Les propositions du journaliste Mathias Combou
Le journaliste sportif du quotidien L’événement Précis Mathias Combou a adressé au Président de la République Boni Yayi une lettre ouverte au sujet du développement des infrastructures sportives. Ce dernier a fait des propositions concrètes par rapport à la répartition de certaines ressources financières.
Cotonou, le 26 mai2009
A
Son Excellence Docteur Boni YAYI,
Président de la République,
Chef de l’Etat,
Chef du gouvernement
Objet : Lettre ouverte au sujet des infrastructures sportives
Excellence Monsieur le Président de la République,
Je ne sais pas si mes suggestions pourront bénéficier d’une quelconque attention de la part de votre haute et aimable autorité, car je ne suis pas de ces hommes influents qui vous entourent et qui ont voix au chapitre. Toutefois, je tiens à vous en faire part.
Depuis votre accession à la magistrature suprême, vous avez entrepris maintes réformes aux plans économique, social, infrastructurel, diplomatique, éducatif…En trois ans d’exercice, le Bénin a pris un envol certain. Vous avez ce rêve intime de sortir notre pays du carcan des pays mal placés dans le concert des nations. Toutes les valeurs intrinsèques de l’homme étaient faussées dans ce pays avant l’avènement de votre concept qu’on nomme à tort ou à raison le « Changement ». La corruption était le lot quotidien des fonctionnaires, des hommes dits d’affaires et dans toutes les sphères de l’administration. Même si le phénomène persiste actuellement sous votre régime, à votre ascension au pouvoir, vous avez bon an mal an, commencé par assainir l’économie qui avait du plomb dans l’aile. Vous vous êtes attaqué à la lutte contre la pauvreté pour sortir les populations béninoises de leur précarité ambiante. C’est dans ce cadre que vous avez conçu les micro crédits aux plus pauvres. Quelle initiative salutaire ! En témoigne l’écho favorable dont il a bénéficié et continue de bénéficier au sein des populations béninoises profondes qui avaient moins d’un dollar à dépenser quotidiennement. Mais très tôt, cette initiative a laissé place à la corruption, à la gabegie, au vol. Vos ministres qui se sont succédé à la tête de ce département de lutte contre la pauvreté qu’est le ministère des micro finances n’ont pas toujours eu la même vision que vous. Excellence Monsieur le Président de la République,
Vous avez vu l’acharnement avec lequel l’opposition non déclarée s’est empressée pour mettre en berne fort logiquement ou pour décapiter ce projet. Tout simplement parce qu’il y a de l’obscurantisme dans la gestion de ces fonds. Imaginons, Monsieur le Président que vous fassiez un petit exercice au sommet de l’Etat avec l’aide de vos ministres concernés pour ce domaine. Je peux me tromper. « Mais seuls ceux qui ne tentent pas ne se trompent pas » dit-on. Vous avez une enveloppe financière qui est réservée aux micro-crédits aux plus pauvres. Sans chercher à connaître combien vous prévoyez chaque année, j’estime qu’on peut diviser cette manne en deux parties.
