Suite à la décision du président de recruter les agents retraités de la douane, dans les différents secteurs de cette corporation, votre journal La Nouvelle Tribune est allé sur le terrain faire le constat pour vous. Lisez ici ce qu’il en est suite à une interview accordé par un agent retraité de la douane. La Nouvelle Tribune: Vous êtes inspecteur des douanes à la retraite et vous avez été appelé en remplacement de vos jeunes frères en grève. Avez-vous effectivement pris service?
Tankaya Bernard: Vous constatez que nous avons pris service. Nous sommes là depuis le matin avant 8h parce que c’est volontairement que nous avons accepté l’appel du père et qu’on est venu pour sauver la patrie. Je constate que le pays est en danger et il ne s’agit pas de voir ces propres intérêts, il s’agit de voir l’intérêt de l’Etat, l’intérêt de la majorité parce que tout le monde joue pour ses propres intérêts. Si moi je suis venu, c’est parce que, je suis un patriote. Le président a lancé un appel pour sauver la patrie et si on ne fait rien les caisses de l’Etat seront vides. Les enseignants n’auront pas leurs salaires, les médecins aussi et le pays sera paralysé. On n’a pas le droit de primer nos intérêts personnel sur l’intérêt général de l’Etat
Vous avez défoncé des portes, est-ce-que c’est la bonne manière?
Oui c’est la bonne manière parce que normalement, on les a appelés pour qu’ils puissent amener les clés mais ils ne sont pas venus, on n’a pris les dispositions légales pour le faire et dans de bonnes conditions. La preuve en est que ces inspecteurs sont revenus de leur propre gré prendre service.
Vous êtes combien à reprendre service?
Je ne peux pas les compter. Mais je suis à la tête des inspecteurs. Nous sommes nombreux et on a redéployé certains pour le port, certains pour Hillacondji (frontière avec le Togo) et d’autres sont à Kraké (frontière avec le Nigeria).
Est-ce-à dire que vous n’envisagez pas une porte de sortie pour faire ramener vos jeunes frères ou vous êtes venus prendre définitivement leur place?
Vous me permettez de dire que je ne suis pas là pour remplacer les collègues ni les autres. Ce n’est pas notre but au contraire, les jeunes doivent savoir que c’est pour leur intérêt que nous sommes venus. S’ils ne reviennent pas et que la loi est votée, c’est eux qui vont perdre ils n’auront même pas de retraite. Les anciens qui sont devant eux ont déjà plus de 15 ans de retraite. Les jeunes ont intérêt à reprendre et je ne suis jamais d’accord pour les grèves sans service minimum. C’est aussi une violation des lois vous le savez bien. La loi ne permet pas de grever sans service minimum
Est-ce-que actuellement vous avez effectivement commencé le travail ?
Il y a des préalables. On ne peut pas venir remplacer les collègues s’il n’y a pas de préalable. Cela veut dire qu’il faut qu’on nous programme, qu’on nous donne des mots de passe et les informaticiens sont à pied d’œuvre pour le faire.
Si les grévistes se décident à reprendre le travail, est-ce-que vous serez prêt à leur céder la place?
On n’est pas venu les remplacer.
Maintenant, votre intervention va durer combien de jours?
Ce n’est pas nous qui déterminons notre intervention. La grève va durer combien de temps? Quand la grève finira, nous aussi, notre intervention prendra fin.
DG douane
«Les caissiers sont en train d’arriver. Je crois que jusqu’à 15h nous aurions repris le travail. Eux-mêmes, ils ont pris l’engagement de travailler jusqu’au dimanche, s’il le faut, pour pouvoir récupérer les recettes qui sont supposées perdues. J’avais affirmé à une réunion que les recettes ne seront pas perdues et c’est pour ça que j’ai dit au chef de l’état major de mettre des hommes en place pour que les chargements ne sortent pas des unités. Je suppose que si on travaille aujourd’hui, samedi et dimanche, les recettes seraient récupérées et tout rentrera dans l’ordre. Je ne peux pas finir sans remercier les retraités. C’est à cause d’eux aujourd’hui qu’il y a eu ce déclic. Ce déclic au niveau des inspecteurs grévistes à accepter venir reprendre eux-mêmes le travail. Mais ce qu’on peut suggérer pour éviter ces situations est une prise de conscience. Les chefs capitulent face aux agents. Aujourd’hui, on est manipulé par les agents, on n’est plus chef, le dg ne peut pas appeler un agent et il va répondre. Nous sommes des corps paramilitaires et je crois que l’obligation de respect à la hiérarchie doit se faire sentir à un moment donné. Je suis tellement dépassé parce que je suis devenu un chef sans homme. Je ne peux rien faire, ni aller ni devant ni derrière. C’est pour ça que je salue du fond du cœur l’arrivée des retraités qui ont accepté de me sauver de cette situation parce que aujourd’hui. Ce moment est un des plus difficiles pour moi. Et je crois que le Seigneur m’a rendu grâce. C’est une grâce pour moi de retrouver mes inspecteurs à côtés de moi qui sont tous mes amis mais à un moment donné, ils m’ont lâché. Ce que je souhaite à mes collègues, c’est que le calme revienne, que la douane retrouve ses lettres de noblesse. La douane est un corps d’élite en matière de récupération des recettes. Et si aujourd’hui on doit se laisser aller à tous vents, je crois que ça gène un peu. Qu’ils reviennent à de meilleurs sentiments. Le président de la République est prêt à dialoguer avec eux mais pas dans l’animosité ni dans la pagaille. Ça c’est un point de vue personnel, c’est un point de vue de chef, car je crois que je fais parti aujourd’hui des chefs dans la hiérarchie de la douane. Je vois que ce n’est plus une grève douanière c’est une récupération politique et je crois qu’en tant que disciple de saint Mathieu chargé de récupérer les deniers de l’Etat nous devons éviter ces genres de choses».
Réalisation: Marcel Zoumènou & Ben-Saïd Adjiboyrihan