Clarifications du rôle du Programme des Nations Unies pour le Développement

S’il arrive que nos réflexions entrainent, à tort ou à raison, des réactions négatives, nous nous obligeons moralement à en faire cas au lecteur avec nos observations bien entendu, parce que, publier ses réflexions, même si elles n’ont que le caractère  d’opinion n’engageant que son auteur, est une responsabilité que l’on encourt.

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 L’on ne peut, en effet, savoir et mesurer   l’impact qu’elles pourraient avoir sur ceux qui  se  sont donnés la peine et l’obligeance de les lire. 

Le Pnud s’est donné pour tâche principale d’accompagner notre  gouvernement de concert avec des partenaires stratégiques, dans  la lutte qu’il mène contre la pauvreté ; il est donc compréhensible que l’institution prête, à bon escient, une attention particulière à ce qui s’écrie sur le sujet  et l’impliquant par la force des choses.  Dans nos dernières réflexions intitulés : ‘’Lutte contre la pauvreté : pour une nouvelle dimension de l’assistance du Pnud ‘’et  ‘’Lutte contre la pauvreté : réévaluation d’une stratégie et plaidoyer pour une journée nationale’’, nous cherchions à apporter notre contribution citoyenne à l’amélioration des stratégies utilisées pour éradiquer le mal  qu’est la pauvreté. A la faveur d’une  causerie avec les fonctionnaires  du Pnud, nous avons compris qu’ils craignaient que certaines idées développés dans nos réflexions  fassent, à tout hasard, objet de méprise à l’encontre de l’institution. Nous n’en avons pas convenu avec eux ; tant s’en est fallu et le leur avons signifié nettement. Nous avons cependant décidé d’expliciter nos idées dans le présent article non pas  pour apaiser leurs inquiétudes au demeurant injustifiées mais parce que l’exercice   peut être de  quelque intérêt pour les concitoyens, qui leur permettrait de mieux appréhender le rayon d’action du Pnud dans notre pays..

—-Nous avions exprimé l’idée que la lutte contre la pauvreté avait besoin d’un second souffle. Nous écrivions alors :

‘’Des économistes se succèdent à la tête de l’Etat ; ils foisonnent dans les directions techniques et donnent le meilleur d’eux-mêmes ; pourtant  la pauvreté ne recule pas. Le Programmes des Nations Unies  pour le Développement vient en appui  substantiel aux différentes stratégies du gouvernement : la pauvreté ne s’arrête toujours pas. Bien au contraire  elle se fait exponentielle et génère de nouveaux pauvres : elle nous fait un pied de nez. C’est l’aveu d’impuissance d’une lutte qui a besoin d’un second souffle.

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Bien entendu en écrivant ces lignes nous ne saurions raisonnablement pointer  d’un doigt accusateur l’organe qui vient seulement en appui  au gouvernement. Le Pnud n’est pas l’acteur principal du développement du pays qu’il assiste et aucune responsabilité ne saurait lui être imputée  dans la gestion des affaires de ce pays. Peut-être est-il utile de le rappeler. Nous  ne doutons pas que  lecteur l’ait compris de cette manière. Au demeurant  notre pays n’est pas sous tutelle des Nations Unies à ce que nous sachions.

—-Nous évoquions dans notre article l’idée de  la nécessité de contrôler l’impact  effectif des formations et  de divers ateliers que finance à grands frais le Pnud, sur le développement  économique et social de notre pays. Nous écrivions alors :

 ‘’ En l’état actuel des choses, l’assistance du Pnud qui pourtant nous demande de relever le niveau de croissance de notre PIB comme seul moyen de sortir de la pauvreté, n’est pas prioritairement d’ordre économique. Le Pnud vise, d’une part, à appuyer la formulation des politiques publiques destinées à faciliter la réalisation des objectifs du millénaire du développement  et d’autre part, à développer des actions de terrain compatibles avec les principes de développement humain ; améliorer l’efficacité administrative des structures de  lutte contre la pauvreté. Encore faudrait-il pouvoir de temps à autre évaluer leur impact réel sur ladite croissance afin de répondre de leur efficacité’’.

