L’usage a consacré « Les trois glorieuses». Le Bénin est-il en passe de consacrer, à son tour, «Les trois douloureuses»? Allusion à trois foyers de crise qui affectent trois secteurs essentiels de la vie nationale. Le Port autonome de Cotonou. Ce poumon de l’économie nationale est malade du PVI, ce Programme de Vérification des importations destiné pourtant à lui donner des couleurs. L’Ecole. Elle est paralysée par une grève des enseignants du secondaire public. Enfin le football. La Fédération béninoise de Football n’en finit plus de s’engluer dans ses contradictions internes, avec le risque d’une mise en quarantaine du Bénin par la Fédération Internationale de Football Association (Fifa).
Ces trois foyers de crise, tel un cancer, font courir à notre pays un risque majeur. Il n’est donc que juste de parler des « Trois douloureuses ». C’est douloureux, en effet, pour un pays de se mettre à la diète forcée. Les ressources attendues de son port se rétrécissent. C’est douloureux pour un pays d’avoir à gérer un véritable gâchis humain. Le spectre d’une année blanche plane sur l’école. C’est douloureux pour un pays d’entrevoir la dégradation de son football : stades fermés, joueurs au chômage, dirigeants à la casse, supporters à la peine…
A quelque chose, dit-on, malheur est bon. Parce que le malheur sait être un bon professeur dont les enseignements édifient. Ainsi, si nous nous appesantissons sur nos «trois douloureuses», nous nous donnerions plus de chance d’en apprendre. Avec la possibilité de trouver, à la fin, la bonne formule pour une sortie de crise honorable, sans casse majeure ni dommage irréparable.
Nos «trois douloureuses», à l’analyse, présentent des caractéristiques communes. Elles révèlent, les unes et les autres, une manière bien béninoise de gérer les crises. Autant le dire, c’est mauvais. Mauvais dans la conception. Mauvais dans les intentions. Mauvais dans l’approche et la démarche.
Première caractéristique. Nous focalisons davantage sur les personnes ; Mais nous manquons d’examiner les faits et le problème posé en profondeur. Le PVI montre un arbre qui s’élance vers le ciel. Tout le monde voit alors Patrice Talon, le patron de Bénin control, l’entité gestionnaire agréée du PVI. Mais cet arbre cache la forêt de nos calculs politiciens, les grenouillages dans le marigot de toutes nos compromissions. La grève des enseignants a déjà désigné les moutons du sacrifice en la personne des responsables syndicaux. Mais au lieu d’offrir en holocauste les têtes d’affiche d’une grève, en la personne des responsables syndicaux, pourquoi n’affichons-nous pas la volonté de conjurer cette grève et de sauver l’année scolaire ? Le football ne provoque chez nous aucune forme de remue-méninges pour un salutaire remue-ménage. Nous nous limitons à conjuguer tout le temps et à tous les temps Sébastien Adjavon et Moucharam Anjorin. C’est à demander si nous n’avons pas mieux à faire.
Deuxième caractéristique. Nos «trois douloureuses» ont un dénominateur commun : la gouvernance. Le PVI n’a pas été engagé dans des conditions pouvant lui garantir un succès immédiat. Défaut de programmation, de communication, de concertation et de participation responsable à tous les niveaux. La grève des enseignants nous fait récolter ce que nous avons semé. Trop de promesses ont été mises en terre. Mais nos moyens sont en deçà de nos possibilités pour les faire germer. A l’heure de la récolte pourquoi nous étonner d’avoir plus de bruits que de fruits à partager? Le football exhale une forte odeur de fric. Sans qu’il soit possible de dire que c’est pour le bien ou le malheur de notre sport roi.
Troisième caractéristique. L’absence, au niveau de chacune de nos «trois douloureuses» d’une main arbitrale secourable, sous la forme d’un leadership conciliateur. Personne pour prodiguer au gouvernement de sages conseils sur le dossier PVI. Personne pour avaliser les garanties qu’exigent les enseignants en grève pour un retour de la confiance. Personne, au niveau de notre football, n’a cherché à tenir le rôle d’un tampon entre les protagonistes de la guerre des chefs, amortissant le choc des intérêts et des ambitions. Voilà, à grands traits, certains de nos maux. Vivement que nous les transformions en atouts, opérant ainsi le passage des «trois douloureuses» aux «trois glorieuses».
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