A défaut de gagner, offrons-nous le plaisir de rêver. Le Onze béninois a définitivement noyé son rêve de participer à la prochaine phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN). Un rêve qui s’est effiloché en un cauchemar. Les Ecureuils du Bénin, pour leur dernier match, sur leur terre, ont plié l’échine devant les Rwandais. Dire qu’ils ont eu le gain du match-aller à Kigali, quelques semaines plus tôt.
Cela veut dire que l’état de santé de notre football ne cesse de se dégrader. Peut-il en être autrement? Les dirigeants de notre football s’entredéchirent. La fédération nationale est en panne. Le championnat est suspendu. Les joueurs sont au chômage, entraînant dans l’oisiveté entraîneurs, soigneurs, préparateurs, arbitres, journalistes sportifs, supporters…etc. C’est toute la chaîne du football national qui est paralysée. Et les Rwandais, bien que n’ayant pas grand-chose à montrer ou à démontrer, pouvaient venir à bout d’une équipe fantôme qui n’est plus que l’ombre d’elle-même.
Pourquoi perdre son temps à se morfondre autour d’un cadavre ? La sagesse voudrait que l’on se démarque de la cohorte des pleureurs et des porteurs de deuil. Il y a mieux à faire que d’accompagner le mort à sa dernière demeure. Laissons les morts aux morts. Ouvrons les pages de l’avenir par le détour du rêve.
Nous rêvons d’une nouvelle génération de dirigeants pour notre football. Des dirigeants sachant échapper aux pesanteurs qui plombent actuellement notre football et qui l’obligent à grenouiller dans le marigot insalubre des ragots, des cancans et des petitesses. Notre football est en panne de leadership. Nous avons besoin, dans l’esprit d’une saine et salutaire relève, de dirigeants charismatiques, armés d’une vision prospective, nantis de la capacité managériale nécessaire pour conduire, non de petits groupes d’intérêts, non des clubs au poids spécifique nul, mais de véritables entreprises de football.
Nous rêvons d’une nouvelle politique de football axée sur les résultats. Cela appelle un professionnalisme rigoureux à tous les paliers de notre football : formation des joueurs, école des arbitres, contrôle de compétence des entraîneurs, stricte réglementation de la vie des clubs, monitoring des divers championnats, assortis d’un code d’éthique et d’honneur qui doit engager toutes les parties prenantes.
Nous rêvons d’un nouvel environnement pour notre football. Un environnement favorisant la relève entre différentes générations de joueurs, jeunes et anciens cohabitant et se passant le témoin sans accrocs ni anicroches. Que la violence déserte nos stades animés par des supporters structurés, responsables, conscients de leur rôle dans la promotion et le développement d’un football de qualité. Comme ailleurs, avec nos supporters, l’actionnariat populaire mérite d’être expérimenté. La presse sportive doit retrouver ses lettres de noblesse. Elle doit s’attacher à informer plus et mieux et s’appuyer sur des professionnels avertis, montrant un sens aigu de la mesure et de l’équilibre.
Nous rêvons d’un football autosuffisant. Un football qui sait compter sur les moyens de sa notoriété pour se donner les moyens de ses ambitions. La puissance publique, c’est-à-dire l’Etat, doit prendre conscience de son rôle de premier sponsor de notre football. Quand se produisent les Ecureuils, c‘est l’hymne national qui retentit ; c’est le drapeau national qui flotte aux vents. Et les bons résultats de l’équipe nationale ont un effet plus dopant sur le moral et sur le mental de tout un peuple que le plus motivant des discours présidentiels.
Autres moyens au service du football : les moyens de l’entreprise. Un partenariat gagnant-gagnant entre le football et l’entreprise est à imaginer. La décentralisation, en tant qu’une grande et belle expérience de développement à la base, doit être intelligemment articulée au football. Les corps habillés n’ont pas encore révélé toutes leurs potentialités. Que fleurissent alors mille pépinières dans lesquelles le football national puiserait ses meilleurs éléments. C’est André Gide qui nous donne l’audace de croire en notre rêve : «Il est bien de choses, écrit-il, qui paraissent impossibles que tant qu’on ne les a pas tentées».
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