PITIE POUR NOS ENFANTS

Il  est des situations où on s’interroge sur le pourquoi et le comment des choses. Il est des moments où on se demande comment et pourquoi  tel acte a pu être commis, telle parole a pu être prononcée. En voyant ma chère maman Rosine V. SOGLO et ma sœur Célestine ADJANOHUN se donner ainsi  en spectacle devant le monde entier  – nos télévisions sont tous sur satellite – je me suis interrogée comment cela a pu arriver. Je me suis interrogée comme la plupart de mes compatriotes comment des dames de ce rang, des mères, épouses, grand-mères et grandes sœurs ont pu se laisser dominer par leurs pulsions et se mettre aussi négativement sur le devant de la scène. Qu’elles me pardonnent d’être aussi dure envers elles. Mais « plus  cher est l’offenseur, plus grande est l’offense », nous apprend Corneille dans le CID.

J’avais retenu ma plume afin qu’elle ne crache son venin, lors de la joute orale entre les Honorables AHOLOU KEKE et toujours notre chère maman Rosine V. SOGLO. Honorables, avez-vous dit ! Le dictionnaire Larousse nous donne une belle définition de ce mot. Honorable : « qui mérite d’être honoré, estimé… digne, estimable, respectable ». Qui dit mieux ? Et quand je lis comme tous les lecteurs de nos quotidiens des titres tel que : « Pugilat manqué entre Rosine Soglo et Célestine Adjanohoun », mes cheveux se hérissent sur la tête et je manque de piquer une crise cardiaque. J’exagère à peine ! Qu’arrive-t-il  à mes sœurs ? L’hémicycle est-il devenu un ring où les Honorables passent le temps à se boxer ?

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Pitié pour nos enfants ! Et puis vous, femmes, laissez ce job aux hommes ; ils ont un trop plein d’énergie et éprouvent le besoin d’en déverser partout où l’envie les prend. Mais que des femmes, mères de famille, épouses honorables, grands-mères et sœurs de tant de personnes qui  les respectent, les admirent et les adulent se comportent ainsi, c’est intolérable. Nul n’est parfait ici bas ; mais quand on décide de représenter 52 pour cent de la population d’un pays, quand on choisit contre vents et marées de se faire élire représentante d’une nation et de devenir donc le porte-parole de la population d’un pays, alors on n’est plus soi-même ; on est le peuple tout entier. Et nous, femmes avons la double mission d’être non seulement représentantes de la nation, mais aussi des modèles pour les générations présentes et futures. N’est pas modèle qui veut ! Nos apprenants ne citent pas le nom de cent Béninoises, lorsque nous leur proposons des sujets sur l’émancipation de la femme, en Afrique ou dans le monde. Et maman Rosine SOGLO est toujours le premier nom cité dans leurs écrits. Parce que pour la jeune génération, elle est la locomotive qui draine les wagons de millions de femmes de notre pays, ces femmes laissées sur le quai de la gare par le train aux commandes duquel se trouvent nos mâles.

Appréciant les résultats des élections législatives de mars 2007, j’avais écrit que cette maigre moisson – 8 femmes pour une assemblée de 83 personnes – était notre butin de guerre, maigre butin s’il en fût ! Mais qu’ il fallait une union sacrée entre toutes nos Honorables. Peu importe leur bord : mouvance ou opposition. Pour toutes les femmes béninoises, elles sont nos porte- flambeaux, la voix de toutes « celles qui s’affaissent au cachot du désespoir ».

Alors comment a-t-on pu en arriver à ce spectacle de veille de Noêl ? « De tension en tension, voilà que nos mères s’étrillent maintenant à l’hémicycle », m’ont dit en riant des étudiants. Les jeunes gens surtout, la moquerie au bec, riaient à se fendre l’abdomen. Toute honte bue, je leur ai expliqué que cette période de tension que nous vivons est exacerbée là-bas dans la maison des représentants du peuple. Piètre argutie, répondrez-vous ! Quand dans un pays les politiques laissent de côté les problèmes de développement et préfèrent se lancer frénétiquement dans la création de partis politiques et autres mouvements, pour  soutenir tel ou tel candidat, en vue d’élections qui se dérouleront dans deux, trois ou quatre ans, eh bien, voilà les résultats : l’exacerbation des passions, au lieu d’échanges et de débats citoyens, responsables,  dans une ambiance conviviale et sereine.

Pitié pour nos enfants qui ont besoin de cultiver des valeurs autres que le mensonge, l’arrivisme, l’injure et la cupidité. Pitié pour nos enfants qui, au sortir de l’université, ne trouvent pas de travail parce que nous parents, au lieu de contribuer à accroître la richesse avons vidé les caisses et continuons de mal  gérer  le bien public. Pitié pour nos enfants qui ne veulent plus voir nos mères s’entredéchirer pour faire plaisir aux hommes. Loin de vous juger, je veux ramener la balle à terre, ramener la paix dans les cœurs. En tant qu’aînée, notre maman doit faire preuve ern permanence de sagesse. Et toi, Célè, ma chère sœur et condisciple, même si tu as raison, tu n’as pas le droit de manquer de respect à notre chère maman. Elle est comme elle est, mais c’est notre maman chérie. Une mère est sacrée… surtout chez nous en Afrique. C’est un monument et à ce titre, aucune mère ne doit se donner en spectacle avec son enfant. Celles qui t’exhortaient au silence le savent ; elles savent que dans leur culture on ne répond pas à l’aîné même s’il a tort.  Pitié ! Pitié donc… Car les jours prochains pourraient être pires, si on n’arrête pas ces échanges désolants qui tendent à devenir la mode là-bas, chez vous Honorables.

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Avec toutes celles qui m’ont demandé d’écrire cet article, nous vous disons que nous femmes n’avons pas d’autre choix que de bien nous conduire partout où nous nous trouvons. Pour que le pays ne marche pas sur la tête. Pour que nos enfants continuent d’être bien éduqués. Pour mériter le respect de toute la Nation. Enfin, pour qu’on continue d’être le pouce qui permet de manger la pâte, comme le dit un dicton fon. Que la paix baigne tous les cœurs au seuil de cette nouvelle année. La paix, la paix seulement… Car, ça n’arrive pas qu’aux autres.

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