Comment Yayi récupère les syndicalistes

Le pouvoir de Boni Yayi a l’art de repêcher certaines pièces maîtresses du monde syndical béninois. Les exemples se multiplient au fil des ans. Le cas le plus récent est celui du  secrétaire général du Syndicat national de l’enseignement supérieur (Snes) ; Alphonse da Silva, nommé depuis peu au poste du Directeur de l’office du Baccalauréat et du Bts.

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Alphonse da Silva a désormais le bec cloué.  Il  sert depuis peu, le pouvoir de Boni Yayi.  Secrétaire général du Syndicat national de l’enseignement supérieur (Sg)  jusqu’à une date récente,  l’homme gère  aujourd’hui les affaires publiques et est tenu de respecter toutes les instructions venant de la hiérarchie. Sa nomination à la tête de la très sensible Direction de l’office du baccalauréat et du Bts  est passée sans doute, inaperçue en ces moments où l’actualité électorale surclassait tous les autres évènements.  Mais elle demeure un fait à mettre  au compte  des stratégies de récupération  du régime du changement en ce qui concerne les potentiels « trouble-fêtes » de la République. Les derniers mouvements de protestation des enseignants du supérieur dont  il  était   le  truculent porte – parole, ont sans doute fait réfléchir le système  Yayiste.  Il fallait coûte que coûte caser l’un des maillons  du groupe pour avoir la paix. Les tractations menées n’auraient pas été aisées. Certains syndicalistes approchés  et sérieusement courtisés auraient décliné l’offre, pour ne pas enfreindre à leur  conviction personnelle, dit-on. Mais il y en avait un qui   pouvait faire l’affaire. Les dernières positions mi-figue, mi-raison  de  Alphonse da-Silva, dans la guéguerre entre le gouvernement et les enseignants du supérieur avaient d’ailleurs conforté la thèse de ceux qui pensent que le syndicaliste   était plutôt motivé par d’autres intérêts. Somme toute, l’avènement  de  sa nomination à un poste de direction  au ministère de l’enseignement supérieur ne saurait évacuer les soupçons exprimés. Entre la poursuite de la lutte syndicale et sa promotion à d’importants postes de responsabilité  dans l’administration béninoise, l’homme a fait un choix conséquent et conforme à ses ambitions personnelles.

 

Enseignant bastonné… devenu Dac

Le gouvernement de  Boni  Yayi n’est pas à son premier coup du genre. Quelques mois plus tôt, un autre frondeur syndical  était également tombé dans ses mailles. Le Dr Isaac Hans ; puisque c’est de lui qu’il s’agit  ici était le farouche porte-parole du Collectif des praticiens hospitaliers. Il avait toujours le ton assez dur et le verbe  bien haut pour  défendre la cause des médecins béninois qui s’estimaient, brimés dans l’exercice de leur profession. Les mouvements de grèves qu’ils ont organisés à l’époque ont fait tabac. Puis, un beau matin, l’homme fut appelé à une nouvelle  tâche au ministère de la santé. Il est nommé Directeur des hôpitaux, contraint de ce fait, à de l’obligation de réserve. Désormais collaborateur proche du ministre de la santé,  le virulent défenseur des droits de médecins est depuis lors, tenu de soigner son langage. Le pire dans  cette affaire est qu’il est souvent désigné, comme représentant de l’Etat pour affronter ses ex-camarades lors des rencontres de négociations  qui se succéderont par la suite. Le nouveau rôle du Dr Isaac Hans est souvent très difficile, mais il s’y essaye. Tant bien que mal.  Reste que son  repêchage  n’a pas manqué de baisser l’élan du reste du groupe des  praticiens hospitaliers.

Un autre cas  est  celui de cet enseignant nommé Hessou Comlan Coovi, devenu Directeur adjoint du cabinet au ministère de l’enseignement secondaire et de la formation technique et professionnelle, depuis quelques  années. On se rappelle encore comme si c’était hier de ce bouillant  syndicaliste, criant à tout vent quand il s’agissait  de défendre la corporation.  Le fait le plus marquant de son histoire est la bastonnade et l’arrestation dont il fut objet lors d’un mouvement de protestation des enseignants correcteurs du Baccalauréat au Ceg de Gbégamey à Cotonou. L’affaire avait fait grand bruit à l’époque. Les enseignants béninois dans leur grande majorité, étaient si indignés qu’ils avaient exigé des excuses publiques de la part des autorités d’alors avant de corriger le Bac de  cette année-là.  Coovi était vu comme un martyr vivant de la lutte syndicale au Bénin et était adulé  de toute sparts. Mais très tôt,  il sera redéployé au  ministère de l’enseignement secondaire à un nom moins important poste de Directeur adjoint de cabinet, dont il continue de jouir les avantages à ce jour. On l’a ainsi empêché de poursuivre la lutte. Lui-même y a sans doute pris goût, car cette  nouvelle fonction a naturellement amélioré ses conditions de vie.

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Plusieurs autres exemples existent depuis que le Président Boni Yayi a  pris les rennes du pouvoir en 2006. Si certains acteurs du monde syndical ou des mouvements associatifs font de la résistance, nombreux sont ceux qui n’hésitent pas à répondre à l’appel de grâce.  Certains  sont  peut-être de bonne foi. Mais le gros lot est guidé par des intérêts personnels et égoïstes, dussent-ils mettre en péril leur réputation antérieure.

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