Nicéphore Soglo et Mathieu Kérékou illégaux en 1991 et 1996 ?

Nicéphore Soglo a été « élu » en 1991 en remplacement de Mathieu Kérékou. J’ai souvenance que pendant son mandat, j’entendais déjà certaines indiscrétions dire qu’il n’avait pas gagné l’élection mais plutôt Mathieu Kérékou, et que pour vraiment tourner la page PRPB, en droite ligne de l’orientation donnée par la Conférence nationale, il fallait bien déposer Mathieu Kérékou. Ceci, afin de regagner la confiance de la communauté internationale, notamment des bailleurs. En 1996, les résultats sanctionnant la fin de son mandat n’ont pas été acceptés par Soglo. Il y eut même le fameux appel à marcher sur la Cour constitutionnelle. Soglo croyait dur comme fer avoir gagné. Il dénonçait alors un « complot ». A l’arrivée, il sera quand même déposé au profit de Mathieu Kérékou. Quelques années plus tard, j’eus l’occasion de me rapprocher de certains anciens membres de la Cour constitutionnelle en espérant décrocher un scoop mais silence radio à propos du sujet. Dans la foulée, je rencontrai un ancien ministre de Soglo qui m’assura que d’après les premiers chiffres, son champion était bien élu et que des membres de la Cour, qui leur étaient toujours fidèles, les avaient même appelés pour leur indiquer qu’ils pouvaient sabrer le champagne. Quelle ne fut leur désillusion lorsqu’après, tout fut remis en cause et, la « victoire » de Kérékou, proclamée ? Jusque-là, on était en droit de croire qu’il ne s’agissait que d’une position partisane. Mais on retiendra aussi qu’à la veille du fameux scrutin présidentiel de mars 2011, le ministre porte-parole du gouvernement, Candide Azannaï, encore en exercice, déclara en substance au cours d’une émission en direct sur Radio Tokpa, qu’en 1996, Soglo avait gagné les élections mais qu’on avait déclaré Kérékou vainqueur, comme ce fut l’inverse en 1991. Là encore même si Azannaï avait été député R.B. pendant longtemps, les plus incrédules pouvaient penser qu’il développait une stratégie pour amener les électeurs à faire blocus derrière son candidat Boni Yayi, pour lui éviter le même sort.  Sauf qu’ici, il avait un manteau plus officle encore de ministre porte-parole du gouvernement !

Mais, ne devrait-on pas désormais prendre tout cela avec sérieux lorsqu’on découvre à la page 162  du livre d’entretien du général François Kouyami avec mes confrères Wilfrid Adoun et François Awoudo que : « … Les décomptes effectués après le second tour de l’élection de 1996 donnaient Soglo gagnant. Les urnes le donnaient vainqueur. Mais les instructions et les pressions étaient telles, qu’il fallait s’arranger pour qu’il perde. La Cour constitutionnelle qui était l’ultime rempart, avait donc siégé à nouveau pour annuler d’importants suffrages exprimés en faveur du candidat Soglo. Et ce n’était qu’à la suite de ces acrobaties vertigineuses, que Soglo avait perdu la partie. La Cour avait siégé pendant moins d’une heure de délibération pour déclarer Soglo perdant… » ? Voilà qui vient donner un supplément de crédit à tout ce qui se disait à propos de ces élections présidentielles. Et, s’agissant d’un témoignage historique, quoique de quelqu’un qui avait été dans le pré-carré de Soglo à l’époque, on devrait, à mon avis, le prendre au sérieux. De fait, demandons-nous si en 1991 et 1996 au moins, nous avions eu des présidents légaux. Car, en considérant que ces déclarations soient vraies, Soglo en 1991 et Kérékou en 1996 étaient peut-être légitimes au regard de la conjoncture politique prévalant alors, mais étaient-ils légaux ? Sans aucun doute, on dira que les opérations qui leur ont permis de se hisser à la tête du pays, nous avaient évité les pires ennuis. D’ailleurs le général Kouyami concède que si Soglo avait été déclaré réélu en 1996, on ne jurait pas de la suite. En un mot, tout pouvait arriver. Mais, n’est-ce pas en vivant aussi les tribulations qu’une nation se bâtit, se consolide ?

Par ailleurs, si tout ceci est vrai, il ne faudrait pas faire l’économie de se demander si Nicéphore Soglo, au fond de lui, a vraiment oublié ce cauchemar et pardonné à Adrien Houngbédji et Bruno Amoussou qui, pour avoir alors soutenu Mathieu Kérékou, apparaissaient comme les auteurs de ce cauchemar. La réponse à cette question peut expliquer, en partie, le sort qu’a connu l’Union fait la Nation, lors de la présidentielle dernière.

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