Un peu plus de trois mois après avoir affirmé devant l’Assemblée Nationale sénégalaise que «le temps de la Françafrique est révolue», François Hollande s’est retrouvé au Mali, le week-end dernier, comme le héros de l’intervention militaire de «sa France» en Afrique.
Les images de Sévaré, Tombouctou et Bamako ce 02 février m’ont rappelé celles de Benghazi le 15 septembre 2011. A cette date, tout comme Hollande au Mali, Sarkozy, flanqué de son allié de l’époque, le Britannique Gordon Brown, s’était rendu dans le berceau de l’insurrection libyenne pour soutenir les insurgés dans leur traque à Mouammar Kadhafi dont le régime avait déjà vécu.
La visite d’Hollande vient susciter le courroux et l’amertume de ceux qui ont défendu sans ambages que l’opération Serval telle que menée est une autre expression de la Françafrique. Cette visite vient donner raison à ceux qui ont, au début de la présidence de François Hollande, affirmé que la fin de la Françafrique telle que prônée par François Hollande, n’était pas pour demain. C’était donc un leurre. Un leurre confirmé d’abord par l’intervention de la France au Mali dans le cadre de l’opération Serval. Ensuite, par cette image de libérateur qu’on a donné à Hollande dans les trois villes maliennes qu’il a visité : Sévaré, Tombouctou et Bamako. Et c’est l’image qu’on avait donné à Sarkozy à Benghazi.
Il est évident que les interventions militaires françaises en Libye et au Mali ne sont pas de la même nature. Elles ont été d’ailleurs diversement appréciées par l’opinion africaine. Si la première a été controversée, la seconde a été plutôt bien accueillie.
Les pays africains membres du Conseil de sécurité des Nations Unies à l’époque avaient voté en faveur de la résolution autorisant la mise en œuvre de l’opération Aube de l’Odyssée qui a conduit à la chute du Guide libyen. Cependant, le déroulement de l’Aube de l’Odyssée et son issue ont fait objet de vives controverses en Afrique et indigné une bonne partie de l’opinion africaine. La visite de Benghazi était la confirmation de l’ingérence de la France, venue en libérateur, dans les affaires internes d’un pays sous le couvert d’une prétendue légalité internationale. Et tout cela au nom d’une mission instauratrice de la démocratie. Sous Sarkozy, l’instauration de la démocratie par le feu en Libye et en Côte d’Ivoire, ainsi que l’issue de l’affaire de l’arche de Zoé étaient la preuve que le paternalisme dont fait preuve la France dans ses relations avec l’Afrique n’allait pas disparaitre de si tôt. Serval est une preuve de cette triste réalité.
La visite triomphale de François Hollande à Bamako, tout comme celle de Sarkozy à Benghazi, rappelle avec tristesse les arguments de libérateurs, et ceux de civilisateurs fournis pour justifier la colonisation française en Afrique. A voir les images de Bamako et autres, on se rappelle encore les bains de foule dont bénéficiaient les présidents français pendant leurs déplacement africains à une certaine époque où la Françafrique battait son plein. Et ce, sous l’influence des réseaux occultes.
Au Mali, l’on a célébré non seulement le héros du moment, François Hollande, mais aussi la domination et le paternalisme de la France vis-à-vis de ses ex-colonies. La Françafrique, et non la relation de la France avec l’Afrique, a toujours été condamnée par certains milieux intellectuels africains. Les populations africaines à la base ne sont pas imprégnées des débats élitistes sur les relations occultes entre la France et l’Afrique. Mais La liesse à Sévaré, Tombouctou et Bamako montre que ces populations ont toujours gardé l’image de la «France sauveur et gendarme de l’Afrique».
A Dakar en Octobre 2012, Hollande avait affirmé que «Le temps de la Françafrique est révolu : il y a la France, il y a l’Afrique, il y a le partenariat entre la France et l’Afrique, avec des relations fondées sur le respect, la clarté et la solidarité».
Il ajoutait que «Les émissaires, les intermédiaires et les officines trouvent désormais porte close à la présidence de la République française comme dans les ministères».
Seulement, les réseaux mafieux, les intermédiaires et les officines, des côtés pervers de la Françafrique, vont peut-être disparaitre. Mais le néocolonialisme empreint de paternalisme de la part de la France, qui se fera toujours passer pour le gendarme de l’Afrique, ne cessera pas demain. Hollande, chantre d’une Françafrique nouvelle version vient d’en donner la preuve.
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