Compte tenu de l’importance des formations et du coût qu’elles génèrent, il nous a paru  judicieux que soit mis au point  un système d’évaluation de leur impact effectif sur le développement économique et social du pays. Mais avait-on besoin de spécifier que ce n’est pas le Pnud qui initie  les formations et qu’il revient donc à l’instance qui en sollicite le financement d’évaluer leur impact, ne serait-ce que pour savoir dans quelles directions  orienter  ses demandes ultérieures ? La chose  nous paraissait aller sans dire et nous ne voudrions pas faire offense à nos généreux lecteurs de penser qu’ils  s’y  seraient mépris.

—-Nous avions exprimé l’idée que notre gouvernement n’avait pas une politique systématique de création d’entreprises alors que le Pnud nous dit, au demeurant à juste titre, que ce n’est que par la croissance de notre Pib que nous  gagneront la tutte contre la pauvreté ; et nous savons tous que la création de richesses ne peut se faire que par le biais  de la création d’entreprises. Nous  sollicitions donc  son appui   pour favoriser, le cas échéant, une politique d’Etat conduisant à cette fin ; et nous écrivions  alors :

‘’Nous suggérons que  le Programme des Nations Unies pour le Développement qui accompagne le gouvernement donne une nouvelle dimension à son action contre la pauvreté dans notre pays en accordant une assistance , sous une forme qui reste à déterminer, à une politique d’Etat  de  création d’entreprises, meilleure manière, dans notre entendement, de  générer la croissance économique et de réduire discursivement la  pauvreté. Il s’agira alors, pour l’institution, d’une nouvelle orientation de ses activités qui devrait être étudiée au niveau du plan cadre des Nations Unies pour l’assistance au développement (Undaf)  Il est grand temps que nous remettions en cause la qualité de l’assistance qui nous est apportée. Si nous qui en sommes  les bénéficiaires, ne réagissons pas elle ne changera pas de direction de par l’initiative des  donateurs’’. Nous demandions ainsi  à notre gouvernement de tenter d’infléchir la politique traditionnelle du Pnud. N’est-ce pas  là   un  vœu  qui ne saurait être pris pour un reproche ni une injonction  de quelle que manière?  Nous pensions  qu’un vœu n’était qu’un  souhait qui n’autorise  guère à  clouer au pilori celui à qui on le formule pour ne l’avoir pas déjà exaucé.  Nous avons la  conviction que nos lecteurs n’ont pu le comprendre autrement.

—–Nous avions émis l’idée de la nécessaire participation  des bénéficiaires au projet de développement  et nous écrivions alors :

‘’Qu’ils émanent du gouvernement, du Pnud ou des organisations non gouvernementales, la lutte contre la pauvreté ne peut se concevoir  sans l’implication en amont de ceux qui sont sensés en bénéficier. Il est vrai que nous avions écrit auparavant que : ‘’A voir les choses de près, l’on n’a pas le sentiment que  les personnes les plus démunies  participent effectivement à la lutte contre l’état de pauvreté menée en leur faveur. Cette lutte donne plutôt l’impression d’être conçue  et conduite par un triptyque : Gouvernement-Pnud-Partenaires stratégiques, qui cherche à apporter des  solutions pour venir à bout d’une situation dont les affectés eux-mêmes ne prennent pas toute  la mesure ; ils ne se considèrent pas comme acteurs   mais plutôt comme bénéficiaires. Ils ne  sentent pas  animés du sentiment  d’être au  cœur d’une stratégie d’action’’.

