Le changement à l’envers?!

«Un petit groupe de citoyens réfléchis et engagés, peut changer le monde…» Un enseignement du Pouvoir du Miroir. Si nous avons recours à cette périphrase, c’est pour aborder de manière plus citoyenne, donc moins politique, la question de la prorogation des mandats des élus locaux

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, par « un petit groupe», avec la Loi dite Débourou votée ce lundi 22 avril, et qui déjà suscite un tollé général. Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude, nous enseigne le Droit. Alors, comment ceux qui sont censés « faire la loi » peuvent également contribuer à la contourner ? Car ce que nous pouvons retenir de cette loi de prorogation de mandats électifs, sans prendre l’avis et l’accord des populations concernées, c’est qu’elle est une innovation qui n’innove en rien, créant plus de problèmes qu’elle n’en résout… Premier avis avant nos développements qui suivent, d’où notre intitulé: «Le changement à l’envers…»

Un coup d’épée dans l’eau!

C’est le sentiment que nous pouvons faire ressortir à l’annonce de l’adoption par la Représentation Nationale, de la Loi Débourou portant prorogation des mandats de élus locaux installés en 2008, et dont les mandats arrivent à expiration cette année, rendant nécessaires, voire obligatoires, l’organisation de nouvelles élections.

Or, que constate-t-on ? Face à de nombreux problèmes qui entourent l’organisation prochaine des dites élections locales, communales et municipales, l’on a plutôt trouvé un « raccourci commode », quitte à créer un « Grave Précédent » dans le système démocratique national.

Tel un « coup d’épée dans l’eau », la Loi Débourou ne règle vraiment pas le problème de l’organisation, dans les délais constitutionnels et légaux, des élections devant renouveler les conseils communaux et municipaux et déboucher sur l’installation de nouveaux maires.

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De trois problèmes majeurs…

Cette loi crée plutôt d’autres problèmes dont nous ne retiendrons que trois :

1) Le contournement de la souveraineté populaire : Puisque c’est le peuple qui a élu les conseillers communaux et municipaux, par le jeu de la démocratie locale, c’est encore à lui, par le suffrage des citoyens, de se prononcer pour « proroger ou non » le mandat de ceux-ci, après analyse des arguments convaincants et pertinents apportés par les autorités en charge de l’organisation des dites élections… A cause du «Parallélisme des Formes»!

2) La déresponsabilisation du Gouvernement qui se lave les mains, alors que constitutionnellement responsable de l’organisation ou non des élections locales, à bonne date : Celui-ci se cache derrière une proposition de loi (l’Honorable Débourou étant membre de la majorité, jusqu’aux dernières nouvelles) pour dissimuler son incapacité à prendre les mesures hardies afin de régler les problèmes qui empêchent l’organisation, dans les délais, des élections qui nous concernent, refusant d’endosser les éventuels problèmes que cette prorogation de mandats locaux par « une loi innovante » ne manquera de créer dans un proche futur, tout en faisant jurisprudence, dans notre histoire constitutionnelle !

3) L’hypothétique correction de la Lépi (Liste Electorale Permanente Informatisée), argument majeur ayant servi à justifier la proposition de prorogation des mandats et l’adoption de la Loi Débourou. Une Lépi dont la nécessaire correction est devenue une condition sine qua non, brandie par toute la classe politique, opposition comme majorité, avant d’aller aux élections communales, municipales et locales, ne pourra valablement et raisonnablement pas être prête avant une ou deux années, au moins, selon les prévisions de nombre d’experts et de juristes de haut niveau !

… Aux « idées politiques cachées»!

Donc, en somme, cette loi de prorogation semble être comme un « marché de dupes », alors même que nous ne le sommes point ! Il y a certainement des «idées politiques cachées » (ce n’est pas un nouveau cours magistral) dans cette loi Débourou, que le Professeur Joël Aïvo n’a pas manqué de qualifier de « faute politique grave» et de «mauvais signal pour la démocratie locale»!

Sans aller jusqu’à cette qualification très sévère, et le Professeur s’en est justifié, nous pouvons juste déceler, comme notre confrère Wilfried Léandre Houngbédji du quotidien La Nation, que les « idées politiques cachées » que nous avons évoquées, peuvent se résumer en la motivation principale suivante : Une volonté de faire traîner les choses, intentionnellement ou non, par exemple sur la correction de la Lépi, de sorte à grouper l’organisation des élections locales, communales et municipales, prévues pour 2013, avec les futures élections législatives de 2015, voire même avec les présidentielles de 2016 !

Ainsi, nous aurons des sortes d’élections générales, locales, communales, municipales, législatives et présidentielles, en 2016, avec un argument de taille, comme l’affirme notre confrère : réduire un peu le coût des élections, car l’organisation fréquente de différentes consultations électorales entraine une charge financière trop élevée pour les finances publiques.

Quelle que soit la motivation pour l’adoption de cette loi, quel que soit l’argument du Gouvernement, qui ne l’a, d’ailleurs, jamais exprimé, restant complètement silencieux sur la question du mandat des maires et des conseillers communaux et municipaux, avant que la loi providentielle de l’Honorable Débourou ne vienne lui enlever une longue écharde des pieds, « sauvant » du même coup la démocratie béninoise confrontée à un grave problème récurrent de report fréquent des élections !

Or, l’on se souvient de la position de la Cour Constitutionnelle, par le passé, qui est restée opposée à toute idée de report des élections législatives ou présidentielles, donc d’un possible report des mandats concernés.

Attendons donc de voir quelle sera sa nouvelle position sur la Loi Débourou qui n’est pas encore promulguée ! Peut-être va-t-elle renvoyer leur copie aux députés, préférant chercher d’autres voies plus « conformes à l’orthodoxie juridique et constitutionnelle », quitte, par exemple, à recourir à une consultation populaire sur la question de la prorogation des mandats des élus locaux… Avec la Lépi incriminée, ou avec une liste électorale ad hoc!

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