L’ancien président Allemand reçu par le Maire de Cotonou

L’ancien président Allemand, Horst Köhler a été reçu mercredi dernier par le Maire de Cotonou, le Président Nicéphore D. SOGLO. Elu le 23 mai 2004 puis réélu le 23 mai 2009 comme président fédéral, le très populaire président Köhler qui avait su marquer le débat politique par son influence, a échangé, avec son hôte, sur des questions liées à la traite négrière, l’énergie, l’économie et la jeunesse.

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(Lire l’interview des présidents Köhler et SOGLO)

Propos de l’ancien Président Fédéral de l’Allemagne, son Excellence Monsieur HORST KÖHLER

Je connais Monsieur le Maire, il a été Premier Ministre, il a été Président, il a joué un rôle très important dans la transition du Bénin, d’un système moins bon vers l’ouverture à la démocratie, l’intégration dans le monde et dans l’économie mondiale. À mon sens, Monsieur le Maire a été un homme très sage et nous avons décidé de continuer nos échanges dans l’avenir.
On a d’abord discuté des perspectives de l’Afrique dans l’avenir surtout pour les jeunes africains. Car la population va doubler en 2050. Et je pense que c’est une obligation pour tous les hommes de se soucier des perspectives pour ces jeunes africains pour qu’ils aient un travail, un revenu et une vie décente.

Propos de l’ancien Président Béninois, son Excellence Nicéphore SOGLO à l’occasion de la visite à la Mairie de Cotonou de l’ancien Président Fédéral

de l’Allemagne, son Excellence Monsieur HORST KÖHLER Je crois que la visite de l’ancien Président Allemand est une importante visite et ce que nous avons eu comme discussion est fondamentale. Tout le monde sait que la population de l’Afrique va doubler autour de 2050, c’est-à-dire que nous serons un milliard cinq cent mille, sinon deux milliards, on dépassera la Chine, l’Inde et le problème que tout le monde pose est qu’il ne faut pas que la Chine, l’Europe, et les autres pays viennent simplement prendre les matières premières, car ça va exploser. Ça explose déjà, en Somalie, ça explose dans le Golfe, ici avec les pirates, ça explose dans le Sahel, ça explose dans beaucoup de pays, parce que aujourd’hui deux africains sur trois ont moins de 25 ans. Ils n’auront pas la patience que d’autres ont eu jusqu’à présent. Alors, faire semblant de jouer à la politique de l’autruche serait suicidaire. Je crois que le Président Allemand, qui a un parcours absolument exceptionnel, puisque c’est un grand intellectuel qui a été Directeur Général du Fonds Monétaire avant d’être Chef d’Etat chez lui, pense qu’il est indispensable sur le modèle de ce que Nelson Mandela a créé au Mozambique avec le forum des anciens Chefs d’Etats, que nous puissions réfléchir sur ces questions là. Et ce serait bien comme il me l’a dit, puisque évidemment le patron c’est Nelson Mandela, mais le Président en exercice c’est Joaquim CHISANO et je suis son vice Président. Alors je lui ai dit que nous, en Afrique nous avons trois priorités majeures.

1- Qu’est-ce qui nous lie ? C’est notre passé commun. Un continent qui a subi quatre siècles de déportation et de traite négrière. Tout le long de la côte, nous devons nous engager sur le modèle de ce qu’a fait le Président Senghor, comme le font les juifs. C’est le combat pour lequel je me suis fortement engagé depuis Ouidah 92, c’est de créer cette route de l’esclavage tout le long du Golfe de Guinée et de la mer rouge. Comme cela, on saura au moins qu’on a quelque chose en commun, une souffrance commune.

