Implication des populations civiles dans la lutte contre l’insécurité : la démission honteuse de l’Etat

Le gouvernement béninois se cherche toujours face à l’énorme défi sécuritaire au Bénin. Alors que les actes de grand banditisme se multiplient dans le pays, le gouvernement a semblé trouver dans l’implication des populations civiles, à travers l’installation des comités locaux de sécurité, une panacée.

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Seulement, cette initiative, bien que salutaire, laisse  une impression de démission du gouvernement, face à une préoccupation de souveraineté et pour laquelle des milliards sont engloutis chaque année. Braquages, vols à main armée, viols, crimes crapuleux…Il ne se passe plus de jours sans que les béninois ne vivent un acte grave d’insécurité. L’insécurité à Cotonou et environs et dans les grandes villes du pays, commence à inquiéter maints Béninois. Cette inquiétude a atteint son paroxysme lorsqu’on apprend dans la presse, depuis hier, que Mathurin Nago, Président de l’Assemblée Nationale, a failli être écrasé ce week-end dans son « Bopa » natal, par des sicaires recrutés, selon ses dires, pour le liquider. Que la deuxième personnalité de l’Etat béninois ait pu échapper de justesse à une agression en dépit de sa pléthore de gardes, cela fait froid dans le dos. On peut donc affirmer sans fioritures, que nous sommes en insécurité grandissante. Selon une enquête Afrobaromètre publiée en Janvier 2013, la sécurité fait partie des cinq problèmes les plus préoccupants pour les Béninois, avec l’eau, l’électricité, l’éducation et la santé. La solution trouvée actuellement est d’impliquer les populations civiles dans la lutte contre l’insécurité, en créant dans chaque village, dans chaque quartier de ville et dans chaque arrondissement, des comités de sécurité. Le jeudi 28 mars dernier, le ministre des affaires présidentielles et celui de l’intérieur, Issifou Kogui N’Douro et Bénoît Dègla, ont procédé à l’installation de ces comités locaux de sécurité au titre des départements du Littoral, de l’Atlantique, de l’Ouémé et du Plateau, les quatre départements les plus touchés par l’insécurité. L’objectif de cette initiative est d’aider les forces de sécurité en mettant à leurs dispositions des informations qui peuvent les aider à vite appréhender les personnes suspectes et arrêter les malfrats qui logent dans leurs parages. Elles pourront aussi être utilisées comme du personnel de para-sécurité avec l’instauration des brigades civiles pour sillonner les quartiers dans la nuit. L’initiative est bonne dans son essence. Elle est aussi salutaire et témoigne de la bonne volonté du gouvernement de lutter contre l’insécurité.

La démission

Mais à voir de près, cette initiative du gouvernement est une véritable démission de sa part. La défense de l’intégrité du territoire et la sécurité, font partie des missions régaliennes d’un Etat. Il ne peut donc s’y déroger. L’Etat doit assurer la sécurité de ses citoyens. C’est un droit constitutionnel consacré à l’article 15 de la constitution du 11 décembre 1990. Ceci étant, le citoyen en est bénéficiaire et n’est donc pas celui qui doit encore assurer la sécurité. Les recettes publiques devraient servir à cela. Ces dernières années, L’Etat béninois a pourtant recruté des milliers de jeunes dans les corps de sécurité. Il est donc surprenant que les populations civiles qui courent à longueur de journée pour joindre les deux bouts, soient encore appelées à la rescousse pour assurer leur propre sécurité. Où sont-ils passés tous ces jeunes policiers? Selon les confidences d’un policier, l’insuffisance du personnel des forces de sécurité est aggravée par un mauvais déploiement. La plupart des forces de sécurité, précise-t-il, sont concentrées dans les ministères, les directions et un gros lot est affecté à la sécurisation des lieux publics et des personnalités. C’est la portion congrue qui est mise au service des populations qui en ont le plus besoin. Au temps de la révolution, il y avait eu des comités du genre, mais elles procédaient du fait que nous étions dans un régime dictatorial et il était donc permis d’épier n’importe qui n’importe où. Mais de nos jours, la création sur toute l’étendue du territoire national, de ces comités de sécurité relève de l’espionnage des citoyens. Pendant que le gouvernement implique les populations civiles, rien n’est fait pour contrôler ceux qui émigrent dans notre pays. Qui sont-ils? Que font-ils? Et pourquoi viennent-ils au Bénin? Les services de sécurité et de renseignement devraient être mis à contribution pour cela. Ce travail permettra de lutter efficacement contre l’insécurité et contre le terrorisme qui tape à nos portes avec Boko Haram, Aqmi… très opérationnels dans les pays limitrophes. Si la gestion de la sécurité devrait cesser d’être une prérogative exclusive du gouvernement, ce dernier aurait ainsi échoué là où on attendait qu’il réussisse le mieux. N’est-ce pas ce gouvernement qui a investi des dizaines de milliards en 2007 pour acquérir des armes et des équipements militaires?

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