La correction de la Lépi et l’organisation des élections communales sont toujours dans l’impasse. Après plusieurs mois de tergiversions et de tentatives de correction, rien n’a bougé sur ces deux tableaux. La dernière rencontre de crise organisée à la Marina à cet effet, par le Chef de l’Etat, n’a pu déboucher sur un résultat satisfaisant.
Au contraire, elle a renforcé la confusion et l’incertitude sur l’organisation de cette élection.Si l’on devrait s’en tenir aux textes de la République, les élections communales devraient se tenir depuis le mois de Mars dernier. Surfant sur la fronde politique déclenchée quelques mois plus tôt, pour exiger la correction de la Lépi, le gouvernement a fermé les yeux sur l’organisation des élections communales. Il est resté sourd aux nombreuses critiques des citoyens, et de certaines personnalités politiques qui appelaient à ce que les élections se tiennent à bonne date. Enfermé dans un mutisme inquiétant, le gouvernement n’a pu respirer que lorsque l’Assemblée Nationale a voté une Loi qui reporte «sine die» ces élections. Depuis, l’organisation des élections et la correction de la Lépi font grand bruit. En dépit de l’installation du Comité d’Orientation et de Supervision de la Lépi (Cos-Lépi), les choses piétinent toujours en ce qui concerne la correction de la Lépi. Les nombreuses récriminations des populations, et de la classe politique, ont fini par amener le Chef de l’Etat à sortir, tardivement, de son mutisme, en convoquant les membres du Cos-Lépi et des institutions de la République à la Marina, le lundi dernier. Mais, comme on pouvait s’y attendre, la réunion n’a rien apporté à la résolution de la crise.
Pendant que le Chef de l’Etat tient à organiser les élections communales, dans la confusion, en Décembre, certains membres du Cos-Lépi affirment qu’elles ne peuvent être organisées qu’en Septembre 2014. Pendant des heures de bavardage, aucune résolution n’est prise sur la correction de la Lépi, encore moins sur l’organisation des élections. Au finish, la réunion n’a pas pu apporter de réponse précise aux Béninois, qui veulent savoir la date précise de ces élections.
Le gouvernement qui doit convoquer le corps électoral et donner les moyens au Cos-Lépi, pour corriger la Lépi, ne s’y emploie pas. Les députés ont tôt fait de donner leur quitus à cette mascarade, en votant une Loi qui reporte «sine die» ces élections. Puis, des mois après, les deux parties se réunissent à la Marina et semblent s’absoudre de leurs fautes. Tout ceci a bien l’air d’un plan orchestré dans l’ombre, pour coupler les élections communales et législatives en 2015.
Cos-Lépi : le bouc émissaire parfait
Jeu de ping-pong. C’est en partie ce à quoi Boni Yayi et Mathurin Nago se sont adonnés, lors de la réunion dite de crise sur la Lépi et les élections communales. Réunion tenue ce lundi 14 octobre, au Palais de la Présidence de la République.
Boni Yayi, Président de la République, Chef de l’Exécutif, et Mathurin Nago, Président de l’Assemblée Nationale, semblaient s’être mises dans la logique de montrer que leurs institutions ont accompli, chacune de son côté, leurs missions respectives dans le processus de correction de la Lépi (Liste électorale permanente informatisée), en vue de l’organisation des élections municipales. «J’affirme la disponibilité du gouvernement à travailler avec le Cos-Lépi et à œuvrer pour que les élections municipales se tiennent cette année en 2013. (…) Certains de mes compatriotes ont passé un an à contester l’existence de la Lépi. Nous avons perdu du temps pour ça. La question de la Lépi et des communales a toujours été l’intérêt du Gouvernement», a déclaré Boni Yayi. Sans jeter la faute au Gouvernement, Nago blanchit le Parlement. «Le Parlement a largement joué sa partition», a-t-il martelé. Et pourtant, le Président de la République avait déclaré que le problème ne se trouvait pas, non plus, au niveau du Gouvernement.
Cos-Lépi : le mouton du sacrifice
Si le Parlement et le gouvernement se dédouanent, à qui la faute alors? Au Cos- Lépi, est-on tenté de dire. Chargé de la supervision et de la correction du fichier électoral, le Cos-Lépi est un acteur-clé du processus d’organisation des élections municipales et locales.
A ce niveau, Boni Yayi aura réussi un grand coup de communication politique. Les pressions et interpellations ne manquent pas sur l’organisation des élections municipales. Et la responsabilité du gouvernement, notamment son chef, est beaucoup mise en cause dans le retard observé. Mais, avec la tournure de la séance de crise de ce lundi, Boni Yayi aura réussi à montrer que le problème ne se situe pas au niveau de la volonté du Gouvernement.
Ainsi, le Cos-Lépi prend à lui seul les pots cassés. Et pourtant, on a vu ici le Gouvernement, affirmer et reléguer au second plan la question de la correction de la Lépi et des municipales, en faisant de celle à polémique de la révision, sa priorité. Dans cette logique de ‘’bouc-émissarisation’’, le communiqué du Conseil extraordinaire des ministres, tenu ce même lundi, a achevé le travail entamé par la réunion de crise. «Les travaux de correction de la Lépi piétinent exagérément, et, du fait des dysfonctionnements notés au sujet du Cos/Lepi, le processus connaît un retard dangereux et inquiétant pour la démocratie béninoise. (…) En effet, à entendre certains députés membres du Cos/Lepi, les élections communales et municipales ne pourraient véritablement se tenir, et ce, dans le meilleur des cas qu’aux environs du mois de septembres 2014. Le cas échéant, la crédibilité de notre démocratie, dont les élections constituent l’expression vivante, sera considérablement compromise.» Ainsi peut-on lire dans le communiqué du Conseil des ministres.
Le Cos-Lépi de Sacca Lafia apparait comme le mouton de sacrifice, immolé sur l’autel de l’incertitude sur la tenue des élections municipales. Et comme par coïncidence, il a été sacrifié à la veille de la Fête de Tabaski. Une fête dans le cadre de laquelle des moutons sont tués en sacrifice à Allah, par ses fidèles partout dans le monde.
