Les conventions de Genève, vieilles de soixante ans, sont toujours bafouées

Les quatre conventions de Genève viennent d’avoir 60 ans. En effet, elles ont été adoptées le 12 Août 1949 dans leur forme définitive au terme d’une conférence diplomatique qui a duré 5 mois. Fruits des initiatives du comité international de la Croix rouge (CICR), elles procèdent du respect de la dignité humaine et constituent l’ossature essentielle du droit international humanitaire, partie intégrante du droit international public contemporain.

La première convention qui est de 1864, concerne les blessés et les malades des forces armées en campagne. Au cours de l’année 1906, elle a été révisée et adaptée aux blessés et aux malades des forces armées sur mer. Comme de manière récurrente les faits précèdent le droit, les traitements affreux subis  par les combattants capturés lors du premier conflit mondial  1914 1918, ont motivé l’adoption en 1929  d une troisième  convention pour l amélioration du sort des prisonniers de guerre. De la même manière, la quatrième convention a été dictée par le nombre extrêmement élevé de victimes civiles au cours de la deuxième guerre mondiale. Ces instruments juridiques ont subi des modifications positives, toute œuvre humaine étant perfectible sous l’impulsion de la dialectique, loi du développement du réel. En effet, de 1946 à 1948, il y a eu des réunions de sociétés nationales de la Croix rouge, des concertations entre experts pour revisiter ces instruments d’importance avérée. Du mois d’Avril au mois d’Août 1949, s’est tenue une conférence d’diplomatique, convoquée par le conseil fédéral suisse, dont les travaux ont abouti à l’adoption des quatre conventions dans leur forme définitive le 12 Août 1949 :

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1- Convention de Genève sur le sort des blessés et des malades des forces armées campagne. 64 articles
2- Convention de Genève pour l’amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer. 63 articles
3- Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre.143  articles
4- Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre. 159  articles

Ces quatre instruments juridiques constituent sans l’ombre d’un doute un chef d’œuvre de taille, traduisant l’aboutissement, le couronnement de nombreux efforts consentis depuis le 19è siècle par des hommes de grande culture et de grande qualité morale pour qui, l’homme est la mesure de toute chose. Ce qui est dans l’ordre des choses pour tout observateur, c’est l’ensemble des faits, des situations, des événements nouveaux qui ont amené les experts à adopter en 1977 deux protocoles additionnels en vue de consolider les quatre conventions, étant entendu que le protocole N°1 s’applique aux conflits armés internationaux, tandis que le protocole N°2 est relatif aux conflits armés non internationaux. Il convient de noter que, lors des conflits armés internationaux, l’action du CICR se fonde sur les quatre conventions et le protocole N°1, alors que l’article 3 commun à ces textes et le protocole N°2 sont invoqués lorsqu’il s’agit des conflits armés internes.

L’application de ces conventions et de leurs protocoles sur le champ de bataille.
 La réalité qu’il faut éviter d’occulter, c’est que, d’année en année , les dispositions de ces conventions, ainsi que celles de leurs protocoles additionnels sont manifestement violées , alors qu’elles visent d’une part, à assurer aux personnes hors de combat ainsi qu’aux populations civiles un traitement décent, et à limiter d’autre part , les moyens à utiliser sur le  champ de   bataille On oublie souvent que les malades, les blessés ne sont plus des ennemis, mais plutôt des êtres humains qui souffrent, dont la dignité doit être protégée. On oublie souvent que les populations civiles, notamment leurs composantes très vulnérables que sont les femmes et les enfants ont droit à une protection appropriée. Si le non respect quasi permanent un peu partout de ces conventions qui ont maintenant 60 ans constitue une réalité aussi amère que la quinine, c’est que les Etats ne remplissent pas leurs obligations aux termes du droit international contemporain. L’apathie volontaire, délibérée et cynique de bon nombre d’Etats face aux exactions inouïes, comme les viols massifs, les exécutions extra judiciaires et autres traitements abominables inquiète de jour en jour. Cet état de choses qui fait fi de la dignité humaine très précieuse de toute évidence, à motivé de la part de la communauté internationale, la création d’un certain nombre de juridictions pénales.
C’est la meilleure option, la plus salutaire, puisque la plupart des Etats, notamment ceux du continent africain, se soucient très peu de l’impératif consistant à faire en sorte que l’homme cesse d’être un loup pour l’homme en ce début de siècle. Les Etats devraient savoir qu’il dépend d’eux que les conventions de Genève soient respectées, car, même sur le champ de bataille, aucun combattant n est appelé à se départir de  l’obligation de concilier les nécessités militaires et les principes d’humanité puisque l ennemi  demeure malgré tout un être  humain.  Il dépend d’eux que l’éducation et la lutte contre l’impunité prennent véritablement corps en vue d’assurer le respect de ces conventions. Enfin, il dépend d’eux que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité résultant du piétinement de ces instruments juridiques prennent fin de manière progressive.

La cour pénale internationale a été créée, pour servir d’instrument de dissuasion et de lutte contre l’impunité, protégeant ainsi de façon corrélative la dignité humaine à travers le respect des textes régissant les conflits armés depuis 60ans. Que rien ne puisse se faire sans la coopération des Etats est une évidence qui porte préjudice.

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Il importe fondamentalement que chacun d’eux prenne le parti des victimes de crimes odieux en agissant en pleine complémentarité avec la CPI pour une paix réelle et durable que nous appelons tous de nos vœux .Au lieu de se braquer de manière scandaleuse contre la jeune juridiction  pénale internationale , les Etats africains feraient mieux de coopérer avec elle en vue de mettre un terme aux transgressions délibérées  des conventions de Genève lors des conflits armés. Si ceux qui nous   gouvernent  actuellement  ne s acquittent pas de ce devoir, la postérité les condamnera sans appel, et ils auront vécu inutilement. Il est souhaitable qu’ils s efforcent  d’être les artisans d un monde  bien meilleur que celui du siècle passé.

Par Jean-Baptiste GNONHOUE
Président de la coalition béninoise pour la Cour Pénale Internationale (CPI)

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