La reculade de Yayi va coûter cher au Bénin

Dans la mise en œuvre du contrat qui lie la Société Bénin Control à l’Etat béninois, le gouvernement semble déterminé à jouer à un jeu dont les conséquences pourraient être fâcheuses financièrement à l’Etat. Les dernières informations sur le dossier sont évocatrices…Pendant que tous les regards de l’opinion publique sont braqués sur la grève des enseignants qui n’en finit pas de secouer le monde éducatif , des choses se trament dans l’ombre  entre le gouvernement et la société Bénin Control Sa ;  notamment sur le contrat qui lie le dernier à l’Etat béninois dans le cadre de la mise en œuvre de Programme de vérification des importations de nouvelle génération (Pvi-ng) au port autonome de Cotonou. Il s’agit de choses que des observateurs de la vie économique béninoise, bien avertis des contours des réformes portuaires et du rôle de la société Bénin control qualifient de « nouvelle reculade du président Boni Yayi et de son gouvernement».

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Les deux courriers qui dévoilent le jeu dangereux du gouvernement

Tout se résume dans deux courriers en date du 13 mars dernier adressés au président du Conseil d’administration de Bénin Control par le ministre délégué auprès du président de la république, chargé de l’économie maritime, des transports maritimes et des infrastructures portuaires avec ampliations « A Titre de compte rendu (Atcr)» au président de la république. Lettres dont nous avons réussi à avoir une copie. Dans le premier courrier référencé N° 0056c / MDCEMTMIP-PR/DC/SGM/SP-C et ayant pour objet « a/s gestion du partenariat » le ministre de l’économie maritime, Valentin Djenontin-Agossou informe le destinataire de la décision du gouvernement  qui est la suivante : « désigner trois(03) intendants militaires et trois douaniers qui se joindront au personnel de Bénin Control pour suivre les formalités de vérification avant embarquement des marchandises ainsi que la délivrance des attestations de vérification. Désigner deux (02) militaires pour travailler aux cotés du personnel de Bénin Control chargé du scanning et du tracking des camions chargés de marchandises».  Selon la correspondance,( voir fac simile ci- contre )ces personnes auront pour mission de relever le nombre de conteneurs scannés ; le nombre de camions balisés et de cosignés les statistiques établies pour rendre compte des prestations fournies. La note justifie la décision du gouvernement  par  le souci de ce dernier « d’asseoir un partenariat transparent et gagnant-gagnant dans le cadre de la cogestion du partenariat qui le lie à la Société Bénin Control ».

Une demande au motif surprenant

Le second courrier référencé N°0057c/MDCEMTMIP-PR/DC/SGM/SP-C et ayant pour objet «demande de renseignements » invite le Pca de Bénin Control à fournir au ministre de l’économie maritime « La liste exhaustive des redevances ainsi que le barème des tarifs appliqués par Bénin Control sur les différents sites d’intervention à savoir : Port maritime, terminal à conteneurs d’Allada et de Zongo». Il est aussi demandé « La liste de tous les équipements acquis dans le cadre du partenariat Etat béninois-Bénin Control avec leur date d’acquisition, valeur d’acquisition, provenance (origine) accompagnée de toutes les pièces justificatives». Le ministre Djenontin ajoute que les équipements à acquérir à l’avenir seront soumis à l’avis préalable de non objection du gouvernement.  Ces mesures sont prises par le gouvernement «dans le cadre de l’obligation de reddition de compte du gouvernement au peuple béninois et pour éviter d’être pris au dépourvu par la communauté internationale (France-Usa) qui promet de venir auditer les contrats de partenariat que l’Etat a signés avec les privés», peut-on lire dans le premier paragraphe de cette seconde lettres.

