« Yayi et les Sages nous acheminent vers le chaos »: Amouda Razaki au sujet du processus électoral

Dans une interview accordée à notre confrère La Presse du Jour, le magistrat Amouda Razaki, ancien président de la Commission des lois de l’Assemblée nationale constate que le processus électoral en cours va conduire à un chaos. Pour éviter donc ce scénario « tortue sur le dos », il préconise la démission pure et simple du Chef de l’Etat. Lire son interview ! Les lois électorales sont enfin disponibles et le corps électoral est convoqué pour les élections de 2011. Quels sont vos sentiments   ?

Je suis déçu qu’une fois encore mais de façon plus grande et plus menaçante pour la démocratie et la paix sociale qu’on en soit encore à se demander à moins de deux mois du scrutin s’il aura lieu. La convocation du corps électoral n’est pas une preuve de ce que le scrutin aura lieu à bonne date.

Publicité

Vous semblez inquiet probablement à cause de la LEPI. Quelles sont vos inquiétudes ?

Le Président de la République avec la Cour Constitutionnelle qui est devenue une deuxième chambre de parlement façonnant et taillant les lois telles que le veut le Prince, nous ont entrainés dans une pente sérieusement glissante  avec leur enfermement sur la LEPI. Ils seront tenus responsables de toutes les déconvenues de leurs comportements car ils étaient conscients de ce que la LEPI ne pourrait être disponible à bonne date. Tout le monde savait en effet que  pour valider la LEPI même à pas forcé, il fallait beaucoup plus de temps. Ils ont tout tramé pour nous entrainer dans le chaos  et profiter du clair sombre.

BONI YAYI est conscient de ce qu’il ne peut, face à un bilan aussi piteux, sur tous les plans (gouvernance, économie, finance, liberté et droit de l’homme, etc.) se faire réélire à la tête de notre pays et recherche une situation à l’ivoirienne.

Publicité

Il y a donc un risque que la présidentielle n’ait pas lieu à la date fixée avec cet enfermement de la Cour sur la LEPI ?

Sans être un oiseau de mauvaise augure, je peux dire et il n’y a aucun risque de me tromper, que l’élection présidentielle ne peut se dérouler dans les conditions d’une LEPI rendue incontournable,  à la date du 27 Février 2011. Nous sommes à moins d’un mois du démarrage de la campagne et pas de LEPI. Les déclarations de candidature devraient être déjà déposées par les candidats puisque l’article 33 de la loi n° 2010-330 portant règles générales pour les élections en République du Bénin précise que « la déclaration de candidature est déposée, trente (30) jours avant la date fixée pour le démarrage de la campagne électorale à la CENA où à l’un de ses démembrements……. » Alors quelle loi applique- t- on ? Où se trouve la Cour Constitutionnelle, organe régulateur du fonctionnement des institutions  et de l’activité des pouvoirs publics (article 114 de la constitution) ?

Aucun délai légal ne peut plus être respecté  et par leur responsabilité partagée avec BONI YAYI nous nous acheminons vers le chaos.

Pour revenir à la LEPI,  en dehors du fait qu’elle se réalise de façon unilatérale, sans consensus, et même sans dialogue, toujours prôné et jamais mis en œuvre par BONI YAYI, elle n’est pas prête à ce Jour et elle ne le sera pas au jour du scrutin même si l’on ne devait tenir compte que des délais d’affichage (15 jours), de réclamations des citoyens (10 jours) de recours à la Cour Constitutionnelle (5 jours) et  décisions de la Cour Constitutionnelle (10 jours suivant sa saisine) : conf articles 5 et 30 de la loi n° 2009-10 portant organisation du RENA et établissement de la LEPI.

A cette allure, le chef de l’Etat peut –il encore rester au poste après le 06 Avril si les élections n’étaient pas organisées ?

La Constitution  n’a pas prévu une prorogation de mandat du Président de la République.

 

N’y a-t’il pas là un boulevard  tracé pour  que le Président de la Cour Constitutionnelle devienne Chef de l’Etat pour quelques semaines ?

Au terme de l’article 50 alinéa 3 de la Constitution, le Président de la Cour Constitutionnelle n’assure l’intérim de Président de la République qu’en cas de mise en accusation de celui–ci devant la Haute Cour de Justice .Nous ne sommes pas encore dans ce cas même s’il n’est pas à exclure du tout.

Quelles  solutions proposez-vous alors pour qu’on puisse organiser les élections en toute quiétude, à la satisfaction de tous et en respectant la Constitution

La  solution que je perçois et que je propose est la démission de BONI YAYI. La démission permettra  sans violer la Constitution de reporter les élections pour mieux les organiser et d’améliorer et terminer la LEPI désormais incontournable. Le pays pourra ainsi disposer d’environ deux (2) mois supplémentaires :

En effet, au terme de l’article 50 alinéa 20 et 30 la constitution « en cas de vacance de la Présidence de la République, par décès, démission, ou empêchement définitif, l’Assemblé Nationale se réunit pour statuer sur le cas à la majorité absolue de se membres. Le Président de l’Assemblée Nationale saisit la Cour Constitutionnelle qui constate et déclare la vacance de Présidence  de la République. Les fonctions de Président de la République, à l’exception de celles mentionnées aux articles 54 alinéas 3, 58, 60, 101 et 154 sont provisoirement exercés par le Président de l’Assemblée Nationale.

L’élection du nouveau Président de la République a lieu trente (30) jours au moins et quarante jours au plus après la déclaration du caractère définitif de la vacance ».

BONI YAYI, qui a toujours proclamé son amour pour son pays  et pour ses compatriotes pour lesquels il est d’ailleurs « prêt à verser son sang », (dixit) doit démontrer cet amour en démissionnant pour que les élections puissent être mieux organisées.

Nous lui demandons de faire la seule chose qu’il est possible de faire pour nous sortir du chaos vers lequel il nous conduit. Mais s’il décide de ne pas répondre à cet appel pour une issue pacifique, l’Assemblée nationale devra, dès que le délai  constitutionnel pour organiser les élections serait en  passe de ne pas être respecté, prendre les dispositions pour le poursuivre devant la Haute cour de justice. L’Assemblée n’a pas besoin pour ce faire d’attendre le 06 avril 2011 pour ne pas dresser le lit à un coup de force qui mettrait la démocratie entre parenthèse.

Ce n’est pas facile de demander à quelqu’un de démissionner mais qui devrait alors amener de Chef de L’Etat à prendre cette décision salutaire pour le Bénin ?

Toutes les forces vives de la Nations, toutes les forces politiques de la mouvance, et de l’opposition qui veulent éviter au Bénin le chaos doivent s’unir dans ce sens. BONI YAYI lui-même doit comprendre qu’il n’y a pas d’autres issues pour la paix et ne pas se le laisser compter.

Un appel à tous les Béninois ?

J’en appelle au bon sens et au patriotisme du Chef de l’Etat pour nous apporter la preuve de son amour pour le pays.

J’en appelle à toutes les forces vives des nations, pour qu’elles demandent, pour qu’elles exigent même du Chef de l’Etat sa démission pour l’intérêt supérieur de la Nation

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité