Guerre au Mali : message de Philippe Noudjènoumè du PCB

Mesdames et Messieurs les Députés et Chers Compatriotes, Aussitôt après l’intervention des troupes françaises au Mali le 11 janvier 2013, le Chef de l’Etat a annoncé l’envoi des éléments des Forces Armées du Bénin combattre au Mali.

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 Cette attitude a soulevé la réprobation de certains députés qui ont rappelé que l’implication au combat des Forces Armées du Bénin dans une guerre doit recevoir l’approbation préalable de la Représentation Nationale.

Mais force est de constater que le Chef de l’Etat et son gouvernement n’ont tenu aucun compte de la Représentation Nationale. En effet, ce n’est que le dimanche 20 janvier que le Chef de l’Etat a, dans un discours à la Nation, informé qu’après un conseil des Ministres le 14 janvier 2013, il venait de saisir la Représentation Nationale. Son Ministre de l’Intérieur, Benoît DEGLA, intervenant sur les antennes de la Télévision Nationale ORTB le jeudi 17 janvier 2013, reconnaissait publiquement que l’Assemblée Nationale n’était pas encore saisie à cette date du 17 janvier. Le lendemain 18 janvier 2013, le premier contingent béninois partait sans que l’Assemblée Nationale ait examiné et encore moins donné suite à la saisine du Chef de l’Etat. Il y a manifestement mépris frisant outrage à l’Assemblée Nationale.

Mais au-delà de cette question de forme qui souligne encore une fois qu’au Bénin, le Président de la République gouverne au mépris des lois, agit selon sa seule volonté, il y a lieu de s’inquiéter de la grave décision d’entraîner notre pays et notre peuple contre son gré dans la guerre au Mali.

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Dans son discours de justification de l’entraînement de notre pays dans la guerre, le Chef de l’Etat dit : «La République sœur du Mali est confrontée à une menace contre son intégrité territoriale du fait de groupes rebelles et terroristes qui, au mépris du principe de l’intangibilité des frontières reconnu par l’Union Africaine et la Communauté Internationale, ont engagé un processus de partition du territoire malien.

 Cette menace de partition s’est accompagnée d’une autre menace plus grave. Il s’agit de l’irruption au Nord du Mali de groupes narco-trafiquants et terroristes armés, partisans du fondamentalisme religieux dont l’objectif est de créer au Mali un Etat islamique basé sur la Charia, un projet contraire à la laïcité de la République malienne (…).

Il y a lieu de rappeler que dans ce projet, ces groupes terroristes se proposent de remettre en cause le caractère laïc de l’ensemble des Etats de notre sous-région». (cf "La Nation" du 21 janvier 2013). Voilà l’argumentaire du Chef de l’Etat.

Nulle part dans cet argumentaire, il n’est question d’agression du Mali par des forces armées étrangères. Le projet d’indépendance proclamé de l’AZAWAD et menaçant l’intégrité territoriale du Mali provient de groupes ethniques maliens. Il s’agit donc d’un conflit interne au Mali, comme cela avait été le cas au Nigeria avec le défunt Biafra, au Niger, au Tchad, en République Démocratique du Congo, etc. Ensuite, le principe d’intangibilité des frontières reconnu par l’Union Africaine et la Communauté Internationale a été violé et remis en cause par cette même Communauté Internationale et l’Union Africaine par la partition du Soudan sans que les Etats de l’Union soient allés au secours de Khartoum contre les "rebelles" du Soudan du Sud. Et notre Constitution dans son article 67 dit formellement que «le Président de la République ne peut faire appel à des forces armées ou de police étrangères pour intervenir dans un conflit intérieur sauf dans les cas prévus à l’article 60» qui parle de coup d’Etat, de putsch ou d’agression par des mercenaires. Ce que notre Constitution interdit pour notre pays ne peut être autorisé à l’égard d’autres.

