Des politiques béninois à l’école de la gouvernance politique en …Chine : En sourire ou s’en inquiéter ?

Il faudra vraiment qu’on m’explique. Que des hommes politiques originaires d’un Etat réputé être un modèle démocratique pour toute l’Afrique et même aux yeux du monde, aillent apprendre la gouvernance politique dans un pays dictatorial… Je suis perplexe et curieux de savoir de quoi cela peut bien retourner. Il pourrait s’agir d’une récompense « touristique » offerte à certains des artisans les plus zélés de la réélection du Président Thomas Boni Yayi en mars 2011.

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 Il y aurait donc lieu de subodorer une simple villégiature. Mais certaines circonstances, certains faits cachent peut-être des intentions bien moins avouables de cette « école » de la politique à laquelle n’ont été conviés que les cadres de la majorité présidentielle.

Il n’y a sans doute pas de quoi fouetter un chat. A priori. Où et à quoi les Béninois n’ont-ils pas déjà eu l’heur d’être formés ? France, Canada, Etats-Unis, Japon, Belgique, Allemagne… Jeunes, moins jeunes, femmes, filles, enfants… Nombreux sont-ils dans les services publics à exercer leurs fonctions, croit-on, sur la base des règles et méthodes qui leur ont été enseignées outre frontières. Mais pour quel résultat ? L’inhibition ambiante de l’administration publique n’a jamais rien laissé se faire et se faire faire. Il y a bien longtemps que les formations sur la bonne gouvernance politique et économique ont montré leurs limites sur la terre rétive du Bénin. Une pratique malsaine qui a paradoxalement de quoi rassurer quand on sait quel type, quel modèle de gouvernance a dû être enseigné à nos frais et émoulus « étudiants », récemment rentrés de Pékin.

Il faut bien le dire, c’est le modèle de gouvernance à la chinoise qui a de quoi inquiéter. Quand on parle de gouvernance politique en Chine, on parle avant tout d’un système de parti unique. En effet, le parti communiste chinois, depuis 1949, ne souffre aucune concurrence interne. En dépit de son ouverture économique à la fin de la décennie 1980, le pays a maintenu le parti comme l’unique autorisé, dans un système rigide et hostile à toute contestation. Les centaines de morts de la place Tian’anmen en 1989 pourraient en témoigner. La gouvernance politique chinoise est fondée sur un musèlement total de la presse et des libertés publiques et individuelles. C’est à ce prix que la Chine, la « toute-puissante » Chine est aujourd’hui en train de forger son essor économique sur le silence de la grande masse, exploitée et maintenue à souhait dans les fers de l’asservissement. Dans cette hypothèse, est-il seulement opportun que les politiques béninois choisissent la Chine comme modèle d’étude dans le cadre de la gouvernance politique si leurs intentions sont saines ? S’ils ont vraiment songé à mettre en œuvre les recommandations qui ont pu leur être faites ? La question se pose. Car en réalité, il faudrait harmoniser les circonstances entre les deux pays avant que toute leçon chinoise puisse être mise en pratique au Bénin. La perspective d’un retour en arrière de plusieurs décennies en somme. Un impossible retour en arrière, du moins j’espère.

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Depuis la fin de la guerre froide, la Chine ne cherche plus ouvertement à exporter son modèle politique au-delà de ses frontières. Les objectifs de la politique étrangère de l’Empire du Milieu dans ce domaine sont d’ailleurs clairs. L’accès aux ressources naturelles, la reconfiguration des rapports de force au plan international, l’isolement de Taïwan… La Chine ne cracherait sans doute par sur un gouvernement béninois malléable, allié inconditionnel. Les leçons de gouvernance politique qu’elle donne sont peut-être destinées à favoriser l’émergence d’une classe dirigeante susceptible d’adhérer à sa politique internationale. S’il doit donc y avoir motif à appréhension, c’est relativement à l’exploitation que pourrait faire la majorité présidentielle actuelle des leçons chinoises. Les circonstances ne sont en effet pas rassurantes. Le Président Boni Yayi ne convainc toujours pas quand il annonce son départ du pouvoir à la fin de son mandat. D’ailleurs, même s’il devait partir, les conseils venus de Chine suffiraient peut-être à pérenniser la majorité présidentielle au pouvoir comme l’est en Chine le parti communiste. Charmante perspective !

Mais que de supputations ! Pour un voyage en Chine qui n’est peut-être après tout qu’une villégiature à fins touristiques et aux résultats politiques chétifs. Il ne m’a pas semblé lire à travers les visages radieux des heureux voyageurs de retour, autre chose que la satisfaction d’un séjour agréable et doucereux. Mais on ne sait jamais. Mieux vaut supputer sur le possible que de se faire surprendre par l’impossible. 

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