Que du vent ! Du déjà vu et du déjà entendu. Depuis que la campagne électorale française est entrée dans sa vitesse de croisière, l’Afrique quand elle a droit aux « égards » des candidats si ce n’est sous formes d’accusations d’apporter le mal en Hexagone, doit se contenter de promesses irréalistes de ceux qui hier voulaient la « rupture » et de ceux qui aujourd’hui promettent le « changement ». Rêveront béatement ceux qui se refuseront à lier la place congrue qu’occupe l’Afrique dans les débats à l’esprit retors de certains de ces candidats qui savent bien mieux que quiconque que l’Afrique dans une campagne électorale française, ne compte pas.
Combien sont-ils les Français issus de l’immigration africaine à pouvoir voter lors des élections présidentielles françaises ? Quel peut être leur poids dans le choix du futur président de la France ? La question est loin d’être tranchée. Il est vrai qu’il suffit parfois de quelques milliers, voire quelques centaines de voix pour faire la différence lors d’une élection présidentielle qui s’annonce aussi âpre et serrée que celle qui se profile en France. Mais il n’en demeure pas moins que les discours de plusieurs candidats, parfois même les doubles discours, ne laissent pas de doutes sur les calculs et l’idée qu’ils se font de cet électorat.
Il y a d’un côté ceux qui ne comptent pas avec l’électorat issu de l’immigration africaine en France. Et qui n’entendent même pas avoir à compter avec. Le Front national et sa candidate Marine Lepen. Héritière d’une tradition xénophobe et foncièrement dirigée contre l’immigration, le parti de l’extrême-droite française ne fait pas mystère, pas plus lors de cette campagne électorale que des précédentes, de son excrétion de l’Afrique. Blacks et beurs sont de fait présentés comme sources de toute l’insécurité en France, que ce soit sur le plan socioéconomique, par l’occupation des emplois destinés aux Français, que sur le plan sécuritaire stricto sensu. Convaincu qu’une certaine frange de Français se retrouve dans ce discours cocardier, le Front national que l’on dirait plus préoccupé de populariser son idéologie que d’accéder aux responsabilités politiques, ne se prive pas de soulever les polémiques. En 2012, c’est la viande halal entre autres qui est au centre de ses préoccupations.
Pas très loin de l’extrême-droite lepéniste, la droite sarkozienne. Le Président sortant de la république, promis par les instituts de sondage à une défaite inéluctable face à son principal adversaire François Hollande, n’a pas tardé à ressortir les vieilles rengaines anti-immigration si chères à la famille Lepen. La posture hypocrite de Nicolas Sarkozy se lit dans le double discours qu’il se croit obligé de tenir pour rester « politiquement correct » et parvenir en même temps à rogner sur l’électorat de sa rivale de l’extrême-droite. L’Afrique et les Africains, dans les projets de la droite, c’est en même temps la promesse d’une amélioration des rapports entre les Etats et le renvoi en cas de victoire d’un plus grand nombre d’immigrés africains illégalement présents en France. C’est autant la « poursuite de la rupture » que le durcissement des conditions du regroupement familial pour les immigrés légaux. C’est le refus du droit de vote aux immigrés lors des élections locales (au risque d’imposer la consommation de la viande halal dans les cantines de France) de même que la promesse d’un meilleur traitement pour les immigrés « choisis ». Positions hybrides difficilement tenables, mais il faut croire que Nicolas Sarkozy n’en ressent pas pour sa part l’inconfortable.
Il y a enfin les mensonges de bonne foi. François Hollande, candidat de la Gauche promet un changement en profondeur dans les rapports entre la France et l’Afrique en cas de victoire. La Françafrique, ce n’est pourtant pas lui qui en signera l’acte de décès. Le réalisme politique commande d’une simple analyse que l’on se rende à la triste évidence. Là où Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy n’ont pas eu assez de volonté ou de courage pour trancher les rapports paternalistes, en finir avec les réseaux occultes, renoncer au « pré carré », il me semble difficile de faire confiance à François Hollande pour le faire. Non parce qu’il représente la « Gauche molle » comme l’en ont accusé certains de ses partenaires et adversaires politiques, mais parce que pour sa grandeur, la France a bien plus besoin de l’existence de ces rapports sordides avec ses ex-colonies d’Afrique qu’il n’y parait. Un président élu de la France saura-t-il prendre le risque de faire acheter le pétrole plus cher à son pays parce qu’il aura renoncé aux relations privilégiées avec le Congo et le Gabon ? Quel président français se permettrait de renoncer au phosphate du Togo ? Au coltan de la RDC ? À l’uranium du Niger ? À la bauxite de la Guinée ? Les promesses de Monsieur Hollande, ne l’engageront que jusqu’à ce qu’il soit élu. Au-delà, il n’y aura plus que cauchemars et désillusions.
L’Afrique est certes un enjeu de la politique étrangère future de chacun des candidats à la présidentielle française d’avril et mail 2012. Mais pour l’instant elle n’est que le pion d’un jeu. Un jeu de promesses à avenir nul.
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