A quoi joue Kérékou ?
L’ancien président de la République du Bénin, le Général Mathieu Kérékou a reçu en son domicile à Abomey-Calavi ce week-end, la visite de son successeur, Boni Yayi. Dans une déclaration à la presse, ce dernier a semblé prendre position contre ses alliés d’hier qui relèvent depuis quelques semaines les insuffisances du présent régime.
Avec le même humour qu’on lui connaît depuis toujours, l’ancien président de la République, le Général Mathieu Kérékou a apprécié ce week-end, les passe d’armes enregistrées ces dernières semaines entre le gouvernement et certains acteurs de la vie politique nationale. C’était à l’issue d’une visite que lui a rendue son successeur, Boni Yayi en sa résidence de retraite à Abomey-Calavi à en croire les chaînes de télévision qui ont relayé l’information. Ainsi, pour le Général Kérékou, tous ceux qui ont donné de la voix ces dernières semaines pour notamment dénoncer et relever certain tares du nouveau régime, s’agiteraient entre eux et il faudrait qu’il s’en tiennent à ce niveau interne, car, a-t-il prévenu, « nous, nous sommes encore là et nous serons là pour voir… » Un soutien de taille dont pourrait se réjouir, l’actuel président de la République, le docteur Yayi. Mais il y a une chose que certains observateurs estiment que les présidents Kérékou et Yayi devraient savoir. Il s’agit de leurs parts respectives de responsabilité dans la situation que dénoncent à tort ou à raison, les quatre plus grandes formations politiques à la suite du groupe des treize (13) députés alliés à la majorité présidentielle.
Le premier, après avoir passé dix ans au pouvoir, a laissé au second le Bénin dans un état comateux sur tous les plans. L’aspect économique de cet héritage, on se souvient encore, a suscité beaucoup de controverses au cours des six premiers mois de l’ère du changement. Du constat des deux cent millions laissés dans les caisses de l’Etat en passant par la situation des ordres de payement (Op) aux révélations scandaleuses des audits dans les ministères ; tout était en principe réuni pour faire regretter à Yayi d’avoir à succéder à quelqu’un comme Kérékou. Et un tel sentiment a longtemps transparu dans ses interventions publiques de l’époque sur les affaires des dettes de l’Etat béninois vis-à-vis de ses fournisseurs d’énergie électrique et des producteurs de coton, évaluées à plusieurs dizaines de milliards de francs cfa, de la gestion de l’escorte des véhicules d’occasion gracieusement offerte aux fils de l’ancien président à leur feu mère… Peut-être que la gestion de Yayi ne serait pas aujourd’hui objet d’autant de critiques si Kérékou ne lui avait pas laissé autant de situations confuses. Si après tous ces forfaits commis, l’ancien président de la République et ses présumés complices continuent de circuler librement avec l’accord du peuple béninois, il faudrait qu’ils fassent en sorte d’éviter à ce peuple plein de miséricorde un autre mandat semblable au leur. Ceci passe par l’acceptation par eux de toutes les observations d’où qu’elles viennent, si elles peuvent amener le présent régime à satisfaire mieux qu’eux les véritables attentes du peuple en matière de lutte contre la corruption sans discrimination, de sauvegarde des libertés individuelles et publiques, d’une meilleure répartition des richesses produites ensemble.
Ludovic D. Guédénon