Turquie-Afrique : une vision d’avenir

Nous rentrons de la Turquie. Obligation de livrer, en priorité, nos impressions de voyage à notre public. Un beau voyage. Il nous a permis de découvrir un beau pays. Un pays qui sait tirer le meilleur profit de l’ancien et du nouveau. Un pays qui sait explorer les facettes de la tradition et de la modernité. Un pays à la croisée de l’Europe et de l’Asie. Il tente d’intégrer l’une en tant que bloc politique et économique. Il trouve dans l’autre l’essentiel de ses référentiels anthropologiques et culturels.

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Nous avons ainsi participé à Ankara, les 9 et 10 mai, au Forum des médias Turquie-Afrique. Les représentants des médias publics et privés de 54 pays africains et des intellectuels de Turquie ont intensément échangé et réfléchi. Il s’agit de dessiner les contours d’un partenariat entre les professionnels des médias africains et turcs. Il s’agit, par-dessus tout, de formuler un projet de coopération entre la Turquie et l’Afrique.

Dans un monde qui se globalise et qui voit s’effacer les distances et les frontières entre les peuples, toute tentation ou toute tentative d’isolement prend les allures tragiques  d’un suicide individuel ou collectif. Qui  refuse de s’ouvrir aux autres prend le risque de voir les autres le circonscrire.

Autant coopérer avec les autres plutôt que d’être une entité sans identité, sans pouvoir, objet manipulé et manipulable à souhait, soumis à la dure et implacable logique du cavalier et du cheval. Au regard de quoi, la coopération entre la Turquie et l’Afrique s’impose comme une nécessité. La Turquie a intérêt, dans cette coopération, à traduire en gains profitables la nouvelle puissance qu’elle incarne désormais dans le bloc Eurasie. L’Afrique, dans cette coopération, pansera des plaies longtemps ouvertes, compensera des pertes abyssales qui ont durement plombé son développement indépendant. Elle illustrera, par là même le proverbe wolof qui veut que l’homme soit le remède de l’homme.

Mais cette coopération Turquie-Afrique a besoin d’être exemplaire, libérée des scories qui pèsent sur les autres formes de coopération dont l’Afrique est partie. La coopération Turquie –Afrique ne doit pas être réduite  à l’extension des escales de la Turkish Airlines en Afrique. La coopération Turquie-Afrique ne peut être la somme arithmétique des visites officielles des responsables turcs en Afrique ou des responsables africains en Turquie. Avec la Turquie, l’Afrique doit ambitionner de coopérer différemment, autrement. Elle doit inaugurer un modèle alternatif de coopération. S’il ne devait pas en être ainsi, autant ne pas aller plus avant, autant laisser tout en l’état, autant ne rien entreprendre. Voilà, le défi, notre défi commun. Il sera donc nécessaire, pour ce faire et sans précipitation aucune, dans un premier mouvement,  que Turcs et Africains prennent langue, après qu’ils eurent pris possession de leur esprit, pour définir le cadre théorique de ce modèle de coopération.

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On pourrait se rendre compte, par exemple, que la Turquie et l’Afrique auront moins besoin d’équilibrer leur balance commerciale par les biens matériels qu’elles  s’échangeront, que de faire une place de choix à la culture et à la mémoire. Parce que la Turquie et l’Afrique ont des traditions culturelles anciennes à faire valoir. Parce que la Turquie d’aujourd’hui, ce n’était autre que la Constantinople ou la Byzance d’hier. Et l’Afrique est et demeure le berceau de l’humanité.

Au regard de quoi, c’est un privilège, aussi bien pour les Turcs que pour les Africains, d’être les héritiers de grandes et belles civilisations et cultures qui ont jalonné la longue histoire des hommes, après qu’elles eurent marqué la marche de l’homme à travers les âges. La culture et la mémoire, voilà un champ fécond de coopération. Et pourtant et pour sûr, les marchands de l’éphémère et de l’inessentiel, par manque de vision, n’y risqueront le moindre kopeck.

C’est parce que Turcs et Africains auront su chausser des lunettes non ordinaires et auront vu les choses autrement que le reste, tout le reste leur sera donné de surcroît. Qu’on ne  s’étonne pas alors que les vins qui vont conquérir les tables des Béninois, des Camerounais ou des Congolais viennent des provinces viticoles de la Turquie qui, elle, pourra se délecter de la succulence des mangues guinéennes ou des  ananas ivoiriens. Plus qu’un point marqué, le Forum des médias Turquie-Afrique ouvre une voie. Autant le dire, une voie d’avenir.

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