En ce qui concerne l’objectif par des groupes islamistes de "créer au Mali un Etat islamique basé sur la Charia", il s’agit encore ici d’un problème interne au Mali. Les pratiques des fondamentalistes musulmans sont réactionnaires, choquantes et inhumaines comme celles de tout fondamentalisme religieux. Mais, que des Maliens pensent, luttent pour que leur Etat change de régime et que d’un Etat laïc, il devienne islamiste et que d’autres n’en veulent pas, c’est aussi un problème interne au Mali. Et des Etats islamistes basés sur la Charia existent au monde : en Tunisie, en Egypte, en Arabie Saoudite, au Qatar avec lesquels le Bénin entretient de bons rapports. La lutte pour la nature de l’Etat revient aux citoyens de chaque pays.

En envoyant les troupes béninoises s’impliquer au Mali dans un conflit interne, le Président Boni YAYI piétine la souveraineté du peuple malien tout en entraînant notre pays dans la guerre et ceci sans l’avis ni l’aval du Parlement. Les interventions antérieures des troupes béninoises à l’extérieur concernent des missions de paix, d’interposition entre belligérants. Maintenant et ici dans le cas du Mali, il s’agit d’une mission de guerre, de combat contre des forces à l’intérieur du Mali.

Mesdames et Messieurs les Députés et Chers Compatriotes,

Il n’est un secret pour personne que le Nord Mali abrite d’immenses richesses dans son sous-sol  et que la menace de partition du Mali par l’AZAWAD était fortement encouragée (pour ces raisons) par des pays qui aujourd’hui clament vouloir défendre l’intégrité territoriale de ce pays. Ensuite, les groupes terroristes islamistes n’ont pu se déployer au Nord du Mali avec des armes et minutions de pointe qu’avec l’accord, au vu et au su de ceux-là qui étaient intervenus en Libye pour assassiner son président. Enfin, tout récemment, le Président de la République Française, Mr François HOLLANDE, répondant à la demande d’intervention des troupes françaises en Centrafrique contre les rebelles de la SELEKA a eu le bonheur de rappeler que la France n’intervient à l’extérieur que pour défendre ses ressortissants et ses propres intérêts. C’est dire que l’intervention française au Mali vise des intérêts pour la France.

C’est pourquoi, les forces démocratiques maliennes, le peuple malien ont toujours clamé leur volonté de se défendre eux-mêmes. Mais la CEDEAO, par ses mesures d’embargo sur les armes et autres matériels dans les ports côtiers, a asphyxié le Mali, empêché la reconstitution de son armée et l’armement des populations volontaires maliennes contre les rebelles et les groupes terroristes.

Il apparaît alors que l’intervention des troupes étrangères au Mali par ceux-là qui avaient bloqué les armes destinées aux troupes maliennes vise à humilier, assujettir et dominer le peuple malien pour ses richesses bien connues du sous-sol.     Le Président Boni YAYI a alors entraîné notre pays dans une guerre aux côtés des pilleurs du Mali contre "des partisans du fondamentalisme religieux".

Si l’on sait que le Chef de l’Etat et son équipe ne manquent aucune occasion, dans leurs propres discours d’Etat, dans les agissements de maints pasteurs et prieurs qui sont décorés des honneurs de la République, de manifester leur fondamentalisme évangélique au mépris des autres religions et dans la violation constante de la laïcité de notre pays, l’on ne peut qu’être révolté et inquiet par rapport au danger de représailles auquel l’aventure guerrière de Boni YAYI expose notre pays et son peuple.

Il convient alors que les députés à l’Assemblée Nationale se dépassent, refusent qu’on continue de les prendre pour des essuie-pieds comme le fait le Chef de l’Etat et refusent d’avaliser son aventure guerrière. L’Assemblée Nationale serait une véritable Représentation Nationale en refusant d’avaliser la décision gouvernementale d’entrainer notre pays dans la guerre au Mali. Le soutien aux patriotes maliens peut et doit se manifester autrement : fondamentalement par le respect de leur souveraineté et l’aide à accomplir par eux-mêmes, leur destin.

La conduite la plus appropriée qui s’impose en ce moment aux Dignes Représentants de la Nation est d’interpeller le Chef de l’Etat et lui notifier leur réprobation de l’aventure dangereuse dans laquelle il entraîne et notre Pays et ses enfants pour des intérêts étrangers. Ainsi vous mériterez de la Nation.

Recevez chers Députés et Compatriotes, mes Considérations patriotiques.
Philippe NOUDJENOUME

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