Gouvernance au Bénin : Une révision constitutionnelle qui fait débats!

«On n’est pas obligé de réviser notre Constitution, si on n’en fait pas le choix»! Dixit le professeur Joël Aïvo, un agrégé des facultés de droit, dans notre parution du mardi 22 janvier 2013.

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Cet avis du professeur Aïvo est venu nourrir le débat récurrent sur la révision constitutionnelle, débat qui retient l’attention de toute la classe politique de notre pays depuis un certain temps ; et cela commence par dater : Révisera, révisera pas? Qu’attend le Chef de l’Etat pour enclencher le processus, si tant est-il que cela lui tient vraiment à cœur, comme il l’a encore fait savoir dans son dernier discours sur l’état de la Nation? Que cachent tous ces atermoiements et ces tergiversations dans un acte prévu par la constitution elle-même? Qu’en est-il de l’opportunité de la révision, dans l’état actuel de nos institutions? La révision est-elle si urgente que l’on voudrait nous le faire croire ? Nos analyses, pour des réponses pertinentes!

Le Chef de l’Etat peut réviser quand il veut une constitution qui le dérange!

Une affirmation sentencieuse, non pour dire que le Président de la République peut amender à souhait et réviser à volonté la loi constitutionnelle du pays. Non, cette affirmation doit plutôt être comprise dans ce sens que l’initiative de la révision de la constitution est reconnue au Chef de l’Etat, par la constitution elle-même. Il peut demander quand il le souhaite, une révision de la constitution, si celle-ci est devenue caduque ou désuète en certaines de ses dispositions.

Or, ce n’est pas encore le cas de la constitution de notre pays, seulement vieille d’une vingtaine d’années (elle date de 1990), quand on sait que la constitution de certaines nations démocratiques a fait plus de cinquante ans avant d’être amendée ! La constitution de 1990, qualifiée d’une des meilleures de l’Afrique francophone par plusieurs observateurs, et dont les rédacteurs ont été salués pour leur vision du futur, cette constitution tant décriée depuis la fin du second mandat du Président Kérékou (qu’il vous souvienne qu’une première tentative de révision avait été tenue en échec par le soulèvement de toute la société civile) et actuellement avec le nouveau président, n’est pas aussi désuète qu’on veuille bien nous le laisser entendre. Et tous les principaux juristes, constitutionnalistes de haut niveau, qui se sont prononcés sur la question, sont unanimes : Dans l’état actuel de nos textes fondateurs, il n’y a aucune urgence à vouloir réviser notre constitution ; même s’il est vrai que toute œuvre humaine est perfectible et que nous devons réfléchir à comment améliorer notre arsenal de lois fondamentales, la constitution et les lois organiques de nos institutions, pour les actualiser et les mettre en adéquation avec les nouvelles réalités et exigences de la gouvernance nationale. Et ce n’es pas le cas!

Donc, l’opportunité de la révision de la constitution de notre pays n’est pas réelle, mais entièrement illusoire, une illusion entretenue à dessein, peut-être  pour dissimuler d’autres motivations?!

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Et, avant de continuer sur ces motivations cachées, nous souhaiterions citer, encore une fois, le professeur Aïvo qui argumente dans le même sens : « On n’est pas obligé de réviser notre constitution si on en fait pas le choix… [Notre pays] n’a pas une constitution qui, si elle n’est pas révisée, conduirait le pays vers une crise majeure. Notre constitution a montré sa solidité et, qu’elle peut tenir, même sans révision, pendant 22 ans » !

Si le Président de la République tient à réviser la constitution il n’a qu’à le demander aux représentants du peuple (procédure simplifiée avec de majorités qualifiées de 2/3 ou 4/5 requises) ou au peuple lui-même, par voie référendaire ! Dans les deux cas, le Chef de l’Etat devra se soumettre aux procédures en vigueur dans notre pays, prévues par la constitution elle-même !

Alors, qu’attend le Président pour enclencher le processus, une autorisation?

L’initiative de révision dont dispose le Président de la République, n’est soumise, selon les textes, à aucune limite constitutionnelle (les juristes en conviendront), à part peut-être une volonté de consensus, suite à une large consultation nationale, de la classe politique et de la société civile. Ce n’est pas ce que nous observons aujourd’hui, sauf les « petits conciliabules au sommet de l’Etat, entre personnes initiées » qui savent de quoi ils parlent (car ayant science infuse !), qui savent ce qu’ils disent, et surtout qui savent pourquoi ils le disent et le soutiennent !

N’est-ce pas ce qui soutient nos soupçons en donnant l’impression que les débats actuels sur la révision ou non de la constitution de notre pays, cachent d’autres motivations dont nous n’avons pas encore connaissance et que nous ne tarderons pas à savoir, telles que les choses se précipitent depuis un moment, prétendument pour réussir à mettre en jugement devant la Haute Cour de Justice, certains ministres de la République, fautifs dans leur gestion des deniers publics?!

La révision de la constitution n’est pas une urgence nationale!

En effet, à la date d’aujourd’hui, d’autres priorités doivent plutôt occuper le gouvernement et son chef, que cette question de la révision constitutionnelle qui n’est ni urgente, ni opportune. Sauf si toute la nation en fait le choix, s’il n’y avait toute l’opposition qu’elle suscite, aussi bien de certains membres de la classe politique (à part les militants bornés et obnubilés par leur grand patron qui les contrôle à coups de millions) que de la société civile, elle qui a déjà montré son efficacité par le passé, et ne manque pas une occasion pour répéter son refus de toute révision constitutionnelle opportuniste, dans le but de permettre à un Chef d’Etat de « rempiler » (sic) !

L’opinion publique nationale doit rester vigilante !

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