Quelle option pour Boni Yayi ?
Les anciens ministres Bruno Amoussou et Lazare Sèhouéto ont adressé une lettre au président Boni Yayi afin qu’il enclenche la procédure judiciaire en ce qui concerne un certain nombre d’affaires qui les concernerait et évoquées par Rachidi Gbadamassi, le nouveau griot du régime du changement. Dès lors, on se demande bien ce que le président de la République fera désormais. Lorsque le 6 avril 2006, Boni Yayi déclarait que « la lutte contre la corruption est non négociable », il ne croyait pas si bien dire. Après ses premiers coups d’éclat avec l’arrestation de Séfou Fagbohoun, de Alain Adihou, Barthélemy Agnan et quelques autres directeurs généraux de sociétés, sa fougue fut très vite estompée. Par quoi, lui seul le sait. Pour d’autres, c’est son manque d’expérience et la real politique qui l’ont rattrapé. Mais depuis quelques semaines, c’est de la société civile et de certains acteurs politiques que vient la pression pour que soit relancer la lutte contre la corruption qui, entre temps, est devenue sélective selon ses détracteurs. Et apparemment, on a l’impression que le chef de l’Etat ne s’attendait pas à ce qu’une pareille pression vienne d’ailleurs, voulant être le seul maître du jeu. Mais, sans tambours ni trompettes, Marie-Elise Gbèdo a ressuscité le projet de loi sur la corruption, qu’elle invite le président à faire voter. Anne Cica Adjaï, la dame moralisation de la vie publique de Mathieu, affirme ne plus croire à la lutte contre la corruption. Elle somme aussi le locataire de la Marina de faire diligence pour le vote de la loi anti-corruption qui a pris naissance sous le régime défunt. Comme si cette pression ne suffisait pas à un moment où la majorité au parlementaire n’est plus mécaniquement acquise au chef de l’Etat, comme c’était le cas lors de ses premiers mois au pouvoir, ce sont deux politiciens de taille, anciens ministres qui défient Yayi de pouvoir poursuivre la lutte contre la corruption.
Acculé, Boni Yayi doit réagir
C’est à travers une lettre conjointement signée que Bruno Amoussou et Lazare Sèhouéto ont invité Boni Yayi à ouvrir la procédure judiciaire afin d’élucider les affaires concernant le crédit-relais contracté par la Sonapra et celle relative à l’achat de groupes électrogènes usagés par la Sbee sous le régime du général Mathieu Kérékou dont ils ont été ministres. Ces affaires révélées par Rachidi Gbadamassi n’ont pas cessé de mettre la crédibilité de ces deux anciens ministres en doute. C’est cela qui a motivé leur adresse au chef de l’Etat afin qu’il prenne les mesures judiciaires qui s’imposent. Voici donc de présumés corrompis qui invitent le chef de l’Etat à les poursuivre. Que fera désormais le président dans cette affaire ? Va-t-il réellement saisir la justice ?
Si c’était le cas, tout en sachant que Bruno Amoussou et Lazare Sèhouéto sont couverts par l’immunité parlementaire, demandera-t-il à leur encontre la procédure de lever de ladite couverture ? Aura-t-il enfin compris le message que lui transmettent ces deux anciens ministres de Kérékou ? Toujours est-il que désormais, dans la lutte contre la corruption, le président de la République a le dos au mur. Et le peuple est désormais plus qu’en, alerte pour suivre la manière dont la lutte contre la corruption va se poursuivre.
Benoît Mètonou