Réponse acerbe à l’Episcopat : la preuve que le chef de l’Etat a la mémoire courte

Le ton et la nature de la réponse du Président Boni Yayi à la position de la Conférence épiscopale sur le malaise politique national et sur la révision de la Constitution, donne l’impression que l’actuel locataire de la Marina ignore ou fait fi du rôle, combien important, qu’a toujours joué le Clergé catholique dans l’animation de la vie sociopolitique du Bénin.

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Déplaisante. Provocatrice. Acerbe. Ces termes ne sont pas suffisamment forts pour décrire la correspondance que le Président de la République a adressé à la Conférence Episcopale, en réponse au  «malaise politique actuel et la révision de la Constitution», en date du 15 août dernier. Dans le document dont une copie a été adressée au Président Boni Yayi, la Conférence Episcopale tire son attention sur le nécessité de rester dans l’esprit du consensus, dans la conduite de la réforme relative à la révision de la Constitution.

La réponse du Chef de l’Etat est venue quelques jours après. Cette réponse a surtout été marquée par la réaction du Président Yayi au terme «douteux» utilisé par l’Episcopat pour qualifier les affaires de supposées tentatives d’empoisonnement et de coup d’Etat. On y dénote une colère du Chef de l’Etat, qui est allé jusqu’à accuser l’Episcopat de connivence avec son désormais principal rival, Patrice Talon. Qui n’est rien d’autre que le présumé commanditaire de ces affaires «d’empoisonnement et de coup d’Etat». «Je continue de croire que vous auriez réussi à contacter le principal accusé et que vous détenez de ce fait des informations à travers votre déclaration (…) la Foi ne veut pas être politisée au profit d’un groupe de citoyens, et au détriment d’autres, sur la base des critères qui m’échappent», a affirmé Boni Yayi. Qui réclame de la Conférence Episcopale, les preuves qui l’ont emmenée à qualifier ces affaires de «douteux».

Petite leçon d’histoire au Président Yayi

A lire cette correspondance, à la limite virulente, du Président de la République, on se demande s’il a connaissance du rôle de l’Église catholique dans la vie politique du Bénin. La colère l’a peut-être emmené a oublier le rôle de cette institution dans la vie du Bénin, surtout depuis le Renouveau démocratique? Un rôle que l’église a toujours joué et continue même de le faire, depuis l’avènement de Yayi au pouvoir en 2006. Pour rappel, la Conférence des forces vives de la Nation de 1990, qui a donné naissance au Renouveau démocratique au Bénin, a été présidée par le représentant du Clergé, Mgr Isidore de Souza. Selon certains témoignages, Mgr de Souza a d’ailleurs été désigné à l’unanimité des cinq cent délégués présents à la Conférence pour en être le président.

Ce représentant du Clergé a joué un rôle éminent dans la réussite de ces assises nationales. De plus, c’est Mgr Isidore de Souza qui a présidé le Haut Conseil de la République. Un organe ayant fait office d’Assemblée Nationale jusqu’à la fin de la transition en mars 1991, avec l’élection de Nicéphore Soglo. Mieux, même après la transition, Isidore de Souza est resté dans l’ombre pour suivre les premiers travaux de ce chantier démocratique. Selon d’autres témoignages, à l’époque, face à la réticence des nouvelles autorités béninoises, il a beaucoup pesé de son poids pour que la toute première Cour Constitutionnelle soit installée.  Bref, Mgr de Souza, représentant du Clergé à la Conférence Nationale, a été un acteur majeur dans l’avènement du Renouveau démocratique.

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Et depuis ce temps, le Clergé catholique est devenu comme le gardien du temple, le dernier rempart de la survie démocratique du Bénin. On se rappelle encore de leur médiation pour le dégel de certaines crises sociales (grèves), aussi bien sous le régime Kérékou que sous celui de Boni Yayi. Mieux, en 2011, après le surprenant «premier tour K.O» du candidat Boni Yayi à l’élection présidentielle, le Clergé catholique n’a pas manqué de prendre des initiatives en direction du candidat malheureux, pour que la paix soit préservée.

Dans l’histoire du Bénin, depuis le Renouveau démocratique, le Clergé catholique s’est toujours illustré en sapeur-pompier quand il y a du «feu» dans la demeure.  

On a donc beau comprendre la réaction colérique du Président Boni Yayi à certains termes employés par la Conférence Épiscopale dans son message, l’on ne peut concevoir cette réaction comminatoire et acerbe qu’il a eu en retour. Il n’avait donc qu’à se remémorer ses nombreuses visites au Vatican, la visite au Bénin du Pape Benoît XVI, les honneurs qu’ont apporté et apportent encore au Bénin, les personnalités comme Mgr de Souza, le Cardinal. Le Clergé catholique et les pouvoirs politiques au Bénin, c’est une «liaison profonde».

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