Avant tout, je sais que cette enveloppe est largement insuffisante pour la réalisation de votre projet pour les femmes béninoises, nos mères qui s’échinent tous les jours dans les hameaux les plus reculés de notre pays. Vous destinez la première partie aux micros crédits, un projet qui n’a pas l’adhésion de tous les Béninois à cause de son caractère partisan aux yeux de certains politiques. La deuxième partie sera réservée aux infrastructures sportives. En effet, j’ai fait cette démonstration jusque-là pour vous faire voir la nécessité de construire des stades pour les jeunes. Si les femmes représentent 52% de la population béninoise, les jeunes constituent le fer de lance du développement. Et 60% de la population béninoise sont âgés de moins de 35 ans. Je sais que si vous déteniez un bâton magique, vous auriez déjà fait du Bénin une puissance économique et l’Emergence que vous prônez serait déjà une réalité. Pour atteindre ces objectifs cardinaux de développement, il y a des critères importants. Les infrastructures sportives en font partie. Il ne suffit pas d’injecter des milliards dans le sport en général et le football en particulier pour estimer avoir des résultats et faire connaître davantage le pays sur le plan international. Une fois obtenue l’enveloppe réservée à la construction des stades, attendez trois ans pour faire le point. Ces fonds peuvent aider à avoir un stade de standing mondial après cette période. Si vous faites dix ans au pouvoir, vous pouvez faire ériger trois stades pour le pays dans les villes phares que sont Cotonou, Porto-Novo, Parakou ou Abomey ou encore Lokossa. Les micro-crédits ne sont pas perceptibles alors que les stades rentrent dans le patrimoine du pays pendant des décennies. Au XXIème, le Bénin possède seulement un stade qu’est celui de l’Amitié de Kouhounou complètement dépassé par le temps. La réfection du Stade Charles de Gaule de Porto-Novo, la capitale, a déjà connu six ministres des sports. Le stade attend vainement d’être livré aux sportifs et aux compétitions et tout le monde attend que Dieu vienne du ciel pour sa livraison. Les coupables sont là et se gavent sur le dos du contribuable.
Excellence Monsieur le Président de la république,
Je sais que vous êtes un admirateur du peuple ghanéen. Prenez son exemple s’il vous plaît. Dans chaque ville phare du pays, notamment Tamale, Kumasi, Accra et Sekondi-Takoradi, il y a un grand stade qui constitue en même temps un temple du sport, une architecture splendide et une cathédrale des grandes manifestations. Le stade de Sekondi-Takoradi a été construit en moins de deux ans avec peu de moyens. Les exemples de l’Afrique du Sud, du Mali et du Burkina sont éloquents. Imaginons que pendant le sommet de la Cen-Sad à Cotonou et au moment où le Guide libyen, Mouammar Kadhafi devrait livrer son message à la jeunesse béninoise, qu’il n’y ait pas les installations du Stade de l’Amitié. Ce serait la catastrophe. Lors des éliminatoires Can/CM 2010, le Bénin a failli livrer ses matches à domicile sur un terrain neutre. Kouhounou ne respecte plus les normes modernes pour la pratique du football selon la Fifa (Fédération internationale de football association).
Excellence Monsieur le Président de la République,
actuellement, aucun homme politique ou aucun Béninois ne peut remettre en cause votre action franche dans les infrastructures. C’est de cette manière qu’on ne saurait passer sous silence votre œuvre pour la jeunesse à travers les lieux de loisirs et surtout les stades. Les hommes politiques peuvent vous conseiller de créer des mouvements de jeunesse tous azimuts dans le pays. Ils ne vous rendent aucun service. Ce sont des clubs de bouffe, de mendicité ou de trompe-l’œil. Tous les jeunes béninois ne se retrouvent pas dans ces creusets où se mènent des faux débats. Mais quand les Ecureuils jouent à Kouhounou, il n’y a pas de couleur. Il n’y a pas de partis politiques, de confessions religieuses, d’ethnies, de pauvres encore moins de riches… C’est un signe de l’unité nationale que vous prônez dans vos discours tous les jours.
Construisez-nous des stades ! Nous ne voulons pas que les politiciens d’hier qui vous entourent aujourd’hui vous conduisent dans le mur. Vous pouvez tout donner à la jeunesse du XXIème siècle, si vous omettez la pratique du sport, vous n’êtes pas son défenseur. Je sais que vous avez de l’ambition pour ce pays et que vous aimez le Beau. Les micro-crédits d’accord mais les infrastructures sportives d’abord. Vous aurez résolu beaucoup de problèmes par la réalisation de cet idéal. Les beaux discours, les meilleurs regroupements de jeunes, les meetings de soutien, les micro-crédits aux plus pauvres… ne représentent pas un seul stade construit par un Chef d’Etat pour son pays.
En souhaitant vivement que ces humbles propositions passent entre les mailles de vos si rigoureux services, je vous prie d’agréer, Excellence Monsieur le Président de la République, l’expression de ma très haute considération.
Mathias COMBOU,
Journaliste sportif, Chef Desk Sport au quotidien L’événement Précis