Du livret bleu à l’indispensable livre blanc

La nouvelle du lancement d’un livret bleu par l’ex- Premier ministre Pascal Irénée Koupaki annoncée de bouche à oreille, a étonné en même qu’il a fait sourire plus d’un. Livret bleu ? Pourquoi pas blanc, vert ou rouge ?

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On connaît plus ou moins les livres blancs publiés généralement pour justifier la gestion qu’on a eu à faire à la tête d’une structure, et surtout pour se laver des soupçons de… mauvaise gestion. On connaît le livre rouge de Mao ZeDong qui a précédé le fameux livre vert du Guide de la Jamahirya arabe libyenne. Mais personne, de mémoire de journaliste, n’avait jamais entendu parler de livre bleu. Aussi, était-on curieux d’en connaître le contenu. L’ex -Premier ministre était donc attendu sur plusieurs sujets d’intérêt national, dont le moindre n’était pas sa démission, jugée tardive par certains, du gouvernement. D’aucuns attendaient surtout qu’il s’explique sur les dossiers scabreux qui ont secoué le pays ces dernières années, et la part qui a été la sienne dans les principaux dossiers que sont le Pvi et les diverses affaires Talon.

Malheureusement, tout a été orchestré à la minute près, pour faire comprendre que l’auteur n’était pas venu pour ça. Car rien de tout ce qui précède ne transparaît, ni directement, ni en filigrane, à travers la cinquantaine de pages de la longue dissertation sur l’homme béninois et sa nécessaire reconversion mentale, objet de la plaquette bleue gracieusement distribuée à l’assistance à la fin de la cérémonie de lancement, qui n’était ni une conférence de presse, ni un lancement ordinaire d’ouvrage, suivie d’une cérémonie de dédicaces. On est sorti de la Salle Polyvalente du Palais des Congrès, trop exiguë pour la circonstance, avec l’impression lancinante d’avoir été témoin du début de quelque chose. Impression renforcée par la reprise en chœur, par deux fois, de l’Hymne national et l’appel du Doyen Stanislas Kpognon à un Forum national sur les questions d’éthique. Comme si la situation politique actuelle appelait encore à un autre sursaut semblable à celui des années 1989/ 1990. Et, comme si le nouveau messie qu’on attendait était déjà arrivé. Et l’assistance, au regard du parcours du personnage et des derniers développements de l’actualité nationale, semble avoir compris pourquoi l’auteur ne pouvait rien dire maintenant de ce qu’on attend pourtant qu’il dise un jour.

De ce point de vue, l’allégorie de la marmite au feu et l’image de la nouvelle corde tressée au bout de l’ancienne, révèlent à souhait que l’ex-Premier Ministre ne s’inscrit pas dans une logique de rupture avec son ancien chef de gouvernement, malgré toutes les couleuvres avalées et les peaux de bananes glissées. La double présence au gouvernement et à la cérémonie de lancement, de son ex-Directeur de Cabinet en fait foi. Tout se passe comme si,  connaissant aujourd’hui, parfaitement, le fonctionnement de son ex patron (?), ses méthodes et sa capacité de nuisance, Koupaki semble avoir délibérément adopté un profil bas, pour ne pas hérisser sa susceptibilité. Reste que sa sortie de samedi dernier, malgré les apparences d’une rencontre anodine, a tout l’air d’un lancement des hostilités. Surtout dans ce climat délétère de révision constitutionnelle, où les soupçons de tripatouillage de la Loi Fondamentale pèsent sur le tenant du pouvoir.

C’est pourquoi, les commentateurs politiques restent sur leur faim, parce que l’heure n’est point aux discours lénifiants sur l’Homme béninois et les vertus à promouvoir dans la société. C’est l’œuvre des religions et des responsables de culte. Le Béninois n’est pas un être éthéré sorti de la cuisse de Jupiter, c’est un être de chair et d’os forgé dans, et par, son environnement sociopolitique. Il faut travailler résolument au changement de cet environnement sociopolitique, fait de mauvaise gestion, de fraudes, de détournements de deniers publics et de corruption généralisée entretenue au sommet de l’Etat, tout cela en toute impunité, et tout le reste nous sera donné par surcroît. L’homme politique est un homme d’action qui ne passe pas son temps à prôner des vertus statiques et immuables, mais des valeurs que, seule l’action politique peut contribuer à faire éclore. On peut comprendre la prudence de Koupaki, contraint par les circonstances et la réalité du jour, de marcher sur des œufs. Mais, tous les amateurs de westerns savent que le cowboy ne sort son arme que pour s’en servir. Si le Premier Ministre veut rendre son discours audible et crédible aux yeux de la plupart des Béninois, il doit sortir résolument des non-dits et des discours philosophiques, pour nous dire franchement sa part de vérité dans la débâcle actuelle, et les moyens de nous en sortir. C ’est pourquoi, dans la foulée de la sortie du livre bleu, l’ex-Premier Ministre doit s’atteler résolument, s’il ne na l’a pas encore fait, à la publication d’un vrai livre blanc, avant que le glaive de la vengeance ne s’abatte sur lui, comme sur les anciens amis et ex-collaborateurs de son ex-patron, que sont les Talon et autres Gbènamèto.

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