Affaire Patrice Talon : tout sur l’audience de la Cour Suprême qui a cassé les arrêts de la Cour d’appel

La chambre judiciaire de la Cour Suprême a rendu dans la nuit du vendredi 03 mai 2014 dernier, son arrêt dans le cadre des affaires tentative d’empoisonnement et tentative  de coup d’état contre la personne de Boni Yayi. Le verdict est sans appel : les deux arrêts de la chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Cotonou dans le cadre de ces dossiers ont été cassés.

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Dans sa décision, la Cour annule formellement les deux arrêts rendus le 1er juillet 2013 par la chambre d’accusation de la Cour d’Appel pour vice de procédure. Elle renvoie ainsi le dossier devant la chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Cotonou autrement constituée. Le motif invoqué est que la chambre d’accusation, dans ses arrêts, a visé les dispositions de l’ancien code de procédure pénale en ses articles 176, 177, 189 et 193, alors qu’un autre code de procédure pénale est entré en vigueur depuis le 29 mai 2013. Dans le premier dossier relatif à l’affaire de tentative d’empoisonnement, le porte-parole de la partie civile est Me Rafiou Paraïso assisté de Me Sadikou Alao, Me Gilbert Atindéhou, Me Evelyne da Silva Ahouanto et autres. Par contre la défense est représentée par Me Joseph Djogbénou, Me Sévérin Quenum, Me Charles Badou, Me Mohamed O. Baré, Me Guy-Lambert Yèkpè, le bâtonnier Cyrille Djicui et autres. Au début de l’audience, après les plaidoiries des avocats des deux parties, le Ministère public représenté par Me Raoul Hector Ouendo a plaidé au profit des moyens développés par les demandeurs avant de parler de la violation des dispositions querellées dans la loi par refus d’applicabilité du nouveau code de procédure pénale et aussi le défaut de fondement juridique.

Les arguments de la défense

En premier lieu, Me Sévérin Quenum, au nom de la défense, dira que sur les principes généraux du droit, les erreurs de forme peuvent donner lieu à réparation puisque la Cour Suprême exerce un pouvoir de substitution. « Les règles -là ont été appliquées mais fait à tort. Il y a vice de forme, il y a erreur à réparer… » déclare t-il à la Cour. Et en matière de complément d’informations, Me Sévérin Quenum affirme que la chambre d’accusation n’a rien inventé. Pour terminer, il demande alors à la Cour de déclarer irrecevables les moyens développés par le Ministère public. A sa suite, Me Joseph Djogbénou demandera de déclarer irrecevables les moyens de la partie adverse. Mais concernant le refus d’applicabilité de la loi brandi par le Ministère public, Me Joseph Djogbénou précise « on refuse quelque chose qui est demandé ». Selon lui, tant qu’il n’y a pas de demande, il n’y a pas de refus. Pour ce faire, il plaide alors pour la substitution, car déclare t-il « lorsque nous plaidions à ce moment-là, personne ne savait que le nouveau code de procédure pénale était déjà mis en vigueur, d’autant que le nouveau code n’a pas été mis à la disposition des juges, vous avez le pouvoir de redresser ce qui ne va pas. Mais on peut casser sans renvoyer ». Quant à , Me Charle Badou il avancera que , si la solution est la même, donc il y a erreur matérielle et elle doit être corrigée. Lorsque vient le tour des avocats de la partie civile de prendre la parole, , Me Rafiou Paraïso et Me Sadikou Alao diront tour à tour que, si une loi est promulguée, elle s’impose dans les secondes, les minutes à tous. Pour finir, ces avocats de la partie civile demandent en choeur à la Cour que cette ignorance de la chambre d’accusation soit sanctionnée. Pour le second dossier relatif à la tentative d’atteinte à la sureté de l’Etat, en raison de la ressemblance avec le  premier dossier, les avocats de la partie civile, de même que le Ministère public, diront que ce dossier mérite aussi cassation. A la suite des plaidoiries des deux parties, Gilbert Ahouandjinou, Président de la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême et Président de la Cour, a mis en délibéré les deux dossiers. La suspension a duré de 17h 04 minutes à environ 21h 10 minutes avant que l’arrêt ne soit rendu. Ainsi, les deux arrêts de la chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Cotonou dans le cadre de ces dossiers ont été cassés et les deux parties ont été renvoyées à nouveau devant la chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Cotonou autrement constituée

Réactions des avocats

Me Sévérin Quenum (avocat de la défense)

« Vous venez d’entendre que la Cour Suprême a prononcé une cassation, c’est une décision de cassation. Mais à l’intérieur, il a été précisé que la décision rendue annule en toutes ses dispositions les arrêts rendus par la chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Cotonou. Il s’agit donc d’une sanction d’irrégularité de forme, c’est-à-dire que les juges de la Cour d’Appel ont appliqué, pour ce qui concerne la forme des décisions qu’ils ont rendues, les règles de l’ancien code de procédure pénale. C’est la forme qui a été abordée, le fond n’a pas été abordé. Et la décision de la Cour s’impose à la juridiction de renvoi. Cela veut dire que les choses restent en l’état pour ce qui concerne le fond et retenez-le, quand nous étions devant le juge d’instruction Angelo Houssou, ou la Cour d’Appel de Cotonou, il avait été indiqué à cette époque là que les faits n’étaient pas susceptibles de donner lieu à poursuite, c’est ce que nous avons appelé la décision de « non lieu ». Nous allons nous donner rendez-vous à la Cour d’Appel de Cotonou pour que les articles qui avaient été énumérés à tort soient remis au bon endroit. Malheureusement, c’est ce que nous devons subir. »

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Me Gilbert Atindéhou (avocat de la partie civile)

« Mon sentiment c’est que dans cette affaire, le droit a été dit, c’est tout. C’est la victoire du droit peut-être, le droit a triomphé. Nous avons l’impression que, quand on parle de la justice, qu’il faut toujours faire confiance aux acteurs, en définitive qu’ils disent le droit. Le droit a été dit et nous sommes fiers de la justice de notre pays. »

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