Les actes qui contredisent les propos de Yayi
A la veille du vingtième anniversaire de la Conférence nationale, le chef de l’Etat, Boni Yayi a adressé un discours aux Béninois. A l’analyse, on note un véritable fossé entre les propos du président et les actes qui sont posés depuis son avènement au sommet de l’Etat. Un discours pour saluer les initiateurs et les participants à la Conférence nationale est une initiative louable à mettre à l’actif du chef de l’Etat. En posant un tel acte, il a montré qu’il n’a pas oublié que c’est cette conférence qui a permis qu’il soit actuellement à la tête du Bénin. Cependant, le chef de l’Etat a abordé certains points auxquels il s’est dit très attaché et pour lesquels il œuvre. Mais, un regard sur l’actualité de tous les jours démontre que les actes de Boni Yayi sont en porte-à-faux avec ses propos. Quelques morceaux choisis dans le discours
Sur le consensus national
« Je réaffirme à la classe politique de notre pays, ma foi en un dialogue politique franc et sincère et m’engage à servir la Nation dans la recherche permanente du consensus sur les grandes questions nationales, dans la concorde et dans un esprit de tolérance, de paix et d’amour », a déclaré le Chef de l’Etat.
A de tels propos, on est tenté d’y opposer certains faits. Il s’agit de la question de la Liste électorale permanente informatisée (Lépi). Nul ne peut dénier à cet instrument électoral son caractère national. Et pourtant, depuis plusieurs semaines le consensus se réclame par les partis de l’opposition autour de cette Lépi sans succès. Le processus continue plutôt allègrement avec les risques que cela comporte.
On se souvient également de la nomination des membres de la Cour constitutionnelle. En son temps, le consensus n’a pas été recherché. Beaucoup d’autres actes ont été posés par le gouvernement du Dr Boni Yayi et qui nécessitaient le consensus. Mais, comme le taureau dans une arène de rodéo, son Gouvernement a foncé, ignorant royalement l’appel au consensus de l’opposition.
De la vision de développement et du projet de société
Le Président de la république a également dit rêver « d’un Bénin démocratique avec des partis politiques forts, parce que issus de regroupements importants dotés de projets de société qui cadrent avec notre ambition commune de bâtir à l’horizon 2025 un pays phare, un pays bien gouverné, uni et de paix, à économie prospère et compétitive, de rayonnement culturel et de bien-être social ».
Apparemment, le Boni Yayi a changé de fusil d’épaule. Depuis son accession au pouvoir, il a promis de faire du Bénin un pays émergent à l’horizon 2015. Des voix s’étaient élevées pour dénoncer cette vision utopique et irréaliste. D’autres lui ont conseillé de recourir aux études nationales prospectives Bénin 2025. Néanmoins, le président a persisté dans son idée. A un an de la fin de son mandat, le voilà qui se projette encore en 2025. Du coup, il donne raison à celui qui disait que « l’émergence ne se décrète pas ».
Et quand le Président parle de partis politiques avec des projets de sociétés adaptés, l’on constate a contrario que c’est dans son camp que fleurissent tels des champignons, des regroupements pompeusement appelés partis politiques qui n’ont de pré carré que la région d’origine du leader, et de projet de société que du vent.
Quid de l’unité nationale ?
Les Béninois ont également pu entendre Boni Yai dire : « …Mon attachement à l’unité nationale, à la paix et à la cohésion sociale est sans faille ; ces valeurs constituent pour moi le socle majeur sur lequel doit se construire notre chère Nation qui se veut libre, démocratique et prospère … Nous devons donc bannir de nos pratiques le tribalisme et le régionalisme et privilégier tout ce qui nous unit et renforce l’unité et la paix dans notre chère patrie ».
