Le double jeu des associations de consommateurs
A la faveur d’une conférence de presse qu’elle a donnée ce mardi, la Ligue pour la défense des consommateurs du Bénin a tenté de justifier la hausse des prix à la Soneb et à la Sbee, en qualifiant la mesure d’irréversible. Cette position, pour le moins suspecte, donne à réfléchir sur sa raison d’être dans le concert des mouvements de défense des consommateurs du Bénin.
S’il est vrai que la Société béninoise d’énergie électrique (Sbee) et la Société nationale des eaux du Bénin ( Soneb) ne peuvent plus continuer d’exister sans revoir leurs tarifs à la hausse, du fait d’une trésorerie dite accablante, il n’en demeure pas moins vrai que plusieurs facteurs y ont contribué. Les responsables desdites sociétés au plus haut niveau l’ont reconnu et avoué. Et la Sbee et la Soneb ont connu une gestion calamiteuse ces dernières années. Les fonds ont été dilapidés dans tous les sens. Ces deux sociétés d’Etat étaient devenues comme des vaches à lait pour plusieurs de ses responsables d’alors, qui hélas, ne craignent rien à ce jour. Ce n’est plus un secret de polichinelle : la Sbee et la Soneb ont été sacrifiées sur l’autel des manœuvres financières de tous genres, au point d’être aujourd’hui étranglées par des dettes énormes. Voilà la triste réalité qui a conduit à cette mesure de hausse des prix des différentes prestations qu’elles fournissent aux consommateurs. Les associations de consommateurs en sont bien conscientes, mais ne veulent pas tenir le langage de la vérité. Elles préfèrent plutôt s’adonner à des démonstrations qui débouchent sur des positions partisanes au grand bonheur des dirigeants. Si non, comment comprendre que ces associations, qui jadis, dénonçaient la cherté inquiétante de la vie au Bénin, se retrouvent aujourd’hui dans une autre posture. Comment comprendre, qu’elles puissent se servir des mêmes arguments que le gouvernement pour donner carte blanche à cette mesure qu’elle qualifie « irréversible ». Romain Abilé Houéhou et consorts sont-ils toujours du côté des consommateurs, ou ont-ils déjà mordu à l’hameçon ? La question se pose avec acuité. Vraiment, quelque chose semble tourner mal dans leur rang et détourne leur regard de la misère du peuple. Dire que le gouvernement ne peut pas faire autrement que d’augmenter ces prix, laisse croire qu’ils ont perdu leurs repères et s’accrochent désormais à des actions génératrices d’intérêts.
Au nom de quoi, le peuple doit payer à la place des pilleurs de la Sbee et de la Soneb ? Personne n’a encore la réponse au sein de ces dites associations de défense des consommateurs. Personne, et pas même ceux, qui, à une autre époque, battaient pavés pour crier à l’injustice. Où sont-ils aujourd’hui, ces messieurs qui râlaient sur tous les toits contre la pagaille qui régnait au sein des Gsm ? Où sont-ils aujourd’hui, ces messieurs et dames qui criaient au scandale contre l’augmentation sans cesse des prix des produits pétroliers ? Ils sont toujours dans le pays, mais ont désormais la bouche cousue. Et quand ils décident parfois de réagir, leurs propos sont colorés et orientés vers des intérêts inavoués.
Ailleurs, cette mesure devrait déjà susciter des marches de protestation à n’en pas finir. Des associations de consommateurs sortiraient déjà de leurs réserves pour dénoncer le gouvernement qui accentue ainsi la cherté de la vie, sans penser aux mesures d’accompagnements. Si tant est qu’il faut augmenter les prix des produits, il est également nécessaire de revoir à la hausse la masse salariale dans le pays, à une proportion adéquate. Cela est d’autant plus urgent que nous vivons dans une ère de crise financière qui gagne du terrain au fil des jours. Les associations des consommateurs devraient saisir l’occasion pour mieux se faire entendre, au nom des citoyens qu’elles sont censées défendre. Ne pas avoir cette vision des choses demeure un grand péché qui ne devrait plus justifier leur existence.
Christian Tchanou