Le Bénin au secours du Japon

L’initiative aurait pu passer inaperçue. Mais la force sous-jacente du symbole l’a rendue belle et grande. Le Bénin qui se débat dans les mailles du sous-développement va apporter son aide, aussi modeste soit-elle, au Japon, troisième puissance économique de la planète. Pourquoi et comment un pays pauvre peut-il voler au secours d’un pays nanti ?

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C’est le contraire qui était jusqu’ici vrai. Et il y a comme un devoir moral pour les plus riches de tendre une main secourable aux plus faibles, aux plus démunis, avant qu’ils ne soient accusés de non-assistance à personnes en danger. Et beaucoup de pays pauvres, face aux pays riches, ne se voient plus que dans la posture de mendiants quêtant l’aumône de ces derniers.

 

Et c’est en voulant formaliser cette assistance des riches vis-à-vis des pauvres que le chiffre de 0,70 % a été retenu. C’est le minimum exigible sur le budget annuel des nantis pour qu’ils se sentent quitte d’avoir soulagé les pauvres de leurs bobos et de leurs peines, au titre de l’aide au développement.

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Voici que le Bénin lance un téléthon pour le Japon. Il coure du 22 avril au 22 Juillet 2011. Ce téléthon doit permettre aux Béninois de manifester leur solidarité avec le peuple japonais. Un peuple meurtri, frappé dans ses œuvres vives, depuis le 11 mars 2011. Des séismes à répétition de grande amplitude et un tsunami dévastateur font planer sur le pays de graves menaces. Au dire des spécialistes, c’est la plus grande catastrophe que le pays ait enregistré depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Fukushima, à 250 Kilomètres au nord de Tokyo, a été l’épicentre de ce drame national. Les sols et les eaux de cette région sont contaminés suite à la fusion de plusieurs centrales nucléaires.

Les Béninois iront marquer, par leur modeste contribution,  leur solidarité au peuple japonais. Et  c’est à peine que ce qu’ils donneront vaudra une goutte d’eau dans l’océan des problèmes du Japon, dans l’immensité des attentes des Japonais. Mais restera le symbole : un petit pays aux moyens limités accède à la grandeur d’âme de tendre la main, dans le malheur, à un grand pays. Que faut-il en penser ? Quels enseignements en moissonner ?

La première leçon pourrait s’énoncer ainsi : c’est l’intention qui porte ce qui est donné qui en fait la valeur. En vérité, le Japon dans l’épreuve, ne compte pas a priori sur le Bénin. La contribution de notre pays, dans le cadre du téléthon projeté, ne peut être que de l’ordre de l’infiniment petit par rapport aux besoins du Japon. Mais en renversant l’ordre des choses, un geste plutôt anodin, contre toute attente, prend un sens infiniment grand. Le Bénin tendant la main au Japon ne le fait pas en contrepartie d’un quelconque avantage. Le Bénin tendant la main au Japon ne nourrit aucune arrière-pensée. Dans les relations entre les hommes, il est une forme de gratuité qui vaut vertu.

La deuxième leçon pourrait s’énoncer ainsi : la main qui reste fermée ne peut rien recevoir. Pour dire que c’est parce que le Japon a su si souvent ouvrir sa main au profit du Bénin qu’il se trouve légitimement en position de recevoir du Bénin. Même si ce que le Bénin donne au Japon est de l’ordre du symbolique. Même si cette manière de faire est à rebours de la pratique courante. Mais le Bénin, ce faisant, ne perd pas au change. Les Yoruba disent : « Un homme qui paie ses respects aux grands prépare le chemin de sa propre grandeur » (Fin de citation).

La troisième leçon pourrait s’énoncer ainsi : qui sait donner, loin de s’appauvrir, s’enrichit. Nelson Mandela, dans son ouvrage autobiographique, « Un long chemin vers la liberté » a écrit : « La bonté de l’homme est une flamme qu’on peut cacher mais qu’on ne peut jamais éteindre » (Fin de citation). Dans un monde impitoyable comme le nôtre où l’homme est souvent un loup pour l’homme, dans la course effrénée au gain, dans le choc féroce des intérêts, dans l’éloge imbécile de la raison du plus fort, il est bon que le beau geste du Bénin en direction du Japon fixe dans nos consciences cette vérité, à savoir que : « La maison n’est belle que lorsque chacun y reconnaît sa part de labeur »

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