Une nouvelle page se tourne à la Haac. Après un mandat de cinq ans qui a paru douloureusement interminable aux yeux de bien des acteurs des médias .Pourquoi ? Simplement parce que la dernière mandature qui a eu en son sein le plus gros contingent d’hommes de médias-journalistes et techniciens de l’audio-visuel -( au total six sur les neuf membres ) a été sans conteste l’une des plus calamiteuses qu’il nous ait été donné de voir depuis le Renouveau démocratique .
C’est pénible d’émettre un jugement aussi péremptoire et aussi lapidaire pour nos confrères qui en ont été membres dont certains sont des hommes de très grande valeur. Mais nous avons le triple devoir déontologique, citoyen et républicain de dire ce qui s’est passé, pour que demain l’expérience désastreuse de cette Haac ne se répète plus .Il faut le dire tout haut pour que ceux qui ont des oreilles entendent :la Haac Nata a été plombée dès l’entame de son mandat par le péché originel de la dépendance envers le pouvoir exécutif .Et le résultat est désastreux à tous égards. En 24 ans de Renouveau démocratique on n’a jamais été aussi peu libre de nous exprimer sur les médias de service public financés pourtant par l’argent du contribuable que sous les presque neuf ans du régime Yayi. Aussi peu libre de suivre des débats contradictoires sur les médias de service public.
C’est sous cette Haac, en effet, la Haac du tandem Nata-Loko que l’institution s’est mise, sans en avoir l’air, au service du pouvoir exécutif, qui envoie directement les ordres dans le sens de ce qu’elle doit faire : sanctionner les journalistes, autoriser l’octroi de nouvelles fréquences aux promoteurs de médias. On l’a vue dans la sanction d’interdiction définitive infligée à un organe de presse écrite privé et dans le refus d’octroyer l’autorisation d’émettre à d’autres médias audiovisuels proches d’une certaine opposition.La Haac du tandem Nata-Loko a donné la fâcheuse impression de ne rien faire pour déplaire au président Yayi. La télévision de service public est devenue sous nos yeux, ce que d’aucuns ont appelé la « chaîne privée de Yayi ».Tour à tour, les émissions de débat à caractère politique ont disparu des programmes de la première chaîne sans que la Haac ait jamais levé le petit doigt pour remettre les pendules à l’heure. Des journalistes qui ne faisaient que leur travail ont été durement sanctionnés tandis que d’autres ont été carrément interdits d’antenne, au nez et à la barbe de la Haac .C’est devant les caméras de toutes les télévisions que le président Nata a dit haut et fort que la Haac n’a pas les moyens de sanctionner les responsables de l’Ortb qui ont interdit l’accès de la télévision de service public à l’opposition et à tous ceux qui veulent donner un autre son de cloche. Or, la loi organique qui fait bloc avec la loi fondamentale est, on ne peut plus claire sur les pouvoirs de la Haac :
-Son indépendance est clairement définie et garantie en son article 4 :. Article 4 : La Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication est une institution indépendante de tout pouvoir politique, de tout parti politique, association ou groupe de pression de quelque nature que ce soit
-Son rôle et ses attributions sont clairement définis aux alinéas3 et 4 de l’article 5 que nous citons in extenso en soulignant les parties significatives :
Article 5 : La Haute Autoritéde l’Audiovisuel et de la Communication, conformément aux dispositions des articles 24, 142 et 143 de la Constitution a pour mission :
– de garantir et d’assurer la liberté et la protection de la presse ainsi que de tous les moyens de communication de masse dans le respect de la loi ;
– de veiller au respect de la déontologie en matière d’information et l’accès équitable des partis politiques, des associations et des citoyens aux moyens officiels d’information et de communication ;
– de garantir l’utilisation équitable et appropriée des organismes publics de presse et de communication audiovisuelle par les institutions de la République, chacune en fonction de ses missions constitutionnelles et d’assurer le cas échéant les arbitrages nécessaires.
C’est dans l’article13 que le législateur s’est voulu plus explicite sur la mission républicaine qu’elle est appelée à jouer: La Haute Autoritéde l’Audiovisuel et de la Communication assure, d’une manière générale, le respect de l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion dans la presse et la communication audiovisuelle, notamment pour les émissions d’information politique.
En cas de manquement grave aux obligations, elle adresse des observations aux dirigeants de l’organisme défaillant et, le cas échéant, leur inflige des sanctions.
Les nouveaux conseillers de la Haac quels qu’ils soient sont invités à s’approprier tous ces textes afin d’éviter des malentendus inutiles avec les acteurs des médias qui, dans l’ensemble ne font que leur devoir : celui d’informer .Ils se doivent de prendre la pleine mesure de la mission qui est la leur. Une mission éminemment républicaine de pilier indéboulonnable de la démocratie. Ils ne sont au service de personne ni surtout de la personne qui les a désignés et envers qui, ils n’ont qu’un seul devoir : celui de l’ingratitude. La célèbre boutade, « Vous m’avez nommé, je ne vous connais plus » doit être leur credo.
Laisser un commentaire