Les relations franco-africaines traversent une période de profonde mutation depuis 2022, particulièrement dans la bande sahélienne. Du Mali au Burkina Faso en passant par le Niger, les gouvernements militaires issus de coups d’État successifs ont contraint l’armée française au départ, mettant fin à une présence militaire historique dans la région. Cette rupture diplomatique et sécuritaire a progressivement gagné d’autres secteurs stratégiques, notamment celui des ressources minières, crucial pour l’industrie nucléaire française.
Une bataille juridique aux enjeux colossaux
Le groupe français Orano, spécialiste de l’uranium, vient de franchir une nouvelle étape dans son contentieux avec le Niger en lançant une procédure d’arbitrage international. Cette initiative survient après l’échec de plusieurs mois de tentatives de médiation concernant le gisement d’Imouraren, dont le permis d’exploitation a été retiré par les autorités nigériennes en juin 2024. Ce site représente l’un des plus importants gisements d’uranium au monde avec des réserves estimées à 200 000 tonnes, un trésor que le Niger entend désormais gérer selon ses propres termes.
Le bras de fer s’intensifie
La tension entre Orano et le Niger ne cesse de monter depuis l’arrivée au pouvoir des militaires en juillet 2023. Le groupe français, détenu à 90 % par l’État, a dû suspendre la production de sa filiale Somaïr fin octobre 2024, face à une situation devenue intenable. Cette filiale, dont Orano détient 63,4 % des parts contre 36,6 % pour l’État nigérien, a vu les autorités locales prendre son contrôle opérationnel, marquant une escalade significative dans ce conflit industriel.
Les répercussions d’une rupture stratégique
L’affrontement autour de l’uranium nigérien illustre la reconfiguration des rapports de force en Afrique de l’Ouest. Le Niger, qui assure 4,7 % de la production mondiale d’uranium naturel, cherche à redéfinir la gestion de ses ressources stratégiques. Cette volonté de souveraineté affirmée par le régime militaire bouleverse l’équilibre établi avec la France depuis des décennies. Pour Paris, l’enjeu dépasse la simple question minière : il touche à la sécurité de son approvisionnement en uranium, essentiel à son industrie nucléaire, dans un marché mondial dominé par le Kazakhstan qui représente 45,2 % de la production.
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