Les praticiens hospitaliers craignent un «fiasco»
(Malgré les assurances du ministère de la santé)
La mise en œuvre de la mesure de gratuité de la césarienne sera effective dès le mercredi 1er avril prochain. Le gouvernement semble y tenir résolument, mais n’arrive pas encore à convaincre certains professionnels de la santé sur les conditions préalables nécessaires. C’est le cas du Collectif des praticiens hospitaliers ( Cph) qui craint déjà un « fiasco » de cette opération dans les jours et les mois à venir, si elle démarre dans les conditions matérielles actuelles du système sanitaire national.
La mesure de la gratuité de la césarienne, tant annoncée, sera enfin une réalité dès le mercredi 1er avril prochain. Le gouvernement semble vraiment décidé à démarrer les opérations à cette date, selon des sources proches du ministère de la santé. Mais déjà, des inquiétudes naissent quant à l’efficacité de cette opération imminente. Réunis en Assemblée générale extraordinaire le vendredi 27 mars dernier, les militants du Collectif des praticiens hospitaliers ( Cph) se sont penchés sur la faisabilité de cette décision face au contexte social actuel dans le secteur de la santé et la problématique liée à ladite gratuité.
Si les médecins, chirurgiens, gynécologues obstétriciens approuvent à sa juste valeur cette « noble et louable » initiative qui constitue, à leurs yeux, un grand pas dans la voie de la réduction de la mortalité maternelle et néonatale, figurant en bonne place dans les Objectifs du millénaire pour le développement, ils estiment qu’il y a un hic. «Le contexte social actuel caractérisé par les grèves perlées dans nos hôpitaux, le mécontentement quasi général du personnel soignant, le non payement des primes de risque aux paramédicaux, des primes de motivation, rendement, spécifique ; les promesses non tenues du gouvernement quant au payement des primes de logement et d’incitation à la fonction hospitalière , constituent la première difficulté voire un obstacle au démarrage de cette activité par les acteurs dans des conditions saines et adéquates » alertent-ils dans une récente déclaration.
Selon le Dr Camille Kpadé, président du Cph et signataire de ladite déclaration, le bureau de leur organisation n’a pas manqué, en son temps, de rencontrer le ministre de la santé pour lui faire part des problèmes relatifs à la faisabilité de cette décision, eu égard aux ressources matérielles, humaines et financières disponibles et au complément de moyens mis à disposition. « Nous lui avons surtout rappelé la nécessité d’accélérer la procédure d’acquisition des équipements d’urgence à hauteur de 5 milliards ; de réglementer les gardes et astreintes en imputant cette charge au budget national et d’organiser les missions médicales » précise-t-il dans la déclaration. Il se préoccupe également de l’absence de document de mise en œuvre, la sous-information des acteurs et leur faible implication, le manque de clarification dur le ciblage des bénéficiaires, l’occultation de la prise en charge du nouveau-né, issu de la césarienne, etc. Depuis deux ans, à en croire, le Dr Kpadé, le Cph a donné le signal en fustigeant le très bas niveau d’équipement des centres de santé, les effectifs très insuffisants des personnes de santé toutes catégories. « Le dossier des 5 milliards a été remis en cause par la Commission nationale de régulation des marchés publics, subissant ainsi le coup de la bureaucratie. Il se trouve en cours d’une reprise intégrale de procédure qui se présente pénible et interminable » fustigent, par ailleurs les praticiens hospitaliers qui indiquent aussi que les préoccupations exprimées par les acteurs lors des tournées préparatoires n’ont pas été prises en compte ; et que la seule fourniture de la boîte de césarienne à certains centres ne suffit pas pour faire face à la nouvelle donne.
En définitive, si le Cph réitère son adhésion à la décision de la gratuité de la césarienne, elle dit nourrir de sérieuses appréhensions quant à sa pérennité, exhortant alors le gouvernement à prendre en compte sa contribution afin que la paix revienne dans les hôpitaux et que la césarienne gratuite ne soit pas un fiasco. Mais du côté du gouvernement, tout laisse croire qu’il n’y a pas de souci à se faire. Un communiqué diffusé depuis peu sur les ondes annonce le démarrage de cette opération dans de « bonnes conditions » et appelle toute la population à accompagner les autorités en charge afin qu’elle connaisse un succès total. Quant aux dispositions matérielles conséquentes, le ministère de la santé réaffirme sa volonté d’apprêter celles nécessaires pour un bon démarrage de l’opération. Vivement qu’il en soit ainsi.
Christian Tchanou
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