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2- Cette souffrance commune a permis à l’Europe et aux deux Amériques de se développer, de bâtir le château de Versailles, des plantations superbes etc. Maintenant, nous avons deux défis : quand l’Europe a voulu se relever au sortir de la deuxième guerre mondiale, il fallait deux jambes. La première jambe c’est l’énergie, comme le dit le Président Allemand, nous sommes bénis des dieux au niveau de l’énergie et c’est un paradoxe que nous ayons le délestage. C’est même choquant parce que le deuxième fleuve le plus puissant de la planète, c’est le Congo. Si tous les Etats sont actionnaires et qu’on met des barrages sur le fleuve Congo, nous aurons de l’énergie propre pour tout le continent et nous pouvons envoyer un tiers ailleurs. Donc, il y a ce problème. Si tu n’as pas l’énergie, tu ne peux rien faire, tu ne peux pas étudier, ni conserver les aliments etc. nous avons en plus tout le Golfe de Guinée qui est l’équivalent du Golfe Persique et du Golfe du Mexique, pourri d’hydrocarbure depuis le Nigéria qui est le grand, l’Angola mais tout le long, il y a du gaz, du pétrole pour tous. De quoi faire des oléoducs, des gazoducs et être une alternative de fourniture de gaz et d’hydrocarbure, ce que l’Union Soviétique fait à l’Europe, nous on peut le faire de l’autre côté. Sans compter que c’est un secret de polichinelle que l’électricité de France est de 80% d’origine nucléaire et la matière première vient du Niger, passe par le port de Cotonou et les deux pays sont dans l’obscurité ou dans le délestage. Alors, ça c’est quand même un paradoxe comme disait quand on était parti le voir, le Président allemand c’est quand même un paradoxe de voir un pauvre assit sur de l’or et qui tend la main pour mendier. Nous avons de surcroît “en veux-tu, en voilà“ de l’énergie solaire qu’on peut installer partout.

3- La population va doubler donc il faut nourrir ces nouvelles vies. C’est la révolution verte ça nous l’avons démarré ici avec le plus grand savant agricole de la planète qui est mort maintenant il y a trois ans, Norman Borlaug. Mais son œuvre continue. Il a créé lui-même, le Prix Nobel de l’agriculture. Dans notre pays, on ne met en valeur que 7% de la terre agricole. Il y a de la brousse jusqu’au bout. Or nous avons de quoi nourrir non seulement notre population, mais nourrir même les pays du sahel qui n’ont pas les mêmes facilités climatiques que nous. Quand j’étais là vous vous en souvenez, ce grand savant m’a dit que « pour payer les dettes, fais du coton ». On était le 3ème producteur du coton et il dit après ça comme on ne mange pas le coton, « je vais mettre à ta disposition des variétés de maïs 10 fois supérieur à ce que tes paysans ont ». Donc au lieu de 800 kg, vous avez quelque  chose qui fait 8 tonnes. Donc, le dernier des paysans qui fait 4 à 5 tonnes, il multiplie ses revenus par cinq. Une fois que l’argent entre dans ses poches, tu n’as pas besoin de discours. On avait la fête des paysans. Vous êtes peut-être très jeunes mais vous avez des parents qui s’en souviennent baptême de l’air, des décorations, ça marque jusqu’à présent. Donc, on doit nourrir la population, c’est le plus important. Il nous avait dit également, « vous pouvez faire du manioc » quand je disais ça, on plaisantait mais le manioc c’est la nourriture du bétail en Europe. Sinon, ils ont des vaches folles. On peut nourrir donc le bétail européen puisqu’ils n’ont pas ce qu’il faut tous les jours à des prix défiants toute concurrence. Et également, le bétail du sahel sans compter que notre voisin de l’Est mange la farine de manioc. Comment, si tu as quelqu’un qui est prêt à acheter ce que tu produis, où est ton problème ? Donc, la jeunesse, au lieu d’être là à attendre, ça va exploser. Ça va être Al Qaïda. Ça va être des pirates. Non seulement dans le Golfe ici, en Somalie, partout. Or, il faut offrir une perspective à cette jeunesse. Alors, le Président Allemand a dit que ce que nous avons créé, est une excellente idée. Cette idée il faut effectivement la vulgariser et ce que le Président Allemand a dit est que comme je vais voir bientôt le Président CHISANO qui est le Président en exercice du forum créé par Nelson Mandela, ils vont avoir la même idée en Europe parce qu’il y a des personnalités de grandes envergures. Il y a lui, il y a Tony Blair, Cordon Brown,  ils sont nombreux. On n’a que l’embarras du choix. Ils peuvent avoir exactement un forum de même nature et nous allons échanger pour éviter qu’il y ait des clashs entre les continents. Voilà la raison de son voyage en Afrique. Il part pour parler à la jeunesse puisque deux africains sur trois ont moins de vingt cinq ans. Alors vous voyez le défi que ça représente. Donc il était absolument indispensable qu’il vienne ici.

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