L’Assemblée nationale du Bénin à un nouveau président. Il s’appelle Mathurin Coffi Nago. On dira sans doute que c’est la même personne qui tient les rênes de l’institution parlementaire depuis 2007. Et pourtant. Du Mathurin Nago de la cinquième législature (2007-2011) à celui de la sixième législature (2011-2015), il y a bel et bien un changement.
On est passé d’un homme aux ordres de Boni Yayi à un homme conscient de ses pouvoirs de deuxième personnalité de la république, chef de la première institution de contre-pouvoir et prêt à assumer ses prérogatives.
Mathurin Nago a donné une énième preuve de sa métamorphose dans son discours de présentation de vœux au Président de la République. C’était lors de la cérémonie de présentation de vœux au chef de l’Etat. Rien de spécial au cours de la cérémonie qui s’est tenue ce lundi 07 janvier à la salle du peuple du Palais de la présidence de la république.
Bénin : réponse de Boni Yayi aux vœux des présidents des institutions de la République
Morceaux choisis
Appréciant la gouvernance globale du régime Yayi et ses répercussions sur la vie des populations, Mathurin Nago a affirmé que l’action politique (du gouvernement, Ndlr) qui devrait procurer au peuple le mieux-être, est menée avec « des moyens et des méthodes perfectibles». Surtout que cette politique est souvent « marquée par d’importants actes de corruption et de gaspillage de fonds publics chèrement acquis et par l’impunité permanente. » Et « nos concitoyens des villes et des campagnes en parlent entre eux et avec leurs députés. Ils désenchantent et s’emmurent parfois dans la prison du silence », a-t-il ajouté. En faisant constater que les dirigeants béninois sont aujourd’hui face à « un peuple qui entend, mais ne voit pas souvent et ne croit plus en ce qu’on lui dit (…) un peuple qui exprime des sentiments d’incompréhension et de déception face à la multiplication des actes et des scandales de corruption et de malversation et face à l’inaction apparente des responsables et services compétents. » Ce discours qui reflète la réalité que vivent les Béninois contraste avec celui tenu par le gouvernement et ses propagandistes.
Les élections locales censées se tenir en 2013 ont été reportées sine die. La correction de la Liste électorale permanente informatisée en vue de l’organisation desdites élections piétinent. Le Conseil d’orientation et de supervision de la Lépi (Cos-Lépi), organe chargé de superviser la correction du fichier électoral est devenu le bouc ‘émissaire parfait de la non tenue à bonne date des élections locales. Le gouvernement a tendance à s’en laver les mains. Mathurin Nago recentre le débat : « Le Gouvernement et l’Assemblée Nationale se doivent de reconnaître, devant notre peuple, leur responsabilité dans la non tenue de ces élections afin de se mettre résolument au travail pour qu’elles se déroulent effectivement au cours des tous prochains mois de 2014. »
Message de vœux du président mathurin Coffi Nago à Boni Yayi
Succession de discours de présentation de vœux au premier des Béninois par les présidents des différentes institutions de la république. Mathurin Nago aura marqué les esprits de par l’audace et la franchise de son discours. Il a rompu avec les salamalecs teintés d’hypocrisie auxquels on a été habitué en ces occasions de présentation de vœux au chef de l’Etat.
Eviter la guerre des institutions
Les dernières semaines du mois de décembre 2013 ont été marquées par une tension qui ne dit pas son nom entre le gouvernement et le Parlement d’un côté et le Parlement et la Cour constitutionnelle de l’autre. Cette tension est due au rejet du projet de budget général de l’Etat, gestion 2014 par les députés. Ce rejet a été annulé par la Cour constitutionnelle. Ce fut à travers une décision, au ton comminatoire et avec peu d’égard à l’endroit des députés, rendue par la Cour constitutionnelle le 30 décembre. A ce propos, voilà Mathurin Nago qui se fait l’avocat de l’Assemblée nationale en martelant la bonne foi des siens. « …je pense humblement qu’il faut se garder de tout jugement négatif et hâtif à l’endroit du Parlement, qui travaille, à mon sens, avec conscience et patriotisme », a-t-il souligné. Après avoir rappelé, à qui veut l’entendre la mission des députés dans l’animation de la vie démocratique béninoise. « Au-delà de leur mission constitutionnelle, les députés ont une double responsabilité pratique à assumer en tant représentants du peuple: responsabilité envers l’Etat, sa stabilité et sa promotion, mais aussi responsabilité objective et loyale envers nos concitoyens-électeurs et leurs attentes. En raison de cette dernière responsabilité, les députés doivent dire clairement à l’Exécutif, les besoins de leurs concitoyens, leurs satisfactions comme leurs mécontentements, dans les différents domaines de la gouvernance. » Comme pour ramener Boni Yayi et Théodore Holo (président Cour constitutionnelle) à la raison, Nago martèle que « par le dialogue franc et sincère, et le respect scrupuleux des textes, on évitera, à coup sûr, la guerre des institutions, et les mépris et frustrations qui en résultent, et ce dans l’intérêt supérieur de la Nation.» Son appel à l’endroit de chaque dirigeant, chaque citoyen béninois ne passera sans doute pas inaperçu : « comme je le disais en 2010, en cette même occasion, le Bénin, à l’instar des autres pays africains, n’est pas à l’abri des crises socio-politiques susceptibles de compromettre nos acquis démocratiques, économiques et sociaux. Les grognes syndicales et sociales tout au long de l’année 2013, les tensions politiques, la montée vertigineuse des suspicions et des attaques verbales, la crise de confiance en sont des indicateurs et des précurseurs. Nous devons donc y prendre garde. Certes, Dieu aime beaucoup le Bénin. Nous le croyons tous et l’affirmons régulièrement au point de penser que nous pouvons nous permettre de jouer parfois « aux enfants gâtés » et que Dieu se chargera à tout moment de réparer nos erreurs et nos fautes, voire de travailler à notre place. Cela n’est pas évident. C’est de la même manière qu’Il nous aime, qu’Il aime aussi les autres nations, et pourtant ! »
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