La réquisition de l’usine mci de nikki : l’investissement privé en danger au Bénin

A grand renfort publicitaire gouvernemental, ponctué d’une visite présidentielle tout aussi communicationnelle sur les installations à NIKKI, le peuple béninois a été informé au début de cette année de la reprise des activités de l’usine MCI. Votre journal qui était sous le coup de la sanction de la Haac n’a pu relayer l’évènement.. Tout a été présenté comme une merveilleuse action gouvernementale au profit non seulement des compatriotes de Nikki, mais aussi de tout le peuple béninois. Depuis , nous avons pris le temps de faire nos enquêtes pour savoir ce qui s’est réellement passé.

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L’on se rappelle le bras de fer entre la Sodeco et Mci, l’Aic (association interprofessionnelle du coton) interposée, découlant d’une sanction infligée à MCI, l’excluant du circuit de l’égrenage du coton pour 5 ans. Sanction que les dirigeants de Mci ont qualifiée d’inique et d’illégale. Du reste, une telle interdiction profite évidemment au redoutable concurrent de Mci, en l’occurrence la Sodeco, société d’économie mixte qui en fait est contrôlée par un particulier. Le différend saisi par le Chef de l’Etat n’a pu aboutir à un règlement consensuel entre les parties.

En effet, les populations de Nikki, outrées par l’inactivité provoquée, l’usine étant sur leur territoire, ont sollicité par le roi de Nikki, l’intervention du Président de la République, afin de mettre fin aux abus dont est victime ce joyau du développement local de la cité royale et des contrées environnantes et / ou périphériques.

Cette démarche royale salutaire a été très tôt entravée par la volonté vengeresse et ravageuse d’un certain entourage immédiat du Président de la République très averti dans les manœuvres et mensonges d’état. Ainsi, ont-ils convaincu le gouvernement de faire un passage en force pour mettre en œuvre leur proposition de résolution du différend consistant à ce que Mci égrène le coton pour le compte de la Sodeco.

Naturellement, une telle résolution ne pouvait pas obtenir l’assentiment de Mci. Aussi les populations de Nikki par diverses manifestations et mouvements d’humeur dont votre journal a fait échos, ont exprimé leur totale désapprobation à la mise à l’écart continuelle de Mci. C’est dans ce contexte que sur décision étatique, l’usine a été militarisée et les accès interdits. Pendant ce temps, la machine étatique broyeuse a connu un coup d’accélérateur par la signature du décret N°2012-002 du 06 janvier 2012, portant réquisition de l’usine de la société Mci de Nikki et de son personnel au titre de la campagne d’égrenage 2011-2012 suivie de son application immédiate.(voir ci-dessous)

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Télécharger le decret

Indifférence et passivité de la société civile

L’état de droit béninois par l’instrument du gouvernement de la refondation à travers cette double réquisition, vient d’enregistrer dans une grande indifférence du secteur privé national et une troublante passivité des organisations de la société civile en charge de la défense et de la protection des droits et libertés publiques, une nouvelle trouvaille de commission de forfait étatique en République du Bénin. Au demeurant, le silence assourdissant des dirigeants de Mci force la curiosité de tout observateur et rend compte par ailleurs du degré de ‘’tétanisation’’ des victimes de ce fait de prince d’une époque pourtant révolue dans notre pays.

La gravité de cette forfaiture ne peut laisser sans interpeller le peuple béninois épris de paix et de justice. Car à tout le moins, il se confirme une dérive totalitaire aux antipodes non seulement des libertés conquises avec le Renouveau démocratique dans notre pays, mais davantage avec l’option du libéralisme économique résultant de la démocratie libérale faite en 1990 aux lendemains de la Conférence Nationale des Forces vives.

Autrement dit, qu’est-ce qui peut justifier une telle réquisition dans un conflit entre particuliers de surcroît créé de toutes pièces par la partie proche du gouvernement ? Comment peut-on contraindre un particulier à travailler pour un autre sous le pompeux prétexte de l’exécution d’une mission d’utilité publique, si tant est que la Sodeco est la repreneuse définitive des outils de la Sonapra ? De quelle menace de trouble à l’ordre public non maîtrisable par l’autorité parle-t-on lorsqu’on sait qu’en prélude à la réquisition, l’usine propriété privée a été tout simplement militarisée ? Encore davantage, comment l’Etat peut arguer brutalement du péril sur les campagnes à venir et ses impacts socio-économiques lorsque dans le même temps, il est resté inactif quant à la sanction excluant pendant 5 ans Mci du marché cotonnier au Bénin ? Un tel argument est d’autant plus spécieux que le gouvernement n’a trouvé rien d’autre à faire que de prendre partie pour la Sodeco en imposant à Mci et pour le compte du gouvernement, l’exploitation de l’usine par la Sodeco. L’on est à se demander si l’Etat béninois est devenu égreneur, ou un acteur économique de la filière coton, alors pourquoi a-t-on créé la Sodeco  en parlant de libéralisation de la filière coton?

Où est l’Etat de droit ?

Tel qu’il peut être constaté, l’abus du droit est parfait et tout porte à croire que le Bénin a perdu de son statut d’Etat de démocratie libérale.

Il se déduit une violation flagrante des dispositions constitutionnelles béninoises reconnaissant la libre entreprise et la protection de toutes les libertés fondamentales universellement établies dans un état moderne.

Dans tous les cas, il est inadmissible que les conditions préalables à toute réquisition du genre comparable à une expropriation n’aient été respectées dans le cas Mci. En fixant de façon autoritaire et unilatérale une rémunération à la tonne égrenée sans aucune précision sur la nature d’un tel versement, le gouvernement béninois expose de façon indiscutable le caractère arbitraire et tout à fait illégal de l’opération.

Somme toute, l’entretien pernicieux d’une telle ambiance d’immixtion abusive de la puissance publique dans la vie économique, dénote mal la sécurité des affaires au Bénin et porte de graves préjudices à l’essor de l’économie nationale surtout en période de crise économique internationale. Très clairement dans une telle atmosphère d’état de non droit, aucun investisseur national encore moins étranger ne pourra s’intéresser à notre pays le Bénin. Nul n’ignore que la mondialisation de l’économie et la globalisation des moyens de l’information permettent une rapide et meilleure information sur les indications d’un investissement sécurisé à n’importe quel point de la planète.

Il convient donc que dans ses activités surtout suscitées par un certain entourage du Président de la République, le gouvernement de la refondation ne perde pas de vue que le Bénin reste ouvert au monde.

Pour le moins, les organisations de la société civile en particulier le peuple béninois en général, ne peuvent pas rester insensibles à ces dérives dictatoriales du gouvernement béninois.

Au demeurant, le Président de la République doit pouvoir prendre ses responsabilités de garant de la Constitution pour éviter la perpétuation d’une malencontreuse ingérence de l’Etat dans les affaires privées, détruisant ainsi le tissu économique national.

Enfin, il apparaît que la survie du décret de réquisition et la poursuite de son application projettent une image de non droit du Bénin dans l’univers du monde des entrepreneurs nationaux comme étrangers, et confirment une insécurité avérée pour le progrès des entreprises et du secteur privé. Une correction idoine reste indispensable.

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