Malheureusement, on constate que la marche vers l’Etat-Nation connaît plutôt un coup d’arrêt depuis peu. En ce sens que c’est sous le mandat de Boni Yayi que plus aucune commune ne veut rester sous l’autorité d’une autre sous des prétextes historiques, enfouis depuis des décennies dans les tréfonds de l’oubli. C’est sous son mandat également que le Syntracef a sorti les résultats d’une enquête qui révèle que les 2/3 des directeurs de sociétés d’Etat sont des ressortissants d’une région du pays.
C’est également sous l’avènement du régime dit du changement que des partis de l’Atlantique Nord, de Savalou Est, de Godomey et bien d’autres régions sont nées pour soutenir Boni Yayi. C’est sous l’ère Yayi qu’on attendu un ministre interdire à des gens qui soutenaient un potentiel candidat de ne plus venir dans sa ville manifester. Malgré le tollé que cela a suscité, le Président n’a ni limogé ce ministre comme le réclamaient certains Béninois, ni fustigé les propos de l’intéressé. On se souvient également que dans certaines zones du pays, des Béninois qui ont osé se mettre sur d’autres listes pour aller à des élections, ont été taxés de traîtres et d’apatrides. D’autres thuriféraires du régime ont même déclaré que les villes qui ne voteront pas pour la liste du chef de l’Etat ne connaîtront pas le développement. C’est aussi sous ce régime que des marches de soutien ont été organisées pour remercier le président d’avoir nommé leurs fils ministres. Et pourtant !
La mouvance, siège de la prolifération
« …L a prolifération des partis constitue une préoccupation essentielle qui nécessite une profonde réflexion. Le concept du multipartisme intégral doit être à mon humble avis repensé. Il s’agit en effet de mettre notre peuple à l’abri de la création des formations politiques qui portent en elles le germe de la division et de l’ethnocentrisme et du régionalisme. Nous devons avoir toujours présents à l’esprit la sauvegarde de l’unité nationale et l’héritage à léguer aux générations futures ».
A la lecture de ce paragraphe prononcé par le Chef de l’Etat, l’on se demande si les services de renseignement ne rendent pas compte tous les week-ends au chef de l’Etat. Car, c’est connu de tout le monde que c’est dans la chapelle politique du président que naissent toutes les fins de semaines des clubs électoralistes. Presque tous les ministres du gouvernement de Boni Yayi sont aujourd’hui des présidents de partis politiques. Ses conseillers ne sont pas du reste. A entendre ce discours, on se demande pourquoi n’interdit-il pas à sa mouvance de continuer par se démultiplier. Comment comprendre qu’il prône la fusion alors que dans son propre camp, c’est le foisonnement ?
Des acquis de la Conférence nationale
Cet héritage doit être pour tout Béninois vivant à l’intérieur comme à l’extérieur de notre pays, la source intarissable de l’énergie dont nous avons besoin pour bâtir l’avenir des générations montantes et renforcer les bases de notre jeune démocratie ». Pour bâtir une démocratie, les politologues estiment qu’il faut d’abord respecter les institutions de la Républiques à travers leurs décisions, ainsi que les lois dont le peuple s’est librement doté. Or, on constate sous le régime Yayi, que des décisions d’institution ont été bafouées, qu’il y a immixtion de l’Exécutif dans le judiciaire, que les forces publiques ont été utilisées pour empêcher l’exécution de décisions de justice. C’est également sous l’ère Yayi que l’accès aux médias publics est difficile aux partis de l’opposition.
Le moins qu’on puisse se demander face à ce tableau pas du tout reluisant, est si le Chef de l’Etat a un instant confronté son discours aux pratiques en cours et encouragées sous son régime. Tant les actes trompent la profession de foi.
Benoît Mètonou
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Extraits de l’Allocution du Docteur Boni YAYI, Président de la République, à l’occasion du 20è anniversaire de la Conférence Nationale des Forces Vives de la Nation
Béninoises, Béninois,
Mes chers compatriotes,
Nous n’avons pas le droit de galvauder cet important héritage qu’est la Conférence des Forces vives de la Nation dont nous célébrons le 20ième anniversaire. Cet héritage doit être pour tout Béninois, vivant à l’intérieur comme à l’extérieur de notre pays, la source intarissable de l’énergie dont nous avons besoin pour bâtir l’avenir des générations montantes et renforcer les bases de notre jeune démocratie. ..…Mes chers Compatriotes,
Je voudrais renouveler au peuple béninois mon vœu de «placer l’espoir du renouveau politique de notre chère Nation dans l’union qui doit être le centre de convergence de toutes les forces politiques ». Autrement dit, mon attachement à l’unité nationale, à la paix et à la cohésion sociale est sans faille ; ces valeurs constituent pour moi le socle majeur sur lequel doit se construire notre chère Nation qui se veut libre, démocratique et prospère.
Mes chers compatriotes,
Notre démocratie se caractérise par sa vitalité et par l’esprit de tolérance qui anime les acteurs politiques de notre chère Nation et de notre chère Patrie. Néanmoins, la prolifération des partis politiques constitue une préoccupation essentielle qui nécessite une profonde réflexion. Le concept du multipartisme intégral doit être à mon humble avis repensé. Il s’agit en effet de mettre notre peuple à l’abri de la création des formations politiques qui portent en elles le germe de la division et de l’ethnocentrisme et du régionalisme. Nous devons avoir toujours présents à l’esprit la sauvegarde de l’unité nationale et l’héritage à léguer aux générations futures.
En effet, il est important de rappeler à tous les acteurs de la vie politique, le principe de la primauté de l’intérêt national sur les intérêts des groupes organisés et ceux des individus. Nous devons donc bannir de nos pratiques le tribalisme et le régionalisme et privilégier tout ce qui nous unit et renforce l’unité et la paix dans notre chère commune Patrie.
Les promoteurs et les acteurs de notre Conférence nationale n’ont jamais voulu confondre démocratie et indiscipline, liberté et anarchie. En vérité, dans le temps et dans l’espace, aucune Nation n’a pu se développer sans le travail bien fait, sans discipline et respect des valeurs républicaines communes, celles contenues justement dans la Constitution du 11 décembre 1990.
C’est pour cela que je renouvelle ma conviction que la voie du développement harmonieux de notre Nation passe par la production en quantité et en qualité de biens et services, par la solidarité nationale et la prospérité partagée.
Je rêve d’un Bénin démocratique avec des partis politiques forts parce que issus de regroupements importants dotés de projets de société qui cadrent avec notre ambition commune de bâtir à l’horizon 2025 un pays phare, un pays bien gouverné, uni et de paix, à économie prospère et compétitive, de rayonnement culturel et de bien-être social.
Je renouvelle mon profond attachement au développement intégral et harmonieux du Bénin dans un esprit de partage, de l’aménagement du territoire et vous exhorte, mes chers compatriotes, à vous investir, aujourd’hui mieux qu’hier, dans les tâches de production qui conditionnent l’amélioration du bien-être de toutes les populations de notre cher pays.
Ayons foi au Seigneur, Dieu le créateur, dans cette œuvre de construction de la Nation béninoise dans la paix, la concorde et la fraternité.
Peuple Béninois,
Je réaffirme à la classe politique de notre pays, ma foi en un dialogue politique franc et sincère et m’engage à servir la Nation dans la recherche permanente du consensus sur les grandes questions nationales dans la concorde et dans un esprit de tolérance, de paix et d’amour.
Confiant en l’avenir de notre pays et fort des acquis précieux de la Conférence nationale de février 1990, je veux lancer solennellement à l’occasion de ce vingtième anniversaire, un appel à un vrai sursaut pour l’unité nationale, pour le travail acharné au service du développement et pour la fraternité ensemble vécue et ensemble partagée.Que Dieu bénisse les pionniers de la Conférence nationale !
Qu’Il comble d’attention notre chère patrie !
Et que vive la République !
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