Dans sa chronique du mardi 21 août N°2398 du journal La Nouvelle Tribune, le professeur Denis AMOUSSOU-Yéyé à travers son texte intitulé : «Qu’on ne se consume pas !» s’est étendu sur la figure du chef, son rôle et le respect dû à sa personne.
Il illustre son argumentaire en ces termes : «du fait de sa grandeur, un chef est un grand homme ; un président de la République également». Je veux mettre en exergue ces morceaux choisis : «du fait de la représentation que la société lui offre comme image, nos présidents de la République à l’époque contemporaine sont assimilables à des dieux tout-puissants (Zeus ou Jupiter chez les gréco-romains), (Tchango chez les Yorubas et Hebiosso chez les Fons)… détenant la puissance paternelle, le père est donc un bouclier indispensable à la survie de la mère et de l’enfant » a ajouté le grand sociologue.
Comme tel, je déduis que notre président de la République est le réceptacle de toutes les doléances des citoyens béninois, et qu’il a le devoir de nous assurer le bien-être sur cette terre. Cette mission lui a été assignée par Dieu et nous les hommes et du Bénin, du moment où il a accepté de présider aux destinées de notre Nation. Une charge lourde et redoutable, convenons- en. Ne s’y aventure pas qui veut, mais qui peut. C’est dire qu’en aucune façon, notre «Père» ne doit manifester une quelconque humeur, après tout, il n’est qu’un humain- un quelconque choix entre ses épouses et ses nombreux enfants, citoyens de la République du Bénin. S’il se fâche et rugit comme un lion blessé, cela effraie et traumatise les sujets ou les citoyens. Je paraphrase encore le professeur- sociologue.
On sait qu’à la cour du Roi, il y avait les Nans et autres prêtresses pour refroidir le cœur du monarque en courroux et lui susurrer : « yé man fioho » (qu’on ne se consume pas). Les favorites également jouaient un grand rôle dans l’intimité de ces hauts dignitaires, car la fonction de chef induit énormément de tensions.
Ou sont-elles passées toutes ces femmes qui, par leurs paroles et gestes apaisants devaient détendre l’atmosphère au chef et éviter que le mercure ne monte. Apparemment, toutes sont fâchées. Et comme le dit la chanson : «Quand la femme se fâche, le secret est dehors…».
On a vu en effet, les femmes fâchées contre leur époux. Celui – la même qui clame au monde entier son amour pour elles : « je vous aime, je vous aime et vous êtes belles». Toutes les femmes sont fâchées. Opposition, Mouvance, Société civile (dont je me revendique haut et fort).Toutes, couches sociales, confondues ont donné de la voix le lundi 16 juillet, au Chant d’Oiseau de Cotonou, pour dire à l’époux que ça ne va pas, et qu’elles n’en peuvent plus. Elles n’en peuvent plus de soupirer du matin au soir, la main à la tempe, sans rencontrer une main devant leurs étalages au marché: « on ne vend plus rien », crient-elles à tue-tête.
L’argent prêté auprès des institutions de micro finance a disparu depuis belle lurette, dans la popote familiale. Certaines ont dû déménager de leurs contrées pour échapper aux poursuites. Les plus braves, rêvant d’un avenir meilleur pour leur progéniture, ont investi des sommes faramineuses dans la formation de celle-ci. Au finish, elles constatent avec beaucoup d’amertume que le travail tant espéré pour leurs enfants n’est pas pour bientôt. Les propos tenus par leur grand époux, le soir du 1er août est un aveu d’échec, face à ces milliers de jeunes qui sortent chaque année (100 à 150 mille selon les statistiques) de nos multiples universités.
Des cas pathétiques
Je vois encore M.V., une amie institutrice, me raconter il y a quelques jours à peine, comment à force de sacrifices, elle a élevé toute seule ses deux enfants et que, depuis trois et quatre ans que la fille a eu sa Licence, le garçon un Master en management, ils ne trouvent même pas de stages à effectuer. Je revois ses larmes et j’entends à nouveau les mots de réconfort que je lui ai offerts, n’ayant aucune solution à ce problème auquel chaque famille béninoise est confrontée.
Etant personnellement concernée par le phénomène -mon fils cadet attend depuis trois ans le boulot pour lequel il est allé se former à Dakar- je lui ai conseillé de ne pas baisser les bras et d’avoir foi en l’avenir.
«Non seulement je n’ai plus de quoi vivre décemment, mais je pars à la retraite dans un an et je suis toujours en location », ajouta-t-elle en éclatant en sanglots bruyants.
Je me rappelle cette bonne dame, vendeuse de beignets «talé talé» qui, à la force de ses poignets, avait réussi l’exploit d’envoyer tous ses enfants étudier jusqu’à l’université. C’’était il y a une vingtaine d’années ; je venais d’entamer mon parcours professionnel au CEG Notre Dame. Même le dimanche, elle faisait du «talé talé» pour aller vendre à l’église du quartier, «sinon, comment vais-je donner la somme journalière dont mes pauvres enfants ont besoin, puisqu’ils ne rentrent pas à midi»? me confiait-elle à cette époque.
J’espère que tous les enfants de Maman «talé talé» ont eu un bon travail, afin de veiller sur les vieux jours de leur brave mère.
Les raisons de la colère
Monsieur le président, Docteur Boni YAYI, voici exposé de façon simple, et avec des mots qui viennent du plus profond de mon cœur, les raisons qui ont poussé les femmes de ce pays , «vos femmes» que vous aimez tant, à se fâcher contre vous, et à «mettre les secrets dehors», le temps d’une conférence de presse. Nous autres, femmes béninoises, sommes avant tout des mères. Et quand nos enfants souffrent, nous faisons tomber toutes les barrières : politiques, ethniques, confessionnelles ou autres, pour faire entendre nos voix. Les femmes souffrent trop, et vous avez le devoir sacré de nous recevoir pour nous écouter.
Maintenant que faire pour que la lune de fiel se transforme à nouveau en lune de miel entre vous et nous? Que les petites rancœurs s’estompent et qu’à nouveau, les femmes béninoises reviennent à de meilleurs sentiments pour aider leur mari Président à bien s’occuper de la Nation? Nous sommes le sel dans la sauce. Sans nous, rien n’est possible et durable sur cette terre. Si le président a compris qu’il ne peut se fâcher durablement contre ceux qui l’aident à gérer le ventre des Béninois, à savoir les opérateurs économiques, qu’il sache aussi que nous, les femmes de ce pays, femmes aux milles bras, sommes les propriétaires du ventre des Béninois. Alors qu’il laisse tomber toute colère, toute animosité contre telle ou telle, toute idée partisane et qu’il reçoive les délégations de femmes, afin qu’ils fument à nouveau le calumet de la paix. Que l’amour reverdisse à nouveau dans le jardin BENIN. Pour le bonheur de nos populations déjà harassées par les problèmes de survie quotidienne. Ce sont les femmes qui ressentent le plus la misère, quand ça ne va pas dans un pays. Il est urgent de leur sécher les larmes, Monsieur le Président, en tant que père de nos enfants, et le premier mari de toutes les femmes de ce pays. Nous voulons la paix, rien que la paix, et le bien-être pour nos enfants.
En plus des Nans, prêtresses et autres courtisanes, il y a à la Cour le fou du roi qui dit haut et fort, ce que les autres pensent tout bas. Mon confrère Couao-Zotti Florent, dans son billet du mercredi 22 août, dans La Nouvelle Tribune, intitulé «Du quartier latin au quartier crétin» a déjà exposé ses idées de grand Fou du roi. Je n’enfoncerai pas le couteau dans la plaie. Tous les artistes sont des Fous du Roi. Et le Roi écoute toujours son fou, pour le bonheur de ses concitoyens. Mon parti, c’est le Bénin tout entier, du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest ; ma patrie également. Et on n’est jamais mieux que chez soi.
Les solutions à tous nos maux existent. Il suffit de mieux écouter ceux qui, de par leurs expériences peuvent apporter un plus à notre gestion du patrimoine commun, et ne plus s’en remettre exclusivement aux courtisans. Monsieur le Président, comme vous avez compris enfin -mieux vaut tard que jamais – qu’il vaut mieux envoyer nos enfants dans les champs qu’ailleurs, ne vous détournez plus de l’objectif de l’autosuffisance alimentaire. Investissez dans les machines agricoles, car comme l’a si bien démontré Mme Marcos la productrice d’ananas, une meilleure organisation des filières agricoles amènerait le Bénin vers l’autosuffisance alimentaire et la prospérité. La terre ne ment pas. Le Fou du roi a parlé.