Le «coupé-décalé» solitaire du PRD

La nouvelle n’a pas fait des vagues : le Parti du Renouveau démocratique (PRD) de Me Adrien Houngbédji se déclare officiellement de l’opposition. Le commun des Béninois est loin de connaître les textes qui encadrent la vie de nos partis. Le PRD, par conséquent, sur l’échiquier politique national, ne peut être nulle part ailleurs que dans l’opposition. A quoi sert-il donc, dans l’entendement du Béninois lambda, d’enfoncer une porte ouverte ?

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L’option que vient de faire le PRD, en se déclarant parti d’opposition, s’inscrit dans la logique des textes en vigueur.  Une première. Elle mérite que l’on s’y attarde. Il va falloir en dégager le sens et la signification politiques. Il va falloir en tirer les conséquences pour l’Union fait la Nation (UN), ensemble politique dont le PRD  est partie. Il va falloir, enfin, anticiper ce qu’une opposition,  conduite par le PRD, pourrait apporter comme valeur ajoutée, au débat politique national, à la consolidation de la démocratie dans notre pays. 
Le PRD qui s’identifie tout seul comme« parti d’opposition », choisit de faire bande à part. Tout laisse croire qu’à cette question, il ne veut mêler, ni de près ni de loin, l’Union fait la nation  (UN). Une telle posture solitaire du PRD briserait, a priori, une certaine dynamique unitaire symbolisée par l’Union fait la Nation. Comme si l’on voulait que fût retenu que ce que le PRD n’a pu faire avec les autres, le PRD se met désormais en situation,  en position de pouvoir le faire tout seul, sans les autres. La conclusion implicite serait la mort symbolique de l’Union fait la Nation,  promise à n’être plus qu’une référence lointaine, un machin mort par défaut d’avoir pu s’adapter à l’air du temps. A l’image des dinosaures de l’époque préhistorique, selon les lois de Darwin. 
Cela tirerait à conséquence. Cela dénoterait l’incapacité des Béninois à unir leurs intelligences pour faire durablement bloc autour d’une cause commune. Cela confirmerait le « Gbadé tché djin na bi », « c’est mon maïs à moi  qui doit cuire à l’exclusion de celui de tous les autres » comme une tendance  politique lourde. En ce qu’elle inspire les hommes politiques béninois à diverses époques de l’évolution du pays, détermine leurs comportements, oriente leur choix. Voilà qui donnera raison à tous ceux qui n’ont vu dans l’Union fait la nation qu’un gros montage électoraliste. Sans plus.
Et c’est ici que l’on est en droit d’attendre le PRD au tournant,  tant il vrai qu’on ne détruit vraiment que ce que l’on peut remplacer.  Que propose, en effet, le PRD en lieu et place d’une Union fait la Nation à bout de souffle ? Quels enseignements tire-t-il de l’expérience d’hier pour mieux prendre en compte les aspirations et les exigences des forces montantes ? Quel cadre politique rénové, pour quelle politique nouvelle, s’articulant comme une alternative à ce qui a été fait jusqu’ici ? Suffit-t-il de se déclarer parti d’opposition pour s’assurer de faire politiquement œuvre utile ? Est-ce que c’est en s’opposant au régime en place qu’on se ménage de meilleures chances de conquérir le pouvoir d’Etat ? Et dans cette perspective, un seul parti a-t-il toutes les cartes en mains pour y parvenir ?
L’opposition ne consiste pas, nous semble-t-il, à dire non, à marquer ses réserves ou à articuler sa désapprobation face au pouvoir en place. L’opposition est de construire, en termes programmatiques, une alternative crédible qui puisse convaincre les Béninois sur le « gouverner autrement ». Car tout est encore à penser. Tout reste encore à imaginer. Tout doit être inventé. Tout devrait être à l’audace d’une rupture.
Rupture au niveau des hommes, pour qu’ils deviennent les premiers acteurs du vrai changement. Avant l’argent qui ne pense pas. Avant les biens matériels dont la valeur marchande ne pourra jamais se hisser à la hauteur des valeurs de vie. Pour que la vie cesse d’être une arène ouverte aux acrobaties des uns, aux tours de passe-passe des autres. Quel vaste programme. Il faudra plus qu’un parti pour jeter les fondations de ce Bénin de nos rêves. D’ailleurs, est-ce l’affaire d’un seul parti d’assumer le destin de tout un pays ? Il n’y a point et il n’y aura point assez de place, dans aucun parti politique béninois,  pour tous les Béninois de bonne volonté. Et Dieu sait qu’ils sont nombreux.

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