Au rendez-vous du panafricanisme

L’Afrique se donne pour siège Ouidah. C’est, en effet, l’Institut de Développement et d’Echanges Endogènes (IDEE) du professeur Honorat Aguessy  qui abrite du 26 au 30 avril 2011, le colloque international du Conseil mondial du Panafricanisme. D’éminentes personnalités, d’ici et d’ailleurs, y prendront part. Elles auront à se pencher sur le destin de l’Afrique. Comment le berceau de l’humanité peut-il se réduire à n’être plus, aujourd’hui, que l’appendice, la face grimaçante de l’humanité ? Voilà le défi du panafricanisme. L’un de ses théoriciens inspirés, Kwame Nkrumah, par le titre de l’un de ses ouvrages, « l’Afrique doit s’unir », nous rappelle, sur le mode de l’impératif catégorique, notre mission d’Africains. Et Frantz Fanon nous place devant notre responsabilité historique : accomplir cette mission ou la trahir.

Peut-il en être autrement, dans un contexte de regroupement des forces socioéconomiques ? Seuls, en effet, les grands ensembles ont capacité à jouer les premiers rôles dans la direction des affaires du monde. L’Union européenne, par exemple. Idem du Mercosur, de l’ASEAN…

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L’Afrique ne peut rester en marge de ce mouvement d’affirmation des identités des peuples et de mutualisation de leurs ressources matérielles et immatérielles. L’Afrique, comme les autres, doit honorer les grands rendez-vous qui déterminent le destin présent et à venir du monde ?  Résonne à nos oreilles l’avertissement du philosophe latin : « Vae sole », « Malheur à l’homme seul ».

En marge du Colloque international du Conseil  mondial du panafricanisme à Ouidah, et sans préjuger des résultats qui en sanctionneront les travaux, nous nous autorisons d’appeler à notre attention trois centres d’intérêt. L’audace créatrice des Africains doit trouver à s’y investir.

Il s’agit, d’abord, de nos systèmes éducatifs. C’est la matrice d’où émergera le nouvel Africain. Il s’agit, ensuite, des images produites par les Africains et les autres sur l’Afrique. C’est ce qu’on donne ou que nous donnons à voir de nous-mêmes et qui nous situe et nous signifie. Il s’agit, enfin, de nos institutions, ces piliers des systèmes sociopolitiques en vigueur dans chacun de nos pays.

C’est prioritairement dans l’esprit des Africains qu’une Afrique unie et forte doit prendre corps et forme. L’école, de ce point de vue, est l’espace idéal de cette prime germination qui ne peut que porter la promesse de nos abondantes  moissons futures. Nos programmes d’enseignement et d’éducation doivent être le support de cette nouvelle conscience panafricaine. Au-delà des vœux, des discours et des slogans, la fierté d’être Africain, le sentiment d’appartenance à l’Afrique, la volonté de défendre et d’illustrer, partout et toujours, les valeurs africaines, voilà le principal référentiel d’une Afrique sincèrement engagée dans la voie de son unité. Car l’unité, c’est la force, et la force, c’est le potentiel humain et matériel pour compter dans la compétition internationale. Les espèces faibles n’y ont pas de place.

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Mais si l’Afrique ne donnait pas d’elle-même l’image qu’elle voudrait qu’on retienne d’elle, ce sont les autres qui s’en chargeront. Et ils le feront sûrement à travers le prisme déformant de leurs préjugés, de leur mépris, de leur ignorance, si ce n’est de leur racisme. Quel destin individuel et collectif voulons-nous construire et comment entendons-nous le faire découvrir à nous-mêmes et aux autres ? Le panafricanisme récuse la caricature de l’Afrique et des Africains. Le panafricanisme plaide pour l’autosuffisance de l’Afrique en matière d’images. Celles par lesquelles l’Afrique  doit se dire et doit dire ses raisons de croire et d’espérer.

Quant aux institutions, il faut siffler, pour l’Afrique, la fin des mimétismes humiliants et asservissants. Les Africains doivent prendre possession de leur esprit pour ne plus avoir à aller vendanger leurs institutions à Paris, Londres ou  Washington. Les Africains doivent se donner des  institutions qui reflètent le mieux ce qu’ils sont, correspondent le mieux à ce qu’ils veulent être, cadrent le mieux avec ce qu’ils entendent faire pour eux-mêmes et pour les autres. Citons Aimé Césaire, « L’heure de nous-mêmes a sonné ».

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