Les fonctionnaires du Pnud nous ont fait valoir que leur manière de faire les choses a changé et que la composante participation est actuellement prise en compte comme il convient. Nous en avons pris bonne note et nous partageons l’information avec nos lecteurs. Tant mieux pour les bénéficiaires et autant pour nous. Mais  ce sur quoi nous insistons, c’est la participation en amont. En effet la véritable participation se trouve au niveau de l’identification et de la  conception des projets et pas seulement au niveau de leur réalisation. Cet élément nous parait capital dans toute stratégie de développement affectant  directement les populations. La forme et la représentation de cette participation en amont reste à déterminer bien entendu.  Quand bien même d’aventure, le lecteur ne partagerait pas notre point de vue, du moins il n’aura pu se tromper sur  notre préoccupation.

—-Nous avions relevé l’absence de sensibilisation conséquente et d’adhésion des masses  dans les stratégies; et à titre d’illustration  nous écrivions :

’’Techniquement il n’est pas possible de réduire la pauvreté lorsque le taux de croissance  démographique est supérieur à celui de la croissance économique ; et cela devrait faire l’objet d’une sensibilisation fondamentale si l’on veut enrayer méthodiquement la pauvreté.’’ Nous évoquions la campagne en cours sur le planning familial financée par l’Usaid et nous stigmatisions ‘’le fait  qu’elle ne sensibilise absolument pas  la population  au  lien de cause à effet entre  l’augmentation de la population  et la persistance de la pauvreté. Elle ne lui fait pas admettre  que lorsque l’on fait beaucoup d’enfants, la pauvreté ne peut  reculer.  La politique de planning familial souffre du manque de  cette dimension’’. Plus loin nous écrivions également: ‘’ Pour être efficace, toute lutte à caractère social nécessite de quelque manière une adhésion de masse, la mobilisation de toute la population par devoir de solidarité nationale. La pauvreté dans notre pays  étant un phénomène de masse, la lutte contre elle ne peut être  concluante si  l’ensemble de la population n’y est sensibilisée,  ne s’y intéresse, ni ne la soutient ; ce  devrait être une croisade’’

Nous présumons qu’il n’est venu à l’esprit d’aucun de  nos lecteurs que  nous reprochions  au Pnud de ne pas faire de bons spots publicitaires conformes aux intérêts de la lutte contre la pauvreté en lieu et place du gouvernement ou de l’Usaid ; ce serait vraiment le comble. Si c’était le cas nous les  prions   de bien vouloir  reformer leur jugement au plus vite. Du reste, il nous est évident qu’il s’agit d’observations d’ordre général qui à la limite s’adresseraient  au triptyque gouvernement -Pnud – partenaires stratégiques en tête de la lutte contre la pauvreté. Difficile alors  de comprendre, et le lecteur avec nous, pourquoi le  seul Pnud se les approprierait et les considèrerait sous l’angle du reproche.

—– Nous avons suggéré la création d’une journée nationale contre la pauvreté et nous avertissions qu’elle ne saurait être prétexte à  danses et autres divertissements. Nous écrivions alors :

  ‘’ Nous avons institué et nous respectons bon nombre de journées tant nationales qu’internationales mais, chose vraiment curieuse, nous négligeons l’essentiel qui nous concerne: la lutte contre la pauvreté alors même qu’elle est l’axe de notre politique de développement. Ce paramètre sociologique important  manque également à la stratégie de  lutte que mènent le gouvernement et le  Programme des Nations Unies pour le Développement. Afin d’y  remédier  nous suggérons  l’instauration d’une journée nationale de lutte contre la pauvreté, non pas pour nous divertir ni danser comme cela nous prend en plus que  maintes occasions mais une journée  qui nous fasse vraiment  réfléchir sur la pauvreté ; qui fasse prendre conscience  du phénomène à l’ensemble des citoyens. (…) l’occasion de  populariser une lutte qui a besoin d’un second souffle.  Une conscience collective sur le sujet  nous parait  être  la condition sine qua non pour gagner la bataille  contre la pauvreté. Nous aimons à penser que le Pnud aidera à  en financer le coût compte tenu de son utilité et de son impact’’

      Peut-être devrait-on relire ces lignes pour s’assurer  qu’elles ne cachent rien qui  puisse  faire penser que nous accusons le Pnud  de  financer des danses ; nous signifions tout le contraire à savoir que nous souhaitons que l’institution finance  le coût d’une journée nationale débarrassée de tout folklore.

