Comme un fantôme, l’affaire Icc-services pourchasse le Chef de l’Etat partout où il passe. Alors qu’il a toujours évité de se prononcer officiellement là-dessus ici au Bénin, l‘affaire Icc-services s’est invitée à une conférence de presse donnée par le président Boni Yayi le mercredi 15 Septembre à Helsinki en compagnie de son homologue finlandais Tarja Halonen. Mais comme on pouvait s’y attendre, Yayi a fait dans une certaine mesure économie de vérité en s’arrogeant comme ses militants le font déjà, le beau rôle.
Relayée par Africa 24, la conférence de presse du président Boni Yayi en Finlande a eu le mérite de lui tirer des vers du nez. Sur l’élément diffusé, on y voit un président mal à l’aise, qui a eu du mal à se donner un argumentaire digne de son rang. Peiné ainsi d’entendre à l’extérieur qu’on veut le traduire devant la Haute cour de justice, il a balancé des arguments bien discutables et susceptibles de soulever d’autres questions de fond. Premier extrait : « il faut mettre ça sur le coup, les coups qu’on se donne quand les élections s’approchent ». Sur la base de l’affaire Icc-services et des informations de plus en plus nombreuses qui le confondent, il n’est pas trop juste qu’on ramène cette affaire seulement à un simple coup de politiciens en quête d’influence politique. En résumant sa traduction devant la Haute de justice (pour avoir protégé ces escrocs) à un coup politique, Yayi refuse de voir la vérité en face. Deuxième extrait : « J’ai été informé, j’ai mis tout le monde en prison ». On comprend que le principe de séparation des pouvoirs n’existe pas sous le changement, que le Chef de l’Etat peut se passer de la justice et envoyer qui il veut en justice. Pendant ce temps, ceux qui ont sa couverture politique sont maintenus dans l’impunité et ne peuvent jamais aller en prison. C’est d’ailleurs le cas du ministre Issifou Kogui N’douro, de bien d’autres ministres et proches du président de la République qui circulent allègrement et ne sont nullement inquiétés en dépit des révélations qui prouvent leurs complicités dans cette affaire. Aussi, le terme « tout le monde » apparaît ici de trop. Car, jusqu’à preuve de contraire, bien d’autres escrocs ou complices de ces escrocs sont en liberté. Troisième extrait : « le programme marche et a commencé par rembourser ». Là, on comprend que Yayi veut profiter de la distance pour se parer des plûmes du paon. En l’écoutant, on pouvait bien croire que le timide paiement qui a commencé depuis lundi est son travail personnel. Or, la vérité est tout autre. Sur près de 80 autres structures de placement en dehors de Icc, deux seulement sont entrain de payer pour les déposants dont les avoirs sont inférieurs à 75.000F pour l’un et la totalité des avoirs pour l’autre. De là, on comprend que le remboursement dont il se vante n’est qu’une goutte d’eau dans la mer et que ce paiement ne touche pas encore la millième partie de cette tragédie économique. Encore, faudra-t-il préciser que les structures qui ont commencé à payer, le font de leurs propres chefs et que d’autres ne demandent qu’à l’Etat de dégeler leurs comptes pour qu’ils puissent payer leurs clients. Mieux, ce ne sont pas les spoliés de Icc Services qui ont remboursés. Quatrième extrait : « C’est les voleurs qui crient au voleur parce qu’ils veulent coûte que coûte le pouvoir ». On se demande de quels voleurs parle Boni Yayi. S’il parle des députés de l’opposition, le Chef de l’Etat n’a pas totalement raison. Aucun des 48 députés signataires de cette demande n’ont jusque-là pas été cités dans les affaires de prévarication en vogue dans le pays actuellement. Aucun d’eux n’est cité pour comparaître devant la Haute Cour de justice. Au contraire, deux d’entre eux, en l’occurrence les honorables Bruno Amoussou et Lazare Sèhouéto ont demandé à maintes reprises au Chef de l’Etat de demander à l’Assemblée nationale de les ester devant la Haute cour de justice s’il leur reproche des choses dans des dossiers qu’ils ont gérés par le passé. Mais hélas le président Yayi malgré toute sa volonté d’en vouloir à ces opposants gênants, n’a pas pu le faire. Au regard de cela et de la multiplication des scandales sous son règne, il ne devrait plus parler ainsi. Enfin, la quête du pouvoir est un combat légitime de tout homme politique. Pourquoi devrait-elle devenir une faute qu’on dénonce ?
Marcel Zoumènou
Voici la vidéo du journal d’Africa 24. Le chef de l’Etat intervient vers la 5ème minute
Extrait de la déclaration du Président Boni Yayi en conférence de presse en Finlande
« En fait, il faut mettre ça sur le coup, disons des coups de poing qu’on se donne quand les élections s’approchent. J’ai été informé, j’ai mis tout le monde en prison. Et le gouvernement a mis en place un programme pour permettre le remboursement ; les escrocs qui sont en prison pour les obliger à rembourser. Et le programme marche et a commencé par rembourser. J’ai fait venir les experts du Fonds monétaire internationale de la Banque Mondiale, bientôt les experts de la Banque Centrale de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) qui est l’équivalent de la Banque centrale (Bce) vont arriver, vont proposer un plan cohérent pour que l’argent des béninois retournent aux Béninois. Mais mon cher ami, c’est les voleurs qui crient au voleur parce qu’ils veulent coûte que coûte le pouvoir. »