Incident du 17 juillet 2013 à l’aéroport de Cotonou : la part de vérité de Freddy Houngbédji

Dans notre parution de vendredi 19 juillet 2013 nous avons écrit un article sur Freddy Houngbédji. Le commissaire de la police de l’aéroport accuse le fils d’Adrien Houngbédji de faire incitation à la rébellion. Face à cette situation l’intéressé Freddy Houngbédji revient sur les faits.

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L’arbitraire ordinaire d’un commissaire

Le mercredi 17 juillet 2013, alors que j’effectuais à l’aéroport de Cotonou les formalités d’embarquement à bord d’un vol à destination de Paris, j’ai été saisi de la situation difficile dans laquelle se trouverait l’un de nos concitoyens.

Binational (franco-béninois), il était détenteur d’un passeport français muni d’un visa d’entrée et de séjour au Bénin, dont la régularisé apparaissait douteuse, mais détenteur aussi d’une carte nationale d’identité béninoise, dont l’authenticité n’était pas sujet à caution.

La police de l’air et des frontières s’apprêtait cependant à le refouler ; c’est-à-dire : à le réembarquer manu-militari dans l’avion dont il avait débarqué, le même jour, sans lui laisser aucune possibilité de recours.

Cette mesure est contraire aux textes en vigueur dans notre pays, qui n’autorisent évidemment pas le refoulement, l’expulsion ou l’extradition d’un citoyen béninois du territoire béninois.

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Cédant à un élan spontané de générosité, j’ai accepté de me porter, comme avocat, aux côtés de l’intéressé ; intervenant vainement, en cette qualité, pour dissuader le commissaire de l’aéroport de refouler mon client.Ce dernier m’a expliqué que la mesure qu’il mettait à exécution lui avait été ordonnée par sa hiérarchie, préalablement informée, et qu’il ne pouvait pas en interrompre l’exécution.

Je me suis alors résigné à accompagner mon client au pied de la passerelle où j’ai requis, en son nom et pour son compte, la présence du commandant de bord au pied de la passerelle ; sachant parfaitement qu’il n’accepterait probablement pas qu’un passager soit embarqué à bord par la force.

Comme je m’y attendais, le providentiel commandant de bord, opportunément descendu au pied de la passerelle, a purement et simplement refusé que mon client soit embarqué à bord de son appareil par la force.

J’ai, à ce moment là, éprouvé la satisfaction du devoir accompli : j’étais parvenu à faire arrêter l’exécution d’une mesure totalement arbitraire. J’ai en outre pensé que je pouvais enfin embarquer moi-même, ainsi que m’y avait d’ailleurs invité le commandant de bord.Ce fut une erreur !

Contrarié par mon intervention, notre commissaire décida que je n’embarquerai moi-même pas, dès lors que mon client n’embarquait pas.

J’ai ainsi été empêché d’embarquer pour subir le sort du malheureux dont j’avais accepté de défendre les intérêts.

Nos passeports saisis, nous avons été conduits au poste de garde de l’aéroport où nous avons été retenus de23 heures à 08 heures du matin ; aucune explication ne m’étant donnée, ni sur les motifs de la rétention de mon client ; ni sur ceux de la mienne.

Notre commissaire a eu besoin d’une nuit entière pour imaginer des charges justifiant l’interpellation et la rétention arbitraire d’un avocat ayant agit dans le cadre de la défense des intérêts de son client : l’incitation à la rébellion qui, de la part d’un avocat, ne pouvait être que le résultat d’un ébriété.

Cela, je l’ai su plus tard, lors d’un interrogatoire dans les locaux de la Direction de l’immigration et de l’émigration à Cotonou où j’ai été entendu sur des faits d’incitation à la rébellion et d’ivresse publique, infractions prévues et réprimés par les dispositions de notre code pénal.

J’ai également découvert, ayant assisté à l’interrogatoire de mon client, ainsi que la loi n’y autorise, que pesaient sur lui les infractions de faux et usage de faux, d’outrage à agents de police dans l’exercice de ses fonctions et de rébellion. Le motif pour lequel il avait été retenu pour être refoulé (défaut de visa) venait de passer à la trappe.

La fin de l’histoire ?

Un entretien cordial avec Monsieur le Directeur de l’immigration et de l’émigration. Vérifications faites auprès du consulat émetteur, le visa apposé dans le passeport français de mon client était à présent régulier et son passeport lui a été restitué. Il restera sur le sol béninois et y poursuivra son séjour. Les infractions de faux et usage de faux, d’outrage à agents de police dans l’exercice de ses fonctions et de rébellion passaient à leur tour à la trappe.

Je peux par conséquent me flatter d’avoir bien fait mon travail.

Quant à moi, mon passeport m’a également été restitué, sans que rien de très sérieux n’ait été dit sur l’incitation à la rébellion dont j’aurai été l’auteur en état d’ivresse.

Je n’en resterai évidemment pas là. L’atteinte portée à mon l’honneur, à la dignité et à la réputation de l’avocat que je suis ne restera pas impunie.

Je ne voudrai pas finir ces propos sans rendre hommage à :

– Maître Cyrile DJIKUI, Bâtonnier de l’ordre des avocats au barreau du Bénin, ainsi qu’à Maître Yvon DETCHENOU, Secrétaire de l’ordre, lesquels, informés de la situation dans laquelle se trouvait un confrère, se sont déplacés pour s’assurer que mes droits seraient respectés.

– Maître Prosper AHOUNOU, désigné par le Monsieur le Bâtonnier pour être présent et assister à mon audition, a pris sur son temps pour consacrer sa journée à la défense de la cause de la profession ;

– Maître Yaya POGNON qui, aussitôt averti de la rétention dont je faisais l’objet, m’a rendu visite, au milieu de la nuit, au poste de garde du commissariat de l’aéroport et a lancé l’alerte.

A chacun d’eux, je suis infiniment reconnaissant.

Paris, le dimanche 21 juillet 2013.
Freddy Houngbedji
Avocat

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