Bénin : urgence d’une nouvelle politique nationale face à la grossesse chez les adolescentes

La grossesse chez les adolescentes est un phénomène récurrent au Bénin (17% en 2011), avec des perturbations considérables sur la vie des concernées mais aussi sur le développement du pays. 

C’est une entrave majeure à la réalisation de la vision principale de la Conférence Internationale sur la Population et le Développement (Cipd) et des Objectifs du Millénaire pour le Développement (Omd).

Même si il y a eu ces dernières années, une chute du taux d’adolescentes ayant déjà entamé une vie procréative, la situation actuelle demeure inquiétante. D’après le rapport  de l’enquête démographique et de santé (EDSB-IV 2011-2012), 17 % des adolescentes ont déjà commencé leur vie procréative contre 26 % en 1996. Le même rapport précise que : «13% ont eu, au moins, un enfant et 3 % sont enceintes d’un premier enfant. Les proportions d’adolescentes ayant commencé leur vie procréative augmentent rapidement avec l’âge, passant de 3 % à 15 ans à 15 % à 17 ans et à 37 % à 19 ans, âge auquel 30 % des jeunes filles ont déjà eu, au moins, un enfant».

Des maux qui persistent

Bon nombre de facteurs ont trait aux droits sexuels et reproductifs dont le respect n’est pas encore ce qui devrait être du moment où  la sexualité des jeunes continue d’être un sujet tabou dans certains milieux du pays pour raison d’idéologie, de tradition, etc. Les adolescentes sont ainsi exposées à diverses formes de discrimination et de violence. En la matière, le rapport 2012 du secrétaire général  des Nations- Unies à la Commission sur la population et le développement informe que «Environ 150 millions de filles de moins de 18 ans ont été soumises à une quelconque forme de violence sexuelle. Jusqu’à 50 % des agressions sexuelles sont commises contre des filles âgées de moins de 16 ans». L’accès à l’information, entre autres, celles relatives à la prévention d’une grossesse et les moyens de contraception ainsi que l’accès à des services de santé sexuelle et reproductive abordables et de qualité est limité. Du coup, les préoccupations de ces adolescentes en la matière ne sont pas exprimées ; leurs besoins ne sont pas pris en compte, et donc pas satisfaits.

L’intensité de la situation varie selon le milieu de résidence, le niveau d’instruction des filles et le niveau de vie sociale. «En effet informe l’Edsb-IV 2011-2012, si 21 % des jeunes filles résidant en milieu rural ont déjà commencé leur vie procréative, cette proportion n’est que de 11 % en milieu urbain et de 7 % à Cotonou.» Quant au niveau d’instruction, «près du tiers des jeunes filles sans niveau d’instruction (32 %) ont déjà commencé leur vie procréative contre 19 % parmi celles ayant un niveau primaire, 8 % parmi celles de niveau secondaire 1er cycle et 3 % parmi celles qui ont un niveau secondaire 2nd cycle ou plus ». Pour le statut socio-économique, «la proportion de jeunes filles qui ont déjà commencé leur vie procréative diminue avec l’augmentation du niveau de bien-être du ménage, variant de 27 % dans les ménages du quintile le plus bas à 8 % dans ceux du quintile le plus élevé.»

Un frein au développement

Ce taux de natalité chez les adolescentes en est pour beaucoup dans la croissance démographique au Bénin qui inquiète par le taux de fécondité (4,9 enfants par femme selon l’Edsb-IV 2011-2012) d’une part, et d’autre part, vu que les services de santé et autres services sociaux et les infrastructures sont largement en dessous du besoin. Résultat, la grossesse des adolescentes demeure une menace pour le développement.

La vie maternelle précoce des filles expose aussi ces jeunes mères et leurs enfants à des risques de santé avec 1/5 des décès maternels qui est le fait des adolescentes. «Les enfants de mères jeunes (moins de 20 ans) courent généralement un risque plus important de mourir que ceux issus de mères plus âgées. De même, les accouchements précoces augmentent le risque de décès chez les adolescentes.» confirme l’Edsb-IV 2011-2012. Mais aussi des perturbations considérablement sur le parcours scolaire de ces mères.

Réagir maintenant que jamais

Vingt ans après la Conférence Internationale sur la Population et le Développement au Caire qui a relevé l’impératif de maîtriser la croissance démographique, le Bénin a encore du chemin à faire concernant la sexualité des jeunes où il va falloir impérativement renouveler et réaffirmer les engagements politiques et financiers au pays. Il s’agira également de retrousser les manches pour «lever tous les obstacles législatifs et règlementaires à l’accès des adolescents à l’information et aux services de santé sexuelle et reproductive, tels que le consentement obligatoire des parents, les restrictions liées à l’âge et au statut matrimonial». Le combat pour l’élimination de la violence à l’égard des filles, et notamment le mariage des mineures en adoptant et en appliquant rigoureusement les lois sur l’âge du mariage doit être aussi une priorité.

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