Une épitaphe pour Albert Tévoédjrè

La mode est devenue désuète ; l’épitaphe en tant qu’ensemble des inscriptions sur un tombeau, est de nos jours réduite aux dates de naissance et de décès du défunt. On ne voit plus guère cette brève sentence résumant sa vie ; mais autrefois, elle faisait partie de l’une ses dernières volontés, rédigée par lui-même et consignée dans son testament.

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 On en a connu de célèbres, comme celle d’Al CAPONE, le plus grands des gansters américains : « Ci-gît un cœur qui n’a jamais voulu du mal à personne » Imaginons celle d’un personnage controversé dont tout le monde redoute les roueries et souhaite de son côté au risque de pâtir de ses entourloupes et manœuvres de ruse, car il est très malin : Albert TEVOEDJRE. Je lui proposerais volontiers celle-ci : « Ci-gît Albert TEVOEDJRE 192.-201. Un homme de génie qui n’a jamais été bien compris par ces compatriotes ». L’homme, surnommé le renard de Djrêgbé, est certes déconcertant. A près de 85 ans et manifestement malade, il trouve encore l’énergie d’alimenter une polémique avec sa dernière livraison : Chrétien et responsable dans la cité. D’autres seraient déjà totalement groggy par l’approche inéluctable de la terrible échéance et se contenteraient de l’attendre avec une sereine résignation. Pas Albert TEVOEDJRE. Combattif jusqu’au bout. Je le vois assurément crédité d’une brillante intelligence. On craint ses coups fourrés et ses foucades ; aussi finit-il par exaspérer par ses actes d’impatience ; parce que des fois, on ne tolère pas du tout ses agitations autant dans la production des idées que dans l’engagement politique. La liste de ses sentences qui malheureusement ne l’ont pas fait adouber par ses congénères intellectuels et politiques, est longue. Man TEVOS fascine, agace et irrite, sauf ceux qui habitués à la prospection de la psychologie individuelle de tels hommes, savent en déceler les lieux de blocage et de fuites en avant névrotiques. L’ancien Secrétaire général de L’UAM, ancien Directeur Général Adjoint du BIT est prolixe en formules lapidaires et en concepts utopiques: «Où en sommes-nous ? », «Y a t-il complot ? », «La pauvreté, richesse des peuples », «Mathieu KEREKOU, la formule mathématiquement imparable», «Minimum social commun», « Démocratie participative et République coopérative ». Dans le lot, deux métaphores ont rendu célèbre l’ancien rapporteur général de notre Conférence Nationale : «Nous avons vaincu la fatalité », « Lorsque l’intelligence déserte le forum, tout finit en dictature ». Or, personne ne s’est jamais soucié de s’inspirer vraiment de ses cogitations, sauf certains universitaires dont il se réclame être de l’aréopage en tant qu’ancien fellow de la célèbre Université de HARVARD et docteur en sciences économiques et sociales de l’université de Genève ! Ma compassion pour le vieil homme qui de notre part appelle plutôt prières au Père Céleste afin qu’il lui accorde la grâce de vivre quelques années encore sur cette terre avant de l’appeler auprès de lui, a calmé ma colère lors donc que ce catholique fervent, ancien séminariste et féru d’humanités classiques, s’est permis de brocarder à sa manière subtile les Assises Catholiques de l’Engagement du Chrétien dans la Cité. Le corps du délit est apparemment une phrase du préambule du projet de charte : « Le Bénin a généralement été dirigé par des chrétiens, souvent catholiques, mais qui hier comme aujourd’hui brillent la plupart du temps par leur contre-témoignage en politique et malheureusement trop souvent par leur forte implication dans les actes de corruption, les manœuvres politiciennes, les pratiques et pactes occultes.» Aucun catholique au cours de ces trois jours de réflexions approfondies n’avait moufté et s’était mis à quereller ce constat ; mais c’est un crime de lèse-majesté à l’égard du politique catholique béninois qui a eu « à tutoyer le Pape, à manger avec J.F. KENNEDY et à fréquenter les grands de ce monde.» ! Le verdict est tombé aussi tranchant qu’un couperet : «Cet exercice absolument louable et nécessaire des assises catholiques ne doit pas faire oublier qu’avant d’observer, il faut peut-être savoir, il faut sans doute pratiquer, il faut accepter de souffrir en politique et de porter l’ambition de gagner son paradis en servant ses frères et sœurs par l’instrument de la science et de l’action politique. Il ne suffit pas d’être « averti » de la chose politique. Il faut la connaître et la vivre pour être crédible. Les assises catholiques méritent d’être une entreprise véritablement « catholique », sans exclusion, ans excommunication discrète ou affichée pour cause arbitraire d’options politiques contestables aux yeux de certains, laïcs ou non. » Les catholiques qui ont participé à ces assises sont loin d’être tous des béotiens incultes et ignares, des ronds-de cuir imbéciles, et tous ceux dont le Professeur TEVOEDJRE aligne les noms dans son opuscule étaient invités à participer à ces assises, quoique non cooptés pour les trois mois de travaux dans les ateliers. Et c’est peut-être à ce niveau la présomption d’exclusion qu’agitent certains cadres et personnalités politiques catholiques dont Albert TEVOEDJRE, toujours prompt à sentir le roussi dans la bergerie, se veut être le porte-parole. Décidément, il y a des moments qu’on ne reconnaît plus certains coreligionnaires d’une Eglise dont l’enseignement du fondateur, Jésus-Christ, au cours de son bref ministère sur cette terre, comporte cette valeur cardinale : l’humilité.

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