L’Etat et l’individu face aux droits de la personne humaine

/food/gnonhoue.jpg » hspace= »6″ alt= » » title= » »  » />Les dérives fréquemment constatées ça et là inquiètent sérieusement bien des gens. Notre souhait légitime est que tout soit mis en œuvre pour assurer le triomphe des droits de l’homme au cours du siècle présent, condition essentielle du développement et de la paix. Les privilèges fondamentaux, les droits et libertés publiques, constituent un domaine sacré qui s’affirme au fil des jours à l’échelon international. Selon Amnesty International, organisation de défense des droits de l’homme de premier plan dans le monde, prix Nobel de la paix 1977, il s’agit d’instaurer « un monde dans lequel toute personne jouit de l’ensemble des droits inscrits dans la déclaration universelle des droits de l’homme et les autres normes internationales relatives aux droits humains ». Notre propos ici, consistera à montrer que pour sauvegarder ces droits qui conditionnent une vie normale, harmonieuse au sein de la communauté nationale ainsi qu’à l’échelon international, l’Etat et l’individu ont des responsabilités à assumer.

Des responsabilités de l’Etat en matière de droits de la personne humaine.

L’Etat, personne morale de droit public, doté de la souveraineté, n’a pas que des privilèges. Il a aussi des obligations à l’égard des individus relevant de sa juridiction ainsi qu’en ce qui concerne les autres membres de la communauté internationale. S’agissant précisément des droits de l’être humain, la charte de l’ONU, instrument constitutif de l’ordre international contemporain, met en exergue notamment en ses articles 55 et 56 que l’Etat a des responsabilités légales. La promotion, la protection et la prévention constituent ensemble la clé de voûte de ses responsabilités. La mise au point de normes, de législations, de déclarations ou de conventions permet de promouvoir les droits fondamentaux et les libertés publiques par des mécanismes établis avec pertinence dans le système Onusien ou régional. Il va sans dire que les droits et libertés seront à l’abri des perturbations de toutes natures, lorsque les Etats s’évertueront véritablement  à accorder à ces mécanismes l’intérêt qu’ils méritent. En outre, l’éducation des citoyens, l’information et la lutte contre l’impunité pour dissuader les violateurs potentiels sont autant d’éléments à prendre au sérieux. Pour ce qui est de l’éducation des citoyens, nous avons constaté avec beaucoup d’amertume que la plupart des Etats, notamment ceux d’Afrique, c’Amérique latine et d’Asie n’ont pas cru devoir agir avec enthousiasme et diligence quant à la mise en œuvre des directives relatives à la décennie des Nations-unies pour l’éducation aux droits de l’homme. En effet, l’Assemblée Générale des nations-Unies par la résolution 49/184 du 23 décembre 1994, a proclamé la période allant du 1er janvier 1995 au 15 décembre 2004, « Décennie des Nations-Unies pour l’éducation en matière de droits de l’homme ». Ce n’est que bien des années après cette proclamation que les Etats se sont réveillés. Il est vrai que cette éducation n’est pas en fait limitée dans le temps. Mais l’enjeu étant de taille, toute action diligente était requise. On s’aperçoit que l’Etat a l’obligation incontournable d’instaurer au sein de sa juridiction une culture authentique des droits de la personne humaine, condition essentielle d’un équilibre social que tout individu raisonnable ne peut qu’appeler de ses vœux. Il y a également quelque chose de fondamental sur lequel l’on droit insister. Tout état, sous peine d’être la cible des organisations de défense des droits de l’homme, doit respecter absolument les instruments juridiques qu’il a adoptés de plein gré par ratification ou adhésion, ou encore par succession. Un Etat qui, de façon imperturbable, commet des exactions massives et itératives inquiète bien des personnes. D’ailleurs, l’article 30 de la déclaration des droits de l’homme de 1948, ainsi que l’article 5 commun aux deux pactes internationaux interdisent sans équivoque l’adoption de mesures et de comportements destructifs. Cependant, il y a une chose que nul n’est censé ignorer : c’est que, quoi qu’on dise, quoi qu’on fasse, l’Etat est le garant de l’ordre et de la loi. A ce titre, il a le droit et le devoir d’adopter provisoirement par une procédure conforme à la légalité constitutionnelle et au droit international des mesures restrictives en cas de danger public exceptionnel et avéré, c’est-à-dire menaçant sans conteste la vie de la nation. Echappent à cette restriction les articles 6 ; 7 ; 8 (par 1 et 2) 11, 15, 16 et 18 du pacte international relatif aux droits civils et politiques. En substance, ces articles interdisent en tout lieu et à tout moment les atteintes à la vie, la torture, l’esclavage, la servitude, l’emprisonnement pour non exécution d’une obligation contractée, la rétroactivité des lois pénales, la non reconnaissance de la liberté de pensée, de conscience et de religion . Il est également utile d’affirmer qu’une justice véritablement indépendante et compétente est l’un des instruments de sauvegarde des droits de l’homme. Mentionnons à dessein que l’article 2 de la charte de l’ONU met en relief l’égalité souveraine des Etats et la non ingérence dans les affaires intérieures. Mais, il serait dangereux d’ignorer que le droit international contemporain fixe des limites à la souveraineté, lorsqu’il s’agit des droits fondamentaux et des libertés publiques. Dans ce domaine précis, aucun Etat ne peut légitimement soulever l’exception de compétence nationale, invoquer le domaine réservé, ou l’acte de gouvernement. Par conséquent, lorsqu’un Etat commet de graves atteintes à la dignité, la communauté internationale est tenue d’agir pour le retour à une situation normale. C’est dire en d’autres termes que cette même communauté a parfaitement un droit de regard sur ce qui se passe à l’intérieur de chaque Etat dans le domaine des droits de l’être humain. C’est le lieu d’affirmer sans équivoque que le conseil de sécurité aussi a le devoir sacré d’agir vite et bien là où ces droits sont gravement menacés.

