'au centre des chèques postaux. La veille, elle a dû passer toute la journée sur les lieux sans être servie. Ils sont nombreux dans le cas. Et ne cachent plus leur désarroi en ce deuxième jour de calvaire ; où à cause d'une panne électrique, ils risquent de revivre la même et triste situation. Et il en aurait été ainsi, si les autorités de cette direction n'avaient pas compris qu'il fallait mettre en marche le groupe électrogène de la maison. Mais ici, également, les retraités doivent attendre encore des heures durant pour que les techniciens sollicités arrivent à faire fonctionner cette grosse machine oubliée dans un enclos du centre. Environ 6 heures d'horloges de réparation et de révision technique sous les regards impatients des retraités. Le payement des pensions commence enfin. Au-delà de 18h30 pour se terminer tard dans la nuit.
" Traitement inhumain "
Etre payé au plus tard le 27 du mois pour ces anciens fonctionnaires de l'Etat, comme l'a toujours recommandé la direction générale de la Cnss, est encore de la fiction à cette trésorerie. Alors, Ils ne cessent de fustiger " le traitement inhumain " dont ils se déclarent l'objet et qui commencent par les "agacer ". Visiblement très remontés contre les autorités maison, souhaitant même leur départ collectif sans condition, et montrant méchamment du doigt certains responsables, des retraités, dénoncent avec véhémence les déprogrammations interminables des paiements de pensions à chaque fin de mois. A certains moments, c'est à tout le personnel qu'ils s'en prennent pour exprimer leur ras-le bol. Tenant à peine sur leurs jambes, ils ne comprennent pas que non seulement on tourne en bourrique tous les retraités qui viennent prendre leur argent à la fin du mois, mais que de plus, ils soient traités de tous les noms par certaines dames qui les servent au guichet " Nous empruntons de l'argent à nos voisins pour venir ici toucher nos pensions. Et quand on vient, on nous dit, avec un certain mépris, de repartir sans aucune excuse. Parfois, ce sont des injures que nous recevons. Certains n'hésitent pas à nous traiter de pauvres, de malheureux, de maudits. C'est comme ça que nous, fonctionnaires de l'Etat qui avons servi avec loyauté la République, sommes récompensés ! C'est triste, ce n'est pas normal ! ". Claude Adogbé, ancien cadre administratif a la terreur au visage quand il en parle. Assis sur un des nombreux bancs installés à l'arrière cour, d'autres retraités mécontents préfèrent requérir l'anonymat par crainte d'une rétorsion, car " le paiement de nos pensions peut être bloqué ".
" Ce que nous souhaitons, c'est que tous nos retraités soient payés rapidement, que l'argent arrive effectivement aux retraités " soutient un haut responsable de cette caisse qui dit prendre la mesure de cette situation bien grave qui ne fait que perdurer.
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