Mauvais prétexte

La lecture  croisée de ces deux courriers appelle  quelques commentaires sur le deux poids deux mesures du gouvernement, y compris ses risques, quant à la mise en œuvre de la réforme du Pvi-ng. Toute l’histoire reconstituée avec la récente actualité sur le dossier, semble confirmer la volonté du pouvoir annoncé par une certaine presse, confirmée par des sources proches du palais de la Marina il y a quelques semaines- de réviser le contrat de Bénin Control ; comme s’il voulait changer  les règles du jeu au cours du match.
Tenez Bien.
D’abord l’une des justifications fournies dans le second courrier est surprenante. On parle de l’arrivée  de la communauté internationale (France Usa) pour auditer les contrats que le Bénin signés avec des privés. Tout porte à croire que le Bénin n’est pas un pays souverain. La précision apportée au groupe de mots communauté internationale ‘France-Usa’ signifie que la communauté internationale se limite à ces deux pays. C’est tout de même pour la première fois qu’on apprend que d’autres Etats veulent auditer les contrats qu’un autre Etat souverain a signer avec des opérateur privés, de surcroît de la nationalité du pays concerné comme dans le cas de Bénin Control le promoteur est béninois. On a simplement l’impression que l’usage de cet argument est un prétexte, fallacieux du  chef du gouvernement pour revenir sur sa parole en ce qui concerne le Pvi-Ng.
Ensuite la nomination des intendants militaires et les autres mesures prises dans le premier courrier apparaissent comme une volonté de Yayi et les siens de remettre en cause le fonctionnement même de Bénin Control. Cette déduction est davantage justifiée au moment où d’autres sources  des sources annoncent une note circulaire du  Directeur général de la douane informant les gestionnaires de parcs que les opérations d’escorte des véhicules d’occasion  sont désormais du ressort exclusif de  la douane.

Pourtant, on avait tous reconnu la justesse de la réforme

Le programme de vérification des importations de nouvelle génération (Pvi-ng) fait partie des réformes annoncées, à cor et à cri au lendemain de mars 2011 après le fameux k.o. de sinistre mémoire. Elle comporte trois volets essentiels dont la vérification avant embarquement  des marchandises, l’inspection par scanner des biens débarqués en vrac (liquides, gazeux ou solide) au Port de Cotonou, ainsi que le suivi électronique du transit (tracking). La réforme devrait selon le gouvernement permettre un meilleur recouvrement des recettes portuaires et améliorer sensiblement la compétitivité du port autonome de Cotonou. La société Bénin Control a été sélectionnée par le gouvernement à la suite d’un appel d’offre international pour la mise en œuvre du programme. Au chaudes heures de la résistance  de certains acteurs portuaires au Pvi-ng, le gouvernement lui-même a déployé son armada de communication pour montrer le bien fondé de la réforme, puis soutenir que la Société Bénin en est « le bras armé du gouvernement »,selon le mot même de la ministre en charge des finances, et ce dans un partenariat public privé. Le Dg douane avait lui-même pris une note circulaire le 10 novembre 2011 pour prévenir les acteurs portuaires de son début effectif du Pvi. Et c’était en application des dispositions des articles 16, 21 et 40 de l’arrêté N° 161/Mef/Mpdepp-Cag/Mdcemtmip du 31 mars 2011 portant application du décret N° 2011-106 du 22 mars 2011 instituant le Programme de vérification des importations (Pvi) de nouvelle génération au Bénin. L’attitude actuelle du gouvernement est donc plus que surprenante. D’autant que  de sources proches des plus hauts responsables de Bénin control , le contrat qui lie la société à l’Etat n’a jamais été révisé ni même fait l’objet d’un quelconque avenant.

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Attention à un éventuel procès

On a l’impression que le gouvernement joue à un jeu dangereux dont il ignore lui-même la portée. Au tout début de la mise en ouvre de la réforme où certains acteurs de la vie nationale étaient sensibilisés sur le programme, on pu avoir l’information selon laquelle les équipements acquis par  de Bénin Control dans le cadre de l’exécution du contrat sont extrêmement coûteux. Ce qui signifie que la société a dû réaliser de gros investissements.  Et seulement quelques mois après le début du programme, le gouvernement semble faire marchine arrière. Le promoteur de la Société Bénin Control ne voudra sans doute pas se laisser faire d’autant plus qu’en tant qu’opérateur économique, il doit avoir les coudées franches pour rentabiliser son investissement et en tout respect du contrat qu’il a signé avec le gouvernement. Si l’exécutif insiste dans sa politique de deux poids, deux mesures, cela pourrait se terminer par  un procès. Et en cas de perte, c’est des milliards que l’Etat béninois serait emmené à verser à la société Bénin Control. Et cette pratique  est carrément  aux antipodes de la  politique de promotion des hommes d’affaires béninois souvent brandie par le régime… Et pour ne pas faire payer aux contribuables béninois les revers de ce jeu dangereux, le gouvernement gagnerait à cesser de vouloir redéfinir les règles du jeu au cours du jeu.

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