Telles sont les clarifications que nous avons tenu à apporter à nos lecteurs suite aux craintes, au demeurant injustifiées, du Pnud qu’ils se méprennent sur nos intentions.  C’est  vraiment à se demander les motivations réelles et profondes du procès d’intention qui nous a été fait par une  institution de cette envergure  avec laquelle nous n’avons aucun contentieux. La chose s’est faite  d’autant plus sérieuse que  l’initiateur de l’entretien n’a pas hésité à y associer  à notre grand embarras,  les  trois organes qui ont publié nos réflexions ; c’est dire toute  la dimension qu’il a entrepris de  donner à la chose et qui explique que nous ne pouvons pas ne  pas donner la réplique et la passer sous silence. Nous avons  besoin de comprendre. Peut-être cette institution  se considère t-elle tellement impliquée dans la lutte contre la pauvreté qu’elle prend pour elle seule toute observation faite sur le sujet ; peut- être se responsabilise t-elle outre mesure et se  culpabilise t-elle  subconsciemment à l’occasion ; peut-être entreprend-t-elle  d’entraver   notre droit d’expression sur ses activités ; peut-être  aussi  à- t-elle essuyé par ailleurs  des diatribes  avant la  publication de nos réflexions qui l’ont mise sur la défensive et qu’elle  les y a intégrés se figurant  qu’elles étaient un traquenard de plus .  Peut-être alors que le seul libellé des  titres de nos  articles  a  fait répulsion et préjuger, au détriment de la sérénité qu’il fallait pour lire une réflexion,  que tout ce qui pouvait y être écrit   lui était d’office destiné et que  tout était reproche à son encontre  à l’exclusion même des autres partenaires dans cette lutte contre la pauvreté au Bénin. Appropriation excessive ; frilosité, ou simple  excès de zèle d’un agent? Je dirais tout à la fois.

Outre nos questionnements et en dernière analyse, il y a tout lieu de penser que sourdaient par ailleurs, des problèmes de leadership, d’appropriation, de  coopération et d’insatisfaction mutuelle entre le Pnud et ses  partenaires locaux. En effet il nous  a été donné de  percevoir clairement cette situation d’incompréhension et de tension latente entre les deux parties  à la faveur de certaines interventions, au cours du dernier atelier de validation du plan cadre pour l’assistance au développement couvrant la période 2014-2018,qui vient de se tenir et  auquel nous avons assisté. Nous faisons alors l’effort de comprendre  qu’aient été donnés à nos réflexions les sens qu’elles n’avaient point et que l’on ait même eu à évoquer clairement en utilisant explicitement le terme de   «complot» contre l’institution à notre grande stupéfaction et décontenance. C’est probablement et en tout état de cause, la seule explication honorable que l’on puisse invoquer  pour donner un sens à tout ce qui a été dit au cours de  cette causerie et préserver en premier lieu la dignité de l’initiateur de l’entretien qui en a bien besoin et accessoirement celle des autres  interlocuteurs.

Toujours est-il que l’occasion a été belle de nous faire mieux comprendre, si besoin en était. Il convient cependant  d’éviter de faire de l’institution, le bouc émissaire de nos insuffisances ; ce dont elle souffre apparemment. Elle nous  assiste et elle  le fait très bien ; aussi convient-il  d’en être particulièrement redevable à Madame la Représentante qui se dévoue corps et âme pour notre pays; à tous les  hauts cadres qui l’entourent et qui donnent  le meilleur d’eux-mêmes pour nous  apporter l’assistance des Nations Unies. Comme disent les anglophones, ce fut un «over reaction»  de la part de l’institution et cela arrive.

Par Candide Ahouansou
Ambassadeur Président de l’Ong  Groupe d’Actions pour une Meilleure
Qualité de Vie (Gamqv)

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