La constitution : un chantier national

Donnons raison à Alfred Sauvy (Citation) : « Bien informés, les hommes sont des citoyens ; mal informés, ils deviennent des sujets ». (Fin de citation).  Avec la révision de la Constitution qui se profile à l’horizon, il y a bien lieu de nous demander dans quel pays sommes-nous au Bénin.
Un pays de citoyens, peuplé  de personnes élevées à la dignité d’êtres humains, capables, par conséquent d’élever leur conscience à la hauteur de leurs responsabilités, de leurs droits et de leurs devoirs. Un pays de sujets, peuplé de personnes soumises à une autorité souveraine, de personnes qui ne disposent d’aucune marge d’initiative. Ni pour penser, ni pour réfléchir, ni pour agir.

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Supposons  qu’au Bénin nous ne formions pas encore un  peuple de  9 millions de citoyens. Rien ne nous empêche de caresser l’ambition d’y parvenir. Cela nous  coûterait d’amener  ceux de nos compatriotes restés encore des sujets à la pleine citoyenneté.
Alors, question : le vent de relecture et de révision qui souffle actuellement  sur notre Constitution  voit-il à l’œuvre des citoyens, c’est-à-dire des gens bien informés, ou des sujets, c’est-à-dire des gens mal informés ? Si c’est l’information qui fait le citoyen, affirmons, sans risque de nous tromper, que la démarche actuellement  privilégiée dans nos approches de   révision de la constitution est loin, bien loin d’être citoyenne.

Un projet de texte, élaboré par des spécialistes, tombe, pour examen, sur la table des représentants du peuple  à l’Assemblée nationale. Sauf le respect que nous  devons à nos honorables députés, ils ne devraient pas débattre immédiatement de ce projet de texte. En tout cas, pas avant qu’ils ne soient descendus sur le terrain. Pas avant qu’ils n’aient pris langue avec les populations dont ils sont les mandataires. Pas avant qu’ils ne se soient assurés que le débat, à la base, a lieu en bonne et due forme. C’est notre avis : l’information qui fait le citoyen doit descendre des hauteurs du Parlement pour irriguer l’esprit des populations de nos villes et de nos campagnes. Dans le cycle d’une saine information, ces populations  ont à franchir quatre étapes.

Première étape : faire savoir. Nos populations auront  bien besoin de savoir les motivations profondes  d’une révision de la constitution. N’est-il pas de bon sens que  l’on  cherche à connaître  les raisons d’un changement, étant entendu que l’on ne change vraiment que ce que l’on peut remplacer effectivement ? Autrement dit, par rapport à la Constitution du 11 décembre 1990, il convient de dire ce qui est proposé à changement et pourquoi ; ce qui est proposé de neuf, à quelles fins, pour quel résultat ?
Deuxième étape : faire comprendre. Nos populations, après  moult explications, auront besoin de formuler leur compréhension des choses, d’émettre leur avis informé et motivé. Parce qu’elles auront bien saisi les enjeux de l’heure. Parce qu’elles auront pris une part notable à ce processus de révision, ne se sentant plus seulement  concernées, mais impliquées.

Troisième étape : faire faire.  Les citoyens de notre pays ayant ainsi accédé au statut d’acteurs n’auront besoin ni de chausser les lunettes des autres ni de s’aligner sur les positions des autres. C’est en toute liberté et en toute  responsabilité qu’ils estimeront utile d’adhérer au projet de constitution ou de le combattre. Des citoyens, rendus à ce niveau de conscience, montrent et démontrent qu’ils ont pris possession de leur esprit, qu’ils sont maîtres de leur présent, qu’ils peuvent  s’affirmer bâtisseurs d’avenir.
Quatrième étape : faire ensemble. Les opinions émises par les uns et les autres comptent moins. L’essentiel, en définitive, c’est que chacun apporte sa pierre à l’édifice commun, participe du mieux qu’il peut à la construction de son pays. On ne construit pas autrement une nation. Avec nos différences sociales et ethniques. Par delà nos divergences politiques et philosophiques. Le colonisateur a laissé derrière lui l’esquisse d’un Etat. La nation est à construire. La révision de la constitution est un chantier national. Comprenons la nécessité d’y travailler ensemble. Et  le reste, tout le reste nous sera donné de surcroît.

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