Claudine Prudencio : Boni Yayi est « Papa malheur » et non « Papa bonheur »

Elle hausse une fois encore le ton pour dire non à la gouvernance « calamiteuse » que connaît le Bénin sous le régime Boni Yayi. Claudine Prudencio, député à l’Assemblée Nationale et présidente du parti Union pour le Développement d’un Bénin Nouveau (Udbn) était face à la presse ce dimanche 05 octobre 2014.  

A travers une conférence de presse animée sous le thème « le climat des affaires au Bénin », la député Fcbe (famille politique de Yayi, ndlr) de la sixième circonscription électorale a crié son haro sur la gouvernance économique actuelle du Bénin. La première secrétaire parlementaire, anciennement chantre du régime du Changement-Refondation, voit désormais les choses d’un si mauvais œil qu’elle regrette ses déclarations laudatrices d’un certain temps. « C’est moi, n’est-ce pas, qui parlais de ‘Papa bonheur’ ! Mea culpa. Mea maxima culpa. C’était ‘papa malheur’. C’était bien papa malheur », regrette Prudencio. La présidente de l’Udbn estime que Boni Yayi est « la plus grave erreur de notre histoire ». « Car ce que prépare notre Président, c’est un gouffre financier dans lequel il va plonger le pays avant de le laisser à son successeur », explique Mme Prudencio. Qui dénonce haut et fort la chasse aux investisseurs nationaux à laquelle s’adonne le régime Yayi ; avec toutes les conséquences fâcheuses de fait et de droit sur les finances de l’Etat. Claudine Prudencio s’est basée sur trois cas qui ont longtemps marqué l’actualité nationale pour illustrer ses propos. Ce sont les cas Sébastien Ajavon, Patrice Talon et Samuel Dossou-Aworet. Ci-dessous un large extrait des propos liminaires de la présidente de l’Udbn.

« Boni Yayi nous mène droit dans un abîme »

«  (…)Il faut que nous ayons de la mémoire. En juin de l’année dernière, juin 2013 donc, un redressement fiscal abusif portant sur 35 milliards de francs Cfa environ a été adressé au groupe Cajaf-Comon de Monsieur Sébastien Ajavon. Après le refus d’un règlement à l’amiable proposé par le groupe,  la Cour d’Appel, saisie, a condamné l’Etat à restituer 14 milliards de nos francs à Sébastien Ajavon ou du moins à sa société. A ce jour,  un franc n’a été versé. Vous avez dû vous-mêmes, entendre en mai dernier le Président du Conseil National du Patronat raconter que malgré la médiation de l’Archevêque de Cotonou, c’est une banale histoire de non salutation en public, qui a décidé Boni Yayi à renoncer à faire rembourser cet argent. Alors même que Monsieur Ajavon était d’accord pour renoncer aux dommages-intérêts en mettant fin à l’action en justice qu’il avait engagée à l’époque en ce sens. A part ces 14 milliards, Dieu seul sait à combien se chiffrent jour après jour, les dommages-intérêts que finira bien par calculer la Cour.

Claudine Prudencio sur le projet Epine dorsale : « le monde entier sera au courant et la justice tranchera… »

Affaire PVI et Sodeco, la situation est encore plus grave. Je suis passé au dossier Patrice Talon. Qu’il vous souvienne,  que le 13 mai 2014, un tribunal arbitral de la Cour commune de justice et d’arbitrage de l’Ohada a condamné le Bénin à verser plus de 160 milliards de francs Cfa à Monsieur Talon si le Contrat relatif à la mise en place du Programme de Vérification des Importations (PVI) de Nouvelle Génération avec la société Bénin Control SA n’était pas remis en exécution. Vous savez avec moi ce qu’il en est. L’ultimatum de 60 jours donné par le Tribunal est passé depuis longtemps, et des centaines de millions de francs Cfa d’astreintes sont en train de s’accumuler sur le montant de la condamnation initiale. Entre temps, Yayi Boni et ses thuriféraires ont clamé que la Ccja/Ohada n’est pas informée de cette décision. Après, ils ont dit que le Bénin n’a pas reçu notification de la décision. Et pour finir, ils ont saisi à leur tour la cour. Comme si la nouvelle procédure était suspensive de la première décision.

Sans les inévitables astreintes et dommages-intérêts qui vont s’ajouter, le montant total des redevances issues de ces décisions de justices rendues à l’interne et à l’international contre le Bénin s’élève déjà à plus de 174 milliards de francs Cfa. Et à l’Udbn, nous avons l’impression qu’une amnésie collective frappe tout le pays sur le sujet.

Je ne saurais finir sans évoquer le cas « Epine Dorsale » qui implique quant à lui Monsieur Samuel Dossou-Aworet. Ce dossier-là, vous savez que j’en parle depuis plusieurs mois. J’en parle parce que c’est un dossier que je connais très bien. Je ne sais pas s’il faut encore que je répète ce que vous savez déjà. Mais il parait que la répétition est pédagogique. Le dossier Épine Dorsale de Développement Intégré de l’Economie Béninoise est une initiative du Groupe Pétrolin de notre compatriote Samuel Dossou-Aworet, dont il a assuré, sur fonds propres, les premiers financements. Il s’agit entre autres des frais d’études relatifs à toutes les composantes du projet ainsi que les travaux de réalisation du port sec de Parakou. L’appel d’offres international lancé par les Etats du Bénin et du Niger le 04 Août 2008, relatif à la concession de gestion, de réhabilitation et d’extension du chemin de fer de Cotonou jusqu’à Niamey via Dosso a été remporté par le groupe Pétrolin. Ça, vous le savez déjà. Vous savez aussi que des manœuvres obscures en faveur du Groupe Bolloré qui n’avait même pas soumissionné se déroulent depuis un certain temps dans l’optique de lui octroyer le marché. Ce contre quoi, en ma qualité d’élue de la nation, je me suis insurgée. Exactement comme je m’insurge contre l’injustice faite à tous les opérateurs économiques nationaux lésés sous le régime Yayi. Je les invite à me faire parvenir leurs dossiers, et je défendrai partout leurs cas sans répit et sans peur.

Chers amis journalistes, vous avez dû entendre comme moi, le vendredi 03 octobre 2014  dernier le Ministre Marcel Alain de Souza annoncer que le contrat avec Bolloré devrait bientôt être conclu et signé. Je n’ai même pas su s’il fallait en rire ou en pleurer. Si j’avais ri, ç’aurait été parce que cette signature serait nulle et de nulle effet. Je ne vois pas comment Monsieur Bolloré et son groupe auraient pu faire valoir un contrat signé dans ces conditions. Il est censé connaitre le droit. Et il doit s’y conformer. Si j’avais pleuré, ç’aurait été non pas désespoir pour le dossier, mais pour mon pays. L’affaire est pendante devant les tribunaux. Et comme Boni Yayi sait le faire, il est prêt à foncer tête baissée. Il va encore provoquer la condamnation du Bénin à payer des centaines de milliards de francs Cfa. Et c’est dangereux. C’est grave. Quel est donc que ce Président qui ne se soucie pas de l’avenir de ses compatriotes ? Pourquoi cet entêtement ? Pourquoi cet empressement ? Il a déjà accumulé près de 200 milliards de dettes, et ça ne lui dit rien. Il en veut encore plus.

Chers amis journalistes, c’est ce qui motive la conférence de presse de ce jour. Boni Yayi nous mène droit dans un abîme. Un gouffre sans fond. Et, parce que je dois mon mandat à ce peuple, je viens le dénoncer avec force. Il ne sera pas dit demain, quand le groupe Pétrolin aura gagné des milliards de dommages-intérêts, qu’il faudrait qu’il y renonce par souci de patriotisme. Dites à Boni Yayi de restituer à chacun son dû maintenant avant qu’il ne soit trop tard. S’il y a encore une concession que Monsieur Samuel Dossou-Aworet serait prêt à faire, c’est d’exécuter le projet en associant pour sa part l’opérateur Bolloré et son groupe. Pas l’inverse. Que cela soit clair. Les menaces, les tentatives d’intimidation ne nous effraient pas. Elles ne nous ébranlent pas. (…) »

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