Publicité

Des responsabilités de l’individu

Il faut insister sans ambages sur le principe fondamental selon lequel l’individu aussi, a de sérieuses obligations dans le domaine des droits de l’être humain et des libertés publiques. En effet, ils sont légion, ceux qui croient, (d’ailleurs à tort), que tout leur est permis ; les dispositions de l’article 30 de la DUDH de 1948 ainsi que celles de l’article 5 commun aux deux pactes internationaux s’imposent à l’individu. En effet, l’article 30 de la déclaration universelle des droits de l’homme dispose : « Aucune disposition de la présente déclaration ne peut être interprètée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés ». Le paragraphe 1 de l’article 5 commun aux deux pactes internationaux est libellé de façon quasi identique. L’individu ne doit pas manquer de se persuader que ses droits et libertés sont également ceux et celles des autres, et que, en outre, l’abus conscient d’un droit est illégal. Il a même le devoir d’apporter sa contribution, si modeste soit-elle à la promotion des droits et libertés et d’en être le défenseur. A voir même les choses de façon analytique, ce ne serait pas une exagération que d’affirmer que la défense des droits de l’être humain est aussi un droit que l’on doit chercher à acquérir. Tout individu doit  s’efforcer de ne pas sombrer dans l’anarchie. La liberté individuelle qui n’est pas identifiable à l’anarchie se définit d’ailleurs comme « la liberté qu’a tout individu respectueux de la loi, de penser ce qu’il veut, de dire ce qu’il veut, d’aller où il veut dans les limites prévues par la loi, sans que quiconque l’en empêche  ». Chacun est tenu d’avoir constamment à l’esprit la légalité constitutionnelle, qui est aussi un élément de stabilité sociale. De plus, le paragraphe 3 de l’article 19 du pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose fort heureusement que « l’exercice des libertés comporte des devoirs spéciaux et des responsabilités spéciales ». Chacun doit jouir de ses droits et libertés de façon responsable, puisque l’abus d’un droit est illégal. User d’un droit quel qu’il soit de manière à constituer un obstacle à l’épanouissement de l’autre ou à braver éperdument l’autorité constitutionnellement établie, on sombre de toute évidence dans l’illégalité. La prévention d’une telle situation exige de l’Etat l’éducation de tous aux droits de l’homme et à la citoyenneté. D’où, la nécessité de concevoir et de mettre en oeuvre un programme de formation adéquate généralisée et de sensibilisation permanente, susceptible de sauvegarder au Bénin comme ailleurs un ordre authentiquement républicain et démocratique.

Conclusion

De tout ce qui  précède, il ressort que la mise en œuvre conséquente des instruments relatifs aux droits de l’être humain passe par la nécessité pour l’Etat et l’individu d’assumer en toute conscience leurs responsabilités respectives. Nous devons tendre de plus en plus vers une mystique es droits de l’être humain. Il est impérieux de le faire, d’autant plus que le monde actuel est affreusement défiguré, manifestement taraudé par des atrocités inimaginables. C’est  sans aucun doute à ce prix que seront possibles pour le bonheur de chacun et de tous, le fonctionnement normal de la démocratie, l’équilibre entre les institutions républicaines, la stabilité sociale et le développement. C’est aussi à ce prix que le 21ème siècle sera véritablement humain, puisque l’homme aura cessé d’être un loup pour l’homme.q
Par Jean-Baptiste GNONHOUE
Président de la coalition béninoise pour la Cour Pénale Internationale (CPI)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité



Publicité