Faire échec au spectre de l’année blanche

Ne parlons pas de malheur. L’invalidation de l’année scolaire, suite à la grève des enseignants du secondaire public, serait un échec pour toutes les parties prenantes à la crise actuelle de l’école. Quand des partenaires discutent à perdre haleine sans parvenir  à faire l’accord sur leur désaccord, c’est que l’échec sonne à la porte de chacun d’eux. Avec des effets collatéraux incommensurables. Vous avez dit année blanche ?

Publicité

L’année blanche traduit l’incapacité  d’un gouvernement à garantir à des milliers de jeunes gens et de jeunes filles l’un des tous premiers droits de la personne humaine : le droit à l’éducation. Un tel échec a valeur d’une faillite.
L’année blanche, c’est l’expression d’un travail inachevé qui fait mentir la vocation et la mission d’enseignement et d’éducation des maîtres. Le pays leur confie ses enfants. Mais ils ne lui retournent que des chiens perdus sans collier. Un tel échec a valeur d’une trahison.
L’année blanche sanctionne la grande et amère désillusion des élèves et de leurs parents. La confiance en l’institution scolaire est ébranlée. L’autorité de l’Etat, des maîtres, est mise à rude épreuve. Un partenariat se fracasse contre le mur de l’irresponsabilité des uns et des autres. L’échec, dans ces conditions, a tout l’air d’une duperie. C’est un piège à cons.

Comme on le voit, une année blanche ne grandirait personne, synonyme de fiasco sur toute la ligne. Ce serait de la honte en barre, la honte haut levée au-dessus de nos têtes, flottant comme le drapeau d’une ignominie collective. En somme, l’aveu d’impuissance de toute une communauté humaine, incapable de se servir du plus précieux des attributs divins, à savoir l’esprit, pour résoudre ses problèmes existentiels. Si les choses devaient être ainsi comprises, faire échec à l’année blanche, nous engage tous  dans la voie d’un égal devoir. De quoi s’agit-il ?

Erreur : la reprise effective des cours, pour éloigner de l’école le spectre d’une année blanche, ne doit ni consacrer la victoire d’un camp sur un autre, ni sonner la capitulation d’un groupe d’intérêt devant l’autre. Aussi paradoxal que cela pourrait paraître, la reprise effective des cours, dans nos lycées et collèges, serait à l’honneur de chacun et de tous. Cela signerait la victoire de chacun et de tous contre l’ennemi public N°1 : l’année blanche. Pour y parvenir, nous aurons à nous faire violence, en devoir d’honnêteté et de bonne foi.

Les enseignants ne doivent pas se limiter à une reprise partielle. Il ne servirait à rien de faire semblant de reprendre les cours sans les reprendre vraiment. Ce qui est appelé la grève sur le tas ne serait qu’une autre manière de poursuivre la grève qui nous conduit droit à l’année blanche. Au regard de quoi, c’est blanc  bonnet et bonnet blanc que les enseignants se contentent de marquer leur présence sur les sites des lycées et collèges, dans les salles de classe, mais sans travailler, sans enseigner, sans prendre part aux diverses activités pédagogiques.

Publicité

La reprise effective des enseignements, dans l’esprit de faire échec au spectre de l’année blanche, ne devrait pas mettre fin aux discussions entamés entre syndicats et gouvernement. Bien au contraire. Les discussions doivent reprendre dès aujourd’hui même, dans un contexte nouveau marqué au coin de la bonne volonté et de la bonne foi. C’est sur ce terrain neuf, libéré des aigreurs d’hier, qu’il convient d’établir les bases d’un « New Deal ».

Le gouvernement ne doit cesser de reconnaître qu’il s’est engagé envers les enseignants. Seuls les impératifs et les contraintes d’une conjoncture difficile diffèrent sa volonté de tenir immédiatement promesses. C’est le lieu de restituer tout son sens à la parole donnée. Elle participe du sacré. On ne devrait pas l’oublier.
Les enseignants doivent  aller à l’école de la patience. Ils doivent se résoudre à une diète provisoire qui durera le temps qu’il faudra. Mais la nation témoin retiendra la belle leçon de patriotisme qu’ils donnent. Un proverbe bambara  nous apprend que: « La patience est un arbre dont les racines sont amères mais dont les fruits son doux ».

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité