Chronique: Gang no play gang à l’Assemblée nationale

/food/zotti.jpg » hspace= »6″ alt= » » title= » »  » />Curieux, le feuilleton qui a cours actuellement au parlement béninois : d’un côté, des députés teigneux, décidés à ne pas bénir le projet de loi portant ratification du prêt koweitien pour la lutte contre l’érosion. De l’autre, le gouvernement arqué sur son entêtement grotesque à ne pas installer les conseils municipaux et communaux qui ne lui sont pas favorables. Dans les deux camps, les chiens sont lâchés, gueules ouvertes, prêts à mordre dans les tibias ou les talons, en tout cas, là où ça fait mal.

{joso}Le gouvernement, pour faire pression, joue à fond les victimes innocentes, en instrumentalisant les populations, en tirant sur leurs sensibilités. Golfe télévision s’affirme désormais comme son bras armé qui multiplie des commentaires à la logique raccourcie, fait des voce populi orientés, avec le défilé des messages alarmants sur l’écran, le tout sur invectives gratuites…
G4, G13, Force clé et tutti quanti se sont mobilisés au parlement pour assujettir le vote à l’installation, à la tête des mairies contestées, des conseillers élus.  L’argument brandi relève aussi du mélange des genres : les populations dont les communes sont sans dirigeants légitimes, souffriraient de l’imposture des anciens locataires des lieux. Elles souffriraient aussi des actes anticonstitutionnels initiés par les conseillers sortants. Certains parlementaires mettent au même niveau d’égalité les préjudices subis par les populations en question et les souffrances engendrées par l’érosion côtière. Comme si la première situation dépendait de la deuxième ou vice versa.
    Mais le fond de la question est ailleurs. Les deux camps, après s’être jaugés lors des élections, veulent montrer, l’une sa force, l’autre sa capacité de nuisance.
Forts d’une expérience de cohabitation qu’ils jugent désastreuse avec le pouvoir, les députés rebelles estiment que le premier citoyen de la nation n’est pas fiable pour un sou et qu’il faudrait, pour mériter son respect, lui montrer muscles et virilité. Les accords de collaboration qu’ils avaient signés avec lui, auraient été réduits, par la partie présidentielle, en graisse de cochon. Ajoutée à ça, la façon peu diplomatique dont on menace de les envoyer en enfer dès lors qu’ils manifestent la moindre volonté d’indépendance. Une volonté d’indépendance vite transformée en volonté de destitution de Mathurin Nago, le chef du parlement alors taxé de petit commis de Yayi. Il est vrai que le président de l’Assemblée nationale ne montre pas, lui non plus, beaucoup de caractère face au pouvoir. Ses entrées permanentes au palais de la république, ses oreilles toujours collées au téléphone de Yayi s’apparenteraient, dit-on, à du lèche-bottisme aggravé. D’où le raccourci : le chien du roi étant le roi des chiens, s’en prendre à lui équivaudrait à s’en prendre à son maître.
Mais avec l’absurdité de cette démarche, les députés ont trouvé d’autres arguments dans leurs boites à intrigues : l’installation des conseillers communaux contre le vote de la loi portant ratification du prêt koweitien. Le gouvernement qui s’attend à tout, sauf à ce contre-pied, a alors dépoussiéré sa vieille méthode : utiliser les populations contre les députés rebelles, en remettant les marcheurs au travail. Même cousue de fils blancs, cette méthode qui avait, il y a peu, montré toute son inefficacité, risque de braquer le parlement. Puisque les marcheurs dont les motions sont écrites par leurs commanditaires, présentent les députés comme des élus félons, des apatrides pouilleux.
Mais qu’on ne nous amuse pas : le projet de ratification, même s’il est voté ici et maintenant, ne transformera pas, du jour au lendemain, la côte-est de Cotonou en une zone lisse, imperméable aux assauts de la mer. Sa mise en œuvre ne commencera, pour les plus optimistes, qu’en mars 2009. Car, il y a les compléments de fonds à mobiliser, les procédures de décaissement à faire, les appels d’offres internationaux à initier, bref, de quoi gamberger encore pendant une longue période…
Le ministre a beau alarmer le monde, dire que chaque mois, la côte est grignotée sur un mètre, il ne peut en rendre personne responsable, sinon le régime Yayi héritier de ce dossier qui avait collé aux fesses de Kérékou. Et si l’on s’en tient à ses déclarations, cela signifie que depuis avril 2006, vingt sept mètres ont été arrachés à la côte. En mars 2009, avant le début des travaux, on serait à trente cinq mètres. Oui : la démagogie est une arme à double tranchant.
Mais dans cette foire d’empoigne où chacun compte les coups donnés tout en se plaignant des savates reçues, il n’y a qu’un seul et unique perdant : le peuple. Mais les deux parties semblent l’oublier, préférant animer ce bal interminable de « gang no play gang ».{/joso}

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Par Florent Couao- Zotti
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