A l’occasion du colloque sous-régional sur 20 ans de renouveau démocratique au Bénin

Deux études complètes sur la gouvernance au Bénin lancées hier

Derrière les apparences d’un fonctionnement normal, les institutions représentatives  et judiciaires demeurent fragiles et les mécanismes démocratiques accusent des faiblesses qui minent  les fondements d’une participation de qualité à la vie politique au Bénin. Telle est l’une des conclusions  de deux rapports lancés conjointement hier par l’organisation Droit de l’Homme, paix et Développement (DHPD), l’Association de lutte contre  le racisme, l’ethnocentrisme et le régionalisme (Alcrer) et le Centre Afrika Obota (CAO).

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ous le titre « Bénin : démocratie et participation à la politique – une évaluation  des 20 ans  du «Renouveau démocratique» », l’un des deux rapports attire  l’attention sur le fait que l’ère  du renouveau démocratique, qui est née avec la Conférence Nationale Souveraine  et la fin du régime  du parti unique  en 1990, est aujourd’hui menacée par, entre autres facteurs, le déséquilibre croissant entre l’ exécutif et le législatif, l’atomisation paralysante du paysage partisan et des faiblesses structurelles dans l’organisation  des élections.    
 
«  Les dernières 20 années de «Renouveau démocratique» ont permis  au Parlement de s’affirmer comme l’un des piliers essentiels sur lesquels repose l’Etat de Droit» a remarqué Gillet Badet, auteur du rapport. « Mais les profonds déséquilibres techniques et politiques qui se creusent chaque jour au profit de l’Exécutif sont un défi à la capacité du parlement de jouer  son rôle de contrôle sur l’exécutif ».

Le rapport a identifié l’organisation et la gestion des élections comme un des domaines dans lesquels des reformes prioritaires doivent intervenir. L’organisation des élections depuis 1993 par la Commission Electorale Nationale Autonome (Cena) a indéniablement constitué  un développement positif dans l’évolution de la démocratie béninoise. D’après  le rapport, cependant, cette avancée est aujourd’hui menacée par l’absence d’un fichier électoral permanent et crédible, et par la politisation de la CENA. De plus, son caractère non permanent fait perdre à la CENA le bénéfice d’une expertise technique et de la stabilité institutionnelle à chaque cycle électoral.

« La très faible fiabilité des listes électorales est devenue un danger pour la qualité de notre démocratie, » a déclaré Martin Assogba, président d’ALCRER. « Les dirigeants doivent mettre  les querelles politiciennes de côté pour résoudre immédiatement la question urgente de  la mise en place d’une Liste Electorale Permanente Informatisée (LEPI) », a-t-il ajouté.

D’après le second rapport, intitulé « Bénin : le secteur de la Justice et l’Etat de droit », la Justice béninoise répond de manière insuffisante à l’idéal du développement et de l’édification d’un Etat de droit, tel qu’énoncé à la Conférence Nationale Souveraine de 1990. La fragilité du système judiciaire  fait  reposer sur la seule Cour constitutionnelle tout le fardeau de la défense des libertés fondamentales et de l’ Etat de droit.
«  Renforcer l’indépendance de la Justice est une priorité absolue », a remarqué Me Joseph Djogbénou, auteur du rapport. « Les réformes doivent viser une refondation du Conseil supérieur de la magistrature, un renforcement des pouvoir des magistrats à gérer leur propre carrière et des mesures législatives et administratives pour faciliter un accès plus large à la justice ».

Tout comme le premier, ce rapport expose et analyse les réformes en cours visant à la  consolidation des acquis démocratiques et de l’Etat de droit. En même temps, il rend compte  des projets qui restent à réaliser et propose des pistes pour affronter les faiblesses ainsi identifiées.

Le rapport note à cet effet que le fossé croissant entre l’activisme de la Cour Constitutionnelle et la timidité des cours et tribunaux ordinaires constitue l’un des développements les plus inquiétants des 20 dernières années. Il appelle à une plus grande intégration de la Cour Constitutionnelle dans le système judiciaire.

Les deux rapports font partie d’une série d’études sur la gouvernance au Bénin, initiées par le projet AfriMAP (Projet pour l’observation et le plaidoyer sur la gouvernance en Afrique) de la fondation Open Society Institute. Ils ambitionnent de faire un bilan exhaustif des vingt ans  de gouvernance dans les secteurs respectifs de la démocratie et de la participation politique, de la Justice et de l’Etat de droit, ainsi que de la prestation des services publics de l’éducation (encore en cours d’élaboration). Ces études sont le fruit d’une collaboration étroite entre AfriMAP, la société civile  béninoise et la fondation OSIWA ou Initiative pour une société ouverte en Afrique de l’OUEST (Open Society Initiative for West Africa).

Source : Secrétariat du Colloque sous-régional sur 20 ans de renouveau démocratique au Bénin

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