Le Bénin évolue à pas lents
La lutte contre les maladies liées à la carence en iode, notamment le goitre, se révèle de plus en plus inefficace au Bénin. Toutes les initiatives et moyens mis en œuvre, il y a quelques années, battent de l’aile, pendant que des populations continuent de développer cette maladie et d’en mourir dans la plupart des cas.
Où en est le Bénin dans le cadre de la lutte contre les troubles dues à la carence en iode (Tdci)? Le tableau affiche des résultats bien inquiétants. Selon les données de l’enquête démographique réalisées en 2006, il ressort que parmi les ménages dont le sel a été testé, un peu plus de la moitié (55%), seulement utilisait du sel adéquatement iodé, ce qui montre que la proportion des ménages utilisant du sel a nettement diminué, passant de 72% en 2001 à 55% en 2OO6. Cette baisse drastique des statistiques, a des explications majeures, indique Mr Antonin Oliyidé, ingénieur agronome nutritionniste. A le croire , celles –ci sont, entre autres, liées à la faible implication des élus locaux dans la lutte contre les Tdci au Bénin, la perméabilité des frontières avec l’existence de mécanismes d’introduction du sel non iodé en provenance des pays limitrophes ; la non organisation en réseau des saliculteurs et salicultrices des zones salicoles du Bénin ; la non fonctionnalité de l’unité d’iodation du sel de Comè …Autant d’insuffisances qui ne contribuent guère à une lutte efficace contre les Tdci.
Et pourtant, le goitre endémique, par exemple, a été identifié depuis fort longtemps au Bénin. C’était en 1936 pour la première fois dans la partie septentrionale. Des années plus tard, des enquêtes y furent menées couvrant plusieurs localités en 1983, et en 1994 notamment. Elles ont révélé à l’époque, un taux total de goitre de 19% environ à l’époque. Au nombre des actions alors menées par le gouvernement, une opération de distribution d’huile iodée a été organisée dans plusieurs localités du Bénin. Toute fois, la stratégie principale adoptée depuis 1995 pour le contrôle de la carence iodée est l’iodation universelle du sel. Et c’est la mise en œuvre de cette stratégie qui a été consacrée par des dispositions règlementaires dont notamment, un arrêté interministériel qui réglemente l’importation et la commercialisation du sel iodé au Bénin. Il met l’accent sur les obligation faites aux opérateurs économiques de n’importer que du sel. Mais pour monsieur Antonin Oliyidé, les problèmes demeurent entiers. Il s’agit surtout, indique –t-il, du déficit d’information au niveau de certains segments de la population sur les conséquences de la carence en iode sur l’individu et les communautés ; la dépendance du Bénin vis- à vis de l’Unicef pour l’approvisionnement en kid ; l’insuffisance du personnel technique dans le système du surveillance continue du sel, l’inexistence au Bénin d’un laboratoire de détermination de l’iodurie, etc.
L’engagement du professeur Amoussou - Guènou
Si les choses trainent encore du côté du gouvernement, certains spécialistes de la santé ne dorment pas pour autant sur leurs lauriers. Au nombre de ceux-ci , le professeur Kuassi Marcellin Amoussou Guènou s’implique activement dans la lutte contre le goitre endémique depuis quelques années. C’est ainsi qu’il a initié courant 2008, une communication soumise au conseil des ministres dans le cadre de l’appui à la mise en place d’un service de radio immunodosage à la faculté des sciences de la santé (Fss), pour la prise en charge du goitre endémique dans les départements des Collines et de la Donga où la prévalence du goitre endémique est élevée. Les raisons sont multiples. Il s’agit de l’enclavement géographique de ces deux départements, le faible apport alimentaire en iode et des facteurs alimentaires goitrigènes aggravant telles que : la consommation de manioc, source de thiocyanates.
Il ressort des résultats d’enquêtes récentes que plus de 20%des enfants de 6 à, 12 ans et plus de 10% de la population totale en souffre dans ces régions. Le professeur Amoussou - Guènou précise aussi que cette maladie se caractérise par son début insidieux qui, en retarde les diagnostics lors que la baisse des capacités intellectuelles et le crétinisme sont installés. D’où la nécessité de sensibiliser davantage les populations sur ces manifestations. Et c’est à cette œuvre que s’attèle désormais le professeur Amoussou Guènou, qui initie des ateliers de sensibilisation à l’endroit des acteurs de santé des régions ciblées et des leaders d’opinion en vue de les amener à contribuer à la prévention, aux diagnostics précoces et au processus de prise en charge de cette maladie avec la contribution financière de l’Appui du projet Arhes (Appui à la restructuration et à l’harmonisation de l’enseignement supérieur.q
Tchanou Christian