Suite à notre premier “Eclairage” sur « les dessous de la Crise Malienne », nous nous proposons ici de vous apporter des précisions quant aux conditions d’une « intervention militaire internationale dans un territoire souverain », tout en nous prononçant sur l’opportunité de celle-ci.
En ce qui concerne le Droit International Public et les Relations Internationales, la question de l’intervention militaire d’une coalition internationale (ou d’un autre pays) dans le territoire d’un pays souverain, fût-il en crise, est soumise à des conditions particulières qui doivent être remplies afin que cette intervention soit légitime.
1) Dispositions du Droit International
Selon l’Organisation des Nations-Unies, « la Guerre doit être encadrée et la paix maintenue à tout prix », pour éviter de faire sombrer le monde dans des conflits ravageurs et interminables, comme nous avons eu l’occasion de le « vivre » par deux fois au vingtième siècle : les deux Guerres mondiales.
Un système bien cadré pour le « recours à la force » est donc créé, avec quatre conditions nécessaires pour « légitimer » toute intervention militaire :
– Les considérations morales : Existence d’une menace pour la paix et de risques de propagation à d’autres pays ;
– Les considérations diplomatiques : L’épuisement des voies de règlement pacifique de la crise ou du conflit ;
– Les considérations juridiques : Un « instrument juridique international » doit autoriser l’intervention et en fixer les modalités ; par exemple une résolution du Conseil de Sécurité des Nations-Unies.
– Depuis quelques années, des considérations politiques sont prises en compte qui permettent de légitimer une « ingérence humanitaire » si le conflit concerné crée des désastres humains considérables et intolérables, à condition cependant que l’intervention soit autorisée par l’organe juridique compétent des Nations-Unies, c’est-à-dire le Conseil de Sécurité.
2) De l’opportunité même d’une intervention : risques d’enlisement dans un « bourbier sans fin» !
Depuis quelques décennies, il faut noter que l’Onu a décidé de « délocaliser et de régionaliser » le maintien de la paix ! Ce qui permet aux organisations régionales comme la Cedeao (exemple de l’Ecomog au Libéria) ou l’Otan (exemple de la coalition européenne au Kosovo), d’intervenir militairement pour le règlement des conflits.
Ainsi, lors du « baptême de feu » de la Cedeao au Libéria et en Sierra-Léone, ce fut un échec retentissant qui solda cette intervention de l’Ecomog, même si certains diplomates à la « langue de bois » concluent à un « bilan mitigé mais prometteur » !
Or, la Crise Malienne pose des problèmes juridico-diplomatiques de taille :
– Ce n’est pas encore une crise internationale, donc débordant du territoire d’un Etat souverain comme ce fut le cas au Libéria et en Sierra-Léone ; sauf, si l’organisation valide notre thèse concernant une « Crise Sahélo-Saharienne », déjà partagée par d’autres éminents chroniqueurs tels que Florent Couao-Zotti dans sa dernière réflexion publiée dans votre quotidien.
– Les voies de règlement pacifique ne sont pas encore épuisées, car il aurait fallu « amener les islamistes rebelles à la table de négociation », au lieu de s’attarder à « régler les conditions d’une transition pacifique à la Présidence Malienne ».
Est-ce pour mettre fin à un « coup d’Etat » (qui relève des affaires internes d’un pays, ne le perdons pas de vue) que l’intervention est décidée, ou est-ce qu’il s’agit d’un « Droit d’Ingérence Humanitaire », auquel cas il serait intéressant qu’on nous présente les «déplacements massifs de populations » ou les « exactions majeures de Crimes contre l’Humanité » qui devraient en être le déclencheur? A quoi joue la Cedeao? A nous enfoncer dans un bourbier interminable ? Ce sont des questions à brûle-pourpoint que nous lançons à l’opinion pour apporter de nouveaux éclairages, nous en avons bien besoin dans ce dossier malien si «ambigu»
Nous croyons qu’il faille faire retentir toutes les sonnettes d’alarme afin de suivre de très près l’évolution de ce conflit et de son règlement.
Quant à nous, nous nous proposons de revenir vers vous pour préciser la « position discrète » de l’Onu sur la question d’une intervention militaire au Mali, au vu de ses précédents déboires en Irak